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Commandement de l'espace

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Commandement de l'espace
Image illustrative de l’article Commandement de l'espace
Logo du Commandement de l'espace

Création
Pays Drapeau de la France France
Allégeance Armée française
Type Organisme interarmées
Effectif 220 (500 +100 non permanents en 2 025[1])
Garnison Centre spatial de Toulouse, (provisoire jusqu'en 2025[2])
Ancienne dénomination Commandement interarmées de l'espace
Commandant Général Philippe Adam

Le Commandement de l'espace (CDE) est un service interarmées de l'Armée française dépendant du Chef d'état-major de l'Armée de l'air et de l'espace créé le [3].

Son but est de « disposer d’une défense spatiale renforcée »[4] et d'une autonomie stratégique spatiale[5].

Disposer de lanceurs

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Apres la seconde guerre mondiale et l'utilisation des fusees V2 par l'Allemagne, la France a voulu maitriser la technologie des missiles.

En mai 1946, le Laboratoire de recherches balistiques et aérodynamiques, installé à Vernon dans l'Eure, est chargé de mettre au point les premiers moteurs-fusées, en réunissant des ingénieurs allemands du programme V2 mobilisés par l'Armée française. Ces développements, qui aboutiront au lancement de fusées sondes, dont la fusée Véronique en 1952, intéressent à la fois les scientifiques et les militaires en charge de la force de frappe française.

En 1959, le Comité de Recherches Spatiales est chargé de coordonner les activités spatiales françaises. L'industrie aérospatiale française (Sud et Nord aviation) crée alors la Société pour l'étude et la réalisation d'engins balistiques (la SEREB) dont les réalisations militaires (le programme Pierres précieuses) doivent créer les moteurs de fusées balistiques pour la force de frappe, le missile S2 (1968) et aboutissent à la fusée Diamant-A, le premier lanceur spatial français, qui mettra en orbite le satellite Astérix, le 26 novembre 1965, depuis le champ de tir d'Hammaguir, en Algérie.

Pour animer la recherche et le développement industriel des lanceurs, le Général de Gaulle décida la création du Centre national d'études spatiales (CNES), le 19 décembre 1961. Sa première priorité a été le développement de lanceurs spatiaux autonomes.

Concevoir et utiliser des satellites

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La France a développé tardivement des applications spatiales militaires en essayant sans succès d'intéresser des partenaires européens. N'ayant pas les moyens de financer l'ensemble de la panoplie militaire déployée par la Russie, la Chine et surtout les États-Unis, la France bâtit progressivement les briques technologiques. Elle dispose de satellites opérationnels dans trois domaines : les télécommunications militaires (tactiques et stratégiques), l'observation optique et l'écoute.

  • Les télécommunications militaires

Les telecommunications militaires spatiales françaises sont prises en charge dans un premier temps par des équipements de télécommunications spécialisés emportés par des satellites de télécommunications civils nationaux de la série Telecom (charges utiles Syracuse 1 et 2) lancés entre 1984 et 1996 (7 satellites en tout) et placés sur une orbite géostationnaire. Le premier satellite de télécommunications entièrement destiné à l'activité militaire est lancé en 2005. Ce premier exemplaire de la série Syracuse 3 est suivi d'un deuxième satellite lancé en 2006 et de deux satellites développés en coopération avec l'Italie : Sicral 2 (38 % de la capacité réservée pour la France, lancé en 2015) et Athéna-Fidus (2014). En 2021, deux satellites Syracuse 4 assurent la relève de la génération précédente.

  • La reconnaissance optique

En utilisant les connaissances technologiques accumulées dans le cadre du programme spatial d'observation civil Spot la France a déployé des satellites de reconnaissance optique en orbite héliosynchrone. Les premiers sont les satellites Hélios dont le premier exemplaire Helios 1A est lancé en 1995 et qui dispose d'une résolution spatiale de 1 mètre. Trois autres satellites de la même famille sont lancés entre cette date et 2009. Deux satellites Pléiades à usage mixte civil et militaire sont lancés en 2011 et 2012 (Pléiade 1-A et 1-B). L'Italie dispose d'un droit d'accès aux images produites par cette série en échange de la possibilité pour les militaires français d'accéder aux images radar produites par la série des 4 COSMO-SkyMed lancés par les italiens entre 2004 et 2010.

La relève des satellites d'observation optique français est assurée par les trois satellites de la composante spatiale optique (CSO) du programme MUSIS (lancements en 2018 de CSO 1, en 2020 de CSO 2 et prévu en octobre 2024 de CSO 3) qui doivent fournir des images avec une résolution spatiale pouvant atteindre 20 cm.

