Les soeurs Rondoli
()
À propos de ce livre électronique
Si on ne parfumait pas la vie avec de l'amour, le plus d'amour possible, mignonne, comme on met du sucre dans les drogues pour les enfants, personne ne voudrait la prendre telle qu'elle est.»
Guy de Maupassant
<p><b>Guy de Maupassant</b> nació en 1850 en el castillo de Miromesnil, en el seno de una ennoblecida familia normanda y se crio en Étretat, al cuidado de su madre, que se había separado de su marido. En 1869 partió hacia París con la intención de estudiar Derecho pero la guerra franco-prusiana trastocará sus planes: se alistó como voluntario y combatió en Normandía.</p> <p>Acabada la guerra, de la mano de Flaubert, amigo de su madre, conoció en París a la sociedad literaria del momento; en 1880 publicó su cuento <em>Bola de sebo</em> en el volumen colectivo <em>Las veladas de Médan</em>, piedra fundacional del movimiento naturalista. Otros cuentos como los contenidos en <em>La casa Tellier</em> (1881) o <em>Mademoiselle Fifi</em> (1882) lo acreditaron como uno de los maestros del género, de modo que cuando en 1883 salió a la luz su primera novela, <em>Una vida</em> (ALBA CLÁSICA núm. XLI), ya era un escritor famoso. A esta novela siguieron otras de la talla de <em>Bel Ami</em> (1885; ALBA CLÁSICA núm. CXIX), <em>Mont-Oriol</em> (1887; ALBA CLÁSICA núm. II), <em>Pierre y Jean</em> (1888), <em>Fuerte como la muerte</em> (1889) y <em>Nuestro corazón</em> (1890; ALBA CLÁSICA núm. LXVI). Murió en París en 1893, víctima de una enfermedad hereditaria que lo llevó a la locura.</p> <p>«Maupassant –escribiría Joseph Conrad–, a quien se ha llamado maestro del mot juste, nunca ha sido un mero tratante de palabras. Sus mercancías no han sido cuentas de vidrio sino pulidas gemas: quizá no las más raras y preciosas, pero sí con las mejores aguas de su género.»</p>
Lié à Les soeurs Rondoli
Livres électroniques liés
Les soeurs Rondoli Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationIn Dracula memoriam: Chronique vampirique vénitienne, parisienne et condruzienne Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationCôté rue: Recueil de nouvelles Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationKuessipan (format poche) Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Couleurs émouvantes Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationArsène Lupin, gentleman-cambrioleur Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Lettres du bout du monde: Lettres à ma fille Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationFantôme d'Orient Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe petit prince d'Aranéide: Un roman poétique Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationMaux en dérives d'amour: Roman Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationTous ou personne: Roman Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe crapaud de l’Île de Batz: Les enquêtes du commandant Le Fur - Tome 7 Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationFantôme d’Orient Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLola et le fleuve Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationArsène Lupin -- Arsène Lupin, Gentleman-Cambrioleur Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL’enfer Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationPauline Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLes émois dans tous ses états Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLes Contes de nuit Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe soleil blanc du silence: D'Almería à Oran Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Souffle des Ancêtres: Littérature blanche Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationYvette Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationJuvénilescences: Le Temps de l'école Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationEn double file Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL'Ombre bleue de l’olivier: Chronique de l'Espagne en guerre Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Spleen de Paris: recueil posthume de poèmes en prose de Charles Baudelaire Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationUn voyage: Belgique, Hollande, Allemagne, Italie Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL'Ankou: Une enquête d'Onésime Gagnon en terre bretonne Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa Maison Cabane Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Spleen de Paris Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5
Classiques pour vous
30 Livres En Francais Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Le Procès Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationMoby Dick Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Mahomet et les origines de l'islamisme Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Les Misérables (version intégrale) Évaluation : 3 sur 5 étoiles3/5Le Comte de Monte-Cristo Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Le Petite Prince (Illustré) Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Alice au pays des merveilles Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5L'art de magnétiser Évaluation : 3 sur 5 étoiles3/5Les Trois Mousquetaires Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Orgueil et Préjugés - Edition illustrée: Pride and Prejudice Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Orgueil et Préjugés Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationCyrano de Bergerac: Le chef-d'oeuvre d'Edmond Rostand en texte intégral Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Les malheurs de Sophie (Illustré) Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Les Miserables Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Discours sur la servitude volontaire Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Le Mystère Chrétien et les Mystères Antiques Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Les aides invisibles Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5Le comte de Monte-Cristo: Édition Intégrale Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationFables Illustrées Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Orgueil et Préjugés (Edition bilingue: français-anglais) Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5La Peur Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5De la démocratie en Amérique - Édition intégrale Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLes frères Karamazov Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa maîtrise de soi-même par l'autosuggestion consciente Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Le Necronomicon: (Edition française) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL'antéchrist Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL'Art de la Guerre: Suivi de Vie de Machiavel Évaluation : 3 sur 5 étoiles3/5Oeuvres complètes de Marcel Proust Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5La Légende du Roi Arthur - Version Intégrale: Tomes I, II, III, IV Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluation
Avis sur Les soeurs Rondoli
0 notation0 avis
Aperçu du livre
Les soeurs Rondoli - Guy de Maupassant
Les soeurs Rondoli
Pages de titre
Les sœurs Rondoli
La patronne
Le petit fût
Lui ?
