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Documentaire

«Lynx», bonnes pattes, bon œil

Le procès du siècle, délibérations citoyennesdossier
Subtil et inédit, le documentaire animalier réalisé par Laurent Geslin raconte la vie de félins discrets et au bord de l’extinction.
par Coralie Schaub
publié le 19 janvier 2022 à 5h27
(mis à jour le 26 janvier 2022 à 14h34)

C’est une grande goulée d’air pur, un ravissement pour les mirettes, des sons rares et étonnants qui titillent les esgourdes. En ces temps mornes et étouffants, foncez en salles vous faire chouchouter les sens et l’âme avec Lynx, un subtil documentaire réalisé par Laurent Geslin. Le photographe animalier nous emmène dans le Jura, sur les traces du lynx boréal, ce gros matou roux tacheté de noir, à la touffe pointue au bout des oreilles et à la queue riquiqui. Du feulement du mâle en rut aux premiers pas gourds de trois chatons «plus mignons tu meurs», des soins maternels à Homo Sapiens responsable de la mort prématurée de deux des petits, le film raconte la vie d’une famille de félins, sur fond de paysages féeriques peuplés de tout un tas de bestioles (chamois, renards, hermines, grands-ducs, pics noirs, la forêt grouille de vie…). Un exploit, tant le lynx est une espèce discrète. Si discrète qu’elle n’avait jamais jusqu’ici été filmée dans son milieu naturel, avec des animaux réellement sauvages, selon Laurent Geslin. Il aura fallu à celui-ci neuf ans d’une patiente traque et un an de tournage pour lever un peu le voile sur ce fascinant prédateur, le plus grand félin d’Europe.

Espèce utile

Exterminé au XIXe siècle, le lynx boréal avait disparu d’Europe occidentale. En France, il est revenu naturellement dans le Jura depuis la Suisse, où il a été réintroduit dans les années 70. C’est dans ce massif que l’on trouve la population française la plus importante, environ 80 à 100 individus. Dans les Vosges, malgré une réintroduction débutée dans les années 80, seuls trois ou quatre lynx étaient recensés en 2020 et la population est au bord de l’extinction. Quelques individus sont parfois observés dans les Alpes, en Bourgogne ou dans le massif Central. Très peu nombreuse, fragmentée, victime de braconnage ou d’accidents de la route, la population de lynx en France est très vulnérable. Pourtant, cette espèce protégée est utile, essentielle même. Alors qu’elle n’attaque pas ou très peu les troupeaux domestiques, elle permet de limiter les dégâts faits sur la forêt par ses proies herbivores (chevreuils, chamois et lièvres). Il nous reste à nous, humains, à accepter le retour parmi nous de cette vie sauvage, libre et indomptée, qu’incarnent le lynx, l’ours ou le loup. De cohabiter avec elle, en paix. Pas gagné, mais espérons que ce film enchanteur y contribuera.

Lynx de Laurent Geslin, en salles le 19 janvier… 1h24
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