  • Le renseignement électromagnétique

Dans le domaine du renseignement d'origine électromagnétique (ELINT en anglais) la France a développé de petits prototypes destinés à valider les technologies nécessaires. Ce sont d'abord les petits satellites Clémentine (lancement en 1994) et Cerise (lancement en 1995) puis les constellations Essaim (lancement en 2004) et Elisa (2011).

Le premier système opérationnel CERES, constitué d'une constellation de trois satellites, a été déployé en orbite basse en novembre 2021.

Créer un Commandement interarmées

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Logo du Commandement interarmées de l'espace

Un service interarmées de l'Etat-Major

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Un Commandement interarmées de l'espace (CIE) est créé en juillet 2010 pour répondre à la dimension stratégique croissante du milieu extra atmosphérique, et placé sous commandement unique les divers éléments de la stratégie spatiale.

Ce sera réalisé avec la mise en place d’un organisme interarmées sous l'autorité du chef d'état-major des armées[6]. Le CIE est placé sous l’autorité du major général des armées (MGA). La tutelle sur le CIE est exercée par le sous-chef opérations de l’état-major des armées (EMA).

Organisation du CIE

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Le CIE est organisé en trois échelons :

  • l’échelon de commandement est exercé par l’officier général CIE
  • l'échelon de synthèse est composé de quatre bureaux à vocation transverse pour les fonctions de politique spatiale et coopération, préparation de l’avenir, emploi et coordination, maîtrise de l’environnement.
  • l’échelon technique est composé de six sections pour l’observation, l’écoute, la surveillance de l’espace, l’alerte, les télécommunications et le domaine positionnement-navigation-datation.

Les missions du CIE

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L’action du CIE porte sur l’ensemble des capacités spatiales nationales intéressant la défense, qu’elles soient patrimoniales, duales ou commerciales. Le CIE élabore pour le chef d'état-major des armées la politique spatiale militaire et contribue à sa mise en œuvre.

Ses missions relèvent de l'élaboration et de la conduite des coopérations, du recueil du besoin et de la préparation de l’avenir, de la coordination et de l’emploi des moyens spatiaux, et de la maîtrise de l'environnement spatial.

2019 : création du Commandement de l'espace

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Contexte stratégique

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Le , la ministre des Armées, Florence Parly, annonce par voie de presse que le satellite russe Loutch-Olymp a tenté d'espionner le satellite franco-italien Athena-Fidus en 2017[7]. Ce satellite semble en effet s'être placé près du satellite Athena-Fidus, dans ses «cônes d'émission », pour tenter de capter des communications[8].

Cet acte est qualifié par la ministre d'« acte d'espionnage ». Le président de la République, Emmanuel Macron, annonce ensuite la volonté de la France de mettre en place une stratégie spéciale de défense. Un groupe de travail est créé au ministère des Armées pour étudier le projet et rendre des conclusions à l'automne 2018[7].

De plus, face aux États-Unis, à la Russie et à la Chine, qui développent également des stratégies de défense, d'espionnage voire d'attaque dans le milieu spatial[8],[9], la France entend pouvoir répondre à ces potentielles menaces et protéger ses intérêts militaires et civils, ainsi que ceux des projets spatiaux européens (satellite Copernicus, système de positionnement Galileo) dans l'espace[10].

Le , Emmanuel Macron annonce la création en septembre 2019 du Commandement de l'espace (alors désigné sous le nom « Grand Commandement de l'espace »)[11], lors d'un discours à l'hôtel de Brienne. Ce commandement sera créé au sein de l'Armée de l'air, qui deviendra alors l'Armée de l'air et de l'espace[5].

Parallèlement, en 2019 aux États-Unis, le président Donald Trump annonce la création d'une Space Force[12], déclarant que « l'espace est le nouveau front de guerre du monde »[13].

Mise en place

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La ministre Florence Parly, le , annonce la mise en place de cette force suivant trois axes :

  • Un « grand commandement de l'espace » sera basé à Toulouse, capitale européenne de l'aérospatial, le premier septembre, sous l'autorité de l'Armée de l'air. Il comptera un effectif de départ de 220 personnes, pour atteindre sa taille nominale en 2025[10]. Il aura pour but de « fédérer et de coordonner tous les moyens consacrés au domaine spatial de défense »[4].
  • Un deuxième axe légal, avec une évolution législative afin de rester dans le cadre des lois française et internationales. La loi française sera adaptée à cette nouvelle force opérationnelle, afin d'assurer la capacité d'action de la France en son sein, que ce soit du point de vue militaire ou civil[4].
  • Un troisième axe technologique qui devra permettre concrètement à la France de se protéger et se défendre contre les actes malveillants d'autre puissances spatiales. Ainsi, il sera prévu de renouveler les capacités spatiales, que ce soit en matière de surveillance ou de défense active[4].