Mon oncle Sosthène
Le mal d’André
Le pain maudit
Le cas de Mme Luneau
Un sage
Le parapluie
Le verrou
Rencontre
Suicides
Décoré !
Châli
Page de copyright
Guy de Maupassant
Les sœurs Rondoli
Les sœurs Rondoli
À Georges de Porto-Riche .
I
– Non, dit Pierre Jouvenet, je ne connais pas l’Italie, et pourtant j’ai tenté deux fois d’y pénétrer, mais je me suis trouvé arrêté à la frontière de telle sorte qu’il m’a toujours été impossible de m’avancer plus loin. Et pourtant ces deux tentatives m’ont donné une idée charmante des mœurs de ce beau pays. Il me reste à connaître les villes, les musées, les chefs-d’œuvre dont cette terre est peuplée. J’essayerai de nouveau, au premier jour, de m’aventurer sur ce territoire infranchissable.
Vous ne comprenez pas ? – Je m’explique.
C’est en 1874, que le désir me vint de voir Venise, Florence, Rome et Naples. Ce goût me prit vers le 15 juin, alors que la sève violente du printemps vous met au cœur des ardeurs de voyage et d’amour.
Je ne suis pas voyageur cependant. Changer de place me paraît une action inutile et fatigante. Les nuits en chemin de fer, le sommeil secoué des wagons avec des douleurs dans la tête et des courbatures dans les membres, les réveils éreintés dans cette boîte roulante, cette sensation de crasse sur la peau, ces saletés volantes qui vous poudrent les yeux et le poil, ce parfum de charbon dont on se nourrit, ces dîners exécrables dans le courant d’air des buffets sont, à mon avis, de détestables commencements pour une partie de plaisir.
Après cette introduction du Rapide, nous avons les tristesses de l’hôtel, du grand hôtel plein de monde et si vide, la chambre inconnue, navrante, le lit suspect ! – Je tiens à mon lit plus qu’à tout. Il est le sanctuaire de la vie. On lui livre nue sa chair fatiguée pour qu’il la ranime et la repose dans la blancheur des draps et dans la chaleur des duvets.
C’est là que nous trouvons les plus douces heures de l’existence, les heures d’amour et de sommeil. Le lit est sacré. Il doit être respecté, vénéré par nous, et aimé comme ce que nous avons de meilleur et de plus doux sur la terre.
Je ne puis soulever le drap d’un lit d’hôtel sans un frisson de dégoût. Qu’a-t-on fait là-dedans, l’autre nuit ? Quels gens malpropres, répugnants ont dormi sur ces matelas. Et je pense à tous les êtres affreux qu’on coudoie chaque jour, aux vilains bossus, aux chairs bourgeonneuses, aux mains noires, qui font songer aux pieds et au reste. Je pense à ceux dont la rencontre vous jette au nez des odeurs écœurantes d’ail ou d’humanité. Je pense aux difformes, aux purulents, aux sueurs des malades, à toutes les laideurs et à toutes les saletés de l’homme.
Tout cela a passé dans ce lit où je vais dormir. J’ai mal au cœur en glissant mon pied dedans.
Et les dîners d’hôtel, les longs dîners de table d’hôte au milieu de toutes ces personnes assommantes ou grotesques ; et les affreux dîners solitaires à la petite table du restaurant en face d’une pauvre bougie coiffée d’un abat-jour.
Et les soirs navrants dans la cité ignorée ? Connaissez-vous rien de plus lamentable que la nuit qui tombe sur une ville étrangère ? On va devant soi au milieu d’un mouvement, d’une agitation qui semblent surprenants comme ceux de songes. On regarde ces figures qu’on n’a jamais vues, qu’on ne reverra jamais ; on écoute ces voix parler de choses qui vous sont indifférentes, en une langue qu’on ne comprend même point. On éprouve la sensation atroce de l’être perdu. On a le cœur serré, les jambes molles, l’âme affaissée. On marche comme si on fuyait, on marche pour ne pas rentrer dans l’hôtel où on se trouverait plus perdu encore parce qu’on y est chez soi, dans le chez soi payé de tout le monde, et on finit par tomber sur la chaise d’un café illuminé, dont les dorures et les lumières vous accablent mille fois plus que les ombres de la rue. Alors, devant le bock baveux apporté par un garçon qui court, on se sent si abominablement seul qu’une sorte de folie vous saisit, un besoin de partir, d’aller autre part, n’importe où, pour ne pas rester là, devant cette table de marbre et sous ce lustre éclatant. Et on s’aperçoit soudain qu’on est vraiment et toujours et partout seul au monde, mais que, dans les lieux connus, les coudoiements familiers vous donnent seulement l’illusion de la fraternité humaine. C’est en ces heures d’abandon, de noir isolement dans les cités lointaines qu’on pense largement, clairement, et profondément. C’est alors qu’on voit bien toute la vie d’un seul coup d’œil en dehors de l’optique d’espérance éternelle, en dehors de la tromperie des habitudes prises et de l’attente du bonheur toujours rêvé.
C’est en allant loin qu’on comprend bien comme tout est proche et court et vide ; c’est en cherchant l’inconnu qu’on s’aperçoit bien comme tout est médiocre et vite fini ; c’est en parcourant la terre qu’on voit bien comme elle est petite et sans cesse à peu près pareille.
Oh ! les soirées sombres de marche au hasard par des rues ignorées, je les connais. J’ai plus peur d’elles que de tout.
Aussi comme je ne voulais pour rien partir seul en ce voyage d’Italie je décidai à m’accompagner mon ami Paul Pavilly.
Vous connaissez Paul. Pour lui, le monde, la vie, c’est la femme. Il y a beaucoup d’hommes de cette race-là. L’existence lui apparaît poétisée, illuminée par la présence des femmes. La terre n’est habitable que parce qu’elles y sont ; le soleil est brillant et chaud parce qu’il les éclaire. L’air est doux à respirer parce qu’il glisse sur leur peau et fait voltiger les courts cheveux de leurs tempes. La lune est charmante parce qu’elle leur donne à rêver et qu’elle prête à l’amour un charme langoureux. Certes tous les actes de Paul ont les femmes pour mobile ; toutes ses pensées vont vers elles, ainsi que tous ses efforts et toutes ses espérances.
Un poète a flétri cette espèce d’hommes :
Je déteste surtout le barde à l’œil humide
Qui regarde une étoile en murmurant un nom
Et pour qui la nature immense serait vide
S’il ne portait en croupe ou Lisette ou Ninon.
Ces gens-là sont charmants qui se donnent la peine,
Afin qu’on s’intéresse à ce pauvre univers,
D’attacher des jupons aux arbres de la plaine
Et la cornette blanche au front des coteaux verts.
Certes ils n’ont pas compris tes musiques divines,
Éternelle Nature aux frémissantes voix,
Ceux qui ne vont pas seuls par les creuses ravines
Et rêvent d’une femme au bruit que font les bois !
Quand je parlai à Paul de l’Italie, il refusa d’abord absolument de quitter Paris, mais je me mis à lui raconter des aventures de voyage, je lui dis comme les Italiennes passent pour charmantes ; je lui fis espérer des plaisirs raffinés, à Naples, grâce à une recommandation que j’avais pour un certain signore Michel Amoroso dont les relations sont fort utiles aux voyageurs ; et il se laissa tenter.
II
Nous prîmes le Rapide un jeudi soir, le 26 juin. On ne va guère dans le Midi à cette époque ; nous étions seuls dans le wagon, et de mauvaise humeur tous les deux, ennuyés de quitter Paris, déplorant d’avoir cédé à cette idée de voyage, regrettant Marly si frais, la Seine si belle, les berges si douces, les bonnes journées de flâne dans une barque, les bonnes soirées de somnolence sur la rive, en attendant la nuit qui tombe.
Paul se cala dans son coin, et déclara, dès que le train se fut mis en route : « C’est stupide d’aller là-bas. »
Comme il était trop tard pour qu’il changeât d’avis, je répliquai : « Il ne fallait pas venir. »
Il ne répondit point. Mais une envie de rire me prit en le regardant tant il avait l’air furieux. Il ressemble certainement à un écureuil. Chacun de nous d’ailleurs garde dans les traits, sous la ligne humaine, un type d’animal, comme la marque de sa race primitive. Combien de gens ont des gueules de bulldog, des têtes de bouc, de lapin, de renard, de cheval, de bœuf ! Paul est un écureuil devenu homme. Il a les yeux vifs de cette bête, son poil roux, son nez pointu, son corps petit, fin, souple et remuant, et puis une mystérieuse ressemblance dans l’allure générale. Que sais-je ? une similitude de gestes, de mouvements, de tenue qu’on dirait être du souvenir.
Enfin nous nous endormîmes tous les deux de ce sommeil bruissant de chemin de fer que coupent d’horribles crampes dans les bras et dans le cou et les arrêts brusques du train.
Le réveil eut lieu comme nous filions le long du Rhône. Et bientôt le cri continu des cigales entrant par la portière, ce cri qui semble la voix de la terre chaude, le chant de la Provence, nous jeta dans la figure, dans la poitrine, dans l’âme, la gaie sensation du Midi, la saveur du sol brûlé, de la patrie pierreuse et claire de l’olivier trapu au feuillage vert de gris.
Comme le train s’arrêtait encore, un employé se mit à courir le long du convoi en lançant un Valence sonore, un vrai Valence, avec l’accent, avec tout l’accent, un Valence enfin qui nous fit passer de nouveau dans le corps ce goût de Provence que nous avait déjà donné la note grinçante des cigales.
Jusqu’à Marseille, rien de nouveau.
Nous descendîmes au buffet pour déjeuner.
Quand nous remontâmes dans notre wagon, une femme y était installée.
Paul me jeta un coup d’œil ravi ; et, d’un geste machinal, il frisa sa courte moustache, puis, soulevant un peu sa coiffure, il glissa, comme un peigne, ses cinq doigts ouverts dans ses cheveux fort dérangés par cette nuit de voyage. Puis il s’assit en face de l’inconnue.
Chaque fois que je me trouve, soit en route, soit dans le monde, devant un visage nouveau, j’ai l’obsession de deviner quelle âme, quelle intelligence, quel caractère se cachent derrière ces traits.
C’était une jeune femme, toute jeune et jolie, une fille du Midi assurément. Elle avait des yeux superbes, d’admirables cheveux noirs, ondulés, un peu crêpelés, tellement touffus, vigoureux et longs, qu’ils semblaient lourds, qu’ils donnaient rien qu’à les voir la sensation de leur poids sur la tête. Vêtue avec élégance et un certain mauvais goût méridional, elle semblait un peu commune. Les traits réguliers de sa face n’avaient point cette grâce, ce fini des races élégantes, cette délicatesse légère que les fils d’aristocrates reçoivent en naissant et qui est comme la marque héréditaire d’un sang moins épais.
Elle portait des bracelets trop larges pour être en or, des boucles d’oreilles ornées de pierres transparentes trop grosses pour être des diamants ; et elle avait dans toute sa personne un je ne sais quoi de peuple. On devinait qu’elle devait parler trop fort, crier en toute occasion avec des gestes exubérants.
Le train partit.
Elle demeurait immobile à sa place, les yeux fixés devant elle dans une pose renfrognée de femme furieuse. Elle n’avait pas même jeté un regard sur nous.
Paul se mit à causer avec moi, disant des choses apprêtées pour produire de l’effet, étalant une devanture de conversation pour attirer l’intérêt comme les marchands étalent en montre leurs objets de choix pour éveiller le désir.
Mais elle semblait ne pas entendre.
« Toulon ! dix minutes d’arrêt ! Buffet ! » cria l’employé.
Paul me fit signe de descendre, et, sitôt sur le quai : « Dis-moi, qui ça peut bien être