Le futur centre opérationnel du Commandement devrait voir le jour d'ici 2025 au plus près du Centre spatial de Toulouse du CNES, et permettre d'y regrouper les équipes du Centre militaire d'observation par satellites (CMOS) et du Centre opérationnel de surveillance militaire des objets spatiaux (COSMOS), unités actuellement basées à Creil et Lyon[14] et qui ont été rattachées au commandement à l'été 2019[15].

Diverses infrastructures militaires verront leurs capacités améliorées, comme le système de détection de satellites GRAVES. Les télescopes scientifiques TAROT du CNRS, dont l'une des missions est la surveillance des débris spatiaux, seront eux aussi utilisés au sein de cette nouvelle force[4],[16].

Des lasers de puissance pourraient également être développés pour « éblouir » les autres satellites, ou des mitrailleuses pour détruire les panneaux solaires des satellites visés[17].

Des nano-satellites patrouilleurs pourraient également être développés à partir de 2023, pour protéger les satellites en détectant la présence d'engins spatiaux à proximité[17].

D'après de la mise en place de ce commandement est « de confier à une instance unique de décision l’ensemble des leviers dont dispose la France dans le domaine extra-atmosphérique »[18] et par la même occasion de permettre « une intégration poussée et d’une continuité entre moyens aériens et spatiaux »[19].

À terme, la France prône la possibilité d'un axe de développement franco-allemand de ces nouvelles stratégies[10].

AsterX a été piloté par ce service en 2021 et est le premier exercice militaire spatial français[20].

Le Commandement de l'Espace

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Participation du CDE à l'exercice Global Sentinel 2022 à Vandenberg.

Les missions du CDE sont relatives à l'élaboration de la politique spatiale militaire, à la mise en œuvre des mesures concourant à la préservation de la liberté d'accès et d'utilisation de l'espace extra-atmosphérique et il est chargé, dans son domaine de compétence de l'application de la politique définie par l'état-major de l'armée de l'air en matière de maîtrise des risques[21][réf. incomplète].

Financement

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Pour financer ce programme, aux 3,6 milliards d'euros déjà prévus pour le renouvellement complet des capacités satellitaires dans la loi de programmation militaire 2019-2025, un budget supplémentaire de 700 millions d'euros sera ajouté, étalés sur cette période de 7 ans [4],[10].

Satellites utilisés

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Le CDE a en 2024 la responsabilité d’utilisation de nombreux satellites :

Il a également conclu des partenariats avec l’Allemagne et l'Italie pour l’imagerie radar avec les satellites SAR-Lupe allemand et COSMO-SkyMed italien.

Organisation

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[...]

La base aérienne à vocation spatiale

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En 2019, le commandement de l'espace se structure au sein du Centre national d’études spatiales [CNES], avec un contingent de 200 militaires.

En 2022, l'Armée de l'air signe un « bail à construction » de quarante ans pour édifier un bâtiment de 11.000 mètres carrés sur une emprise du CNES a Toulouse afin d'abriter les activités du CDE et des locaux destinés au futur Centre d’excellence Otan (COE) dédié à l’Espace.

En 2024, le CDE continue sa montée en puissance, ses effectifs etant portés à 500 militaires dont 85 % seront issus de l’AAE.

En août 2025, quand les locaux du CDE seront livrés, une « base aérienne 101 sera ouverte et deviendra (…) la première base aérienne à vocation spatiale (BAVS) française », annonce l’AAE dans le numéro de juillet 2024 d’Air Actualités.

Et la revue ajoute : C’est « une appellation non dénuée de sens puisque la première base aérienne française, ouverte en 1934, était la base aérienne 101 de Toulouse-Francazal. .»

Commandants

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Liste des commandants interarmées de l'espace

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Nom Photo Prise de fonction Chef d'état-major de l'Armée de l'air
1 Général de division aérienne Yves Arnaud 30 août 2010[24] Général d'armée Jean-Paul Paloméros
Général d'armée Denis Mercier
2 Général de brigade aérienne Jean-Daniel Testé 1er juillet 2014 [25] Général d'armée Denis Mercier
Général d'armée André Lanata
3 Général de brigade aérienne Jean-Pascal Breton
1er septembre 2017 [26] Général d'armée André Lanata
Général d'armée Philippe Lavigne
4 Général de brigade aérienne Michel Friedling 20 septembre 2018[27] Général d'armée Philippe Lavigne

Liste des commandants de l'espace

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Nom Photo Prise de fonction Chef d'état-major de l'Armée de l'air et de l'espace
1 Général de division aérienne Michel Friedling 20 septembre 2019[28] Général d'armée Philippe Lavigne
Général d'armée Stéphane Mille
2 Général de division aérienne Philippe Adam [29] Général d'armée Stéphane Mille

Références

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  1. http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2022/01/04/construction-d-un-complexe-tertiaire-au-profit-du-commandeme-22693.html
  2. http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2022/08/25/le-commandement-de-l-espace-n-aura-pas-ses-nouveaux-locaux-a-23277.html
  3. Arrêté du 3 septembre 2019 portant création et organisation du commandement de l'espace
  4. a b c d e et f « La ministre de la Défense précise ce que sera le commandement de l’espace », sur Ciel et Espace",
  5. a et b « Emmanuel Macron annonce la création d'un commandement militaire de l'espace », sur Le Figaro,
  6. Arrêté du 7 juillet 2010 portant création du commandement interarmées de l'espace et modifiant l'arrêté du 16 février 2010 portant organisation de l'état-major des armées et fixant la liste des autorités et organismes directement subordonnés au chef d'état-major des armées
  7. a et b "Paris dénonce une tentative d'espionnage russe sur un de ses satellites en 2017", Europe 1, le 7 septembre 2018
  8. a et b "Pourquoi la France doit se préparer à la guerre des étoiles", Challenges, le 7 septembre 2018
  9. "Un missile chinois détruit un satellite en orbite" Futura Science, 1er janvier 2019
  10. a b c et d "L'armée de l'Air et de l'Espace", ASAF, 26 juillet 2019
  11. "Emmanuel Macron annonce la création d'un "grand commandement de l'espace", France 24, le 13 juillet 2019
  12. « Les États-Unis ont désormais une force de l'Espace: "L'espace est le nouveau front de guerre du monde" », sur RTBF Info, (consulté le )
  13. La Libre.be, « Missile antisatellite, espionnage, hacking... L'espace, ce "nouveau front de guerre du monde" », sur LaLibre.be, (consulté le )
  14. "Toulouse au cœur de la bataille de l'espace", La Dépêche, 1er septembre 2019
  15. « Florence Parly acte la création du Commandement de l’espace au sein de l’Armée de l’air », sur defense.gouv.fr,
  16. "Moyens au sol", Debrits Spatiaux, Site du CNES, consulté le 26 juillet 2019
  17. a et b "Spatial militaire : la France veut pouvoir riposter dans l'espace", Science et Avenir, le 26 juillet 2019
  18. Antony Dabila, L’émergence des « Armées de l’Espace » et la « martialisation » des programmes spatiaux, article extrait des pages 121 à 136 de la Revue Stratégique sur cairn.info, (N° 126-127) : Deuxième âge spatial : concurrence et complémentarité des acteurs stratégiques à l’ère du New Space
  19. Ibid.
  20. La France a lancé le premier exercice militaire spatial de son histoire , France TV Info, 9 mars 2021
  21. Art. 2, 3 et 4 de l'arrêté du 3 septembre 2019.
  22. Helios remplacé par la CSO
  23. Assemblée nationale, « Commission de la défense nationale et des forces armées »,
  24. Décret du 30 août 2010 portant affectation d'officiers généraux
  25. Décret du 4 juin 2014 portant affectations d'officiers généraux
  26. Décret du 1er août 2017 portant affectations d'officiers généraux
  27. Décret du 30 juillet 2018 portant affectations d'officiers généraux
  28. Décret du 20 septembre 2019 portant affectations d'officiers généraux
  29. Décret du 29 juin 2022 portant affectation d'officiers généraux

Bibliographie

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  • « Vers l'Armée de l'air et de l'espace », Air Actualités, no 724,‎ , p. 6-13.
  • Antony Dabila, « L’émergence des « Armées de l’Espace » et la « martialisation » des programmes spatiaux », Stratégie, Institut de stratégie comparée, nos 126-127 « Deuxième âge spatial : concurrence et complémentarité des acteurs stratégiques à l’ère du New Space »,‎ , p. 121-136 (ISBN 979-1-092-05187-2, lire en ligne)
  • « Vers l'Armée de l'air et de l'espace », Air Actualités,‎ , p. 6-13.

Articles connexes

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Liens externes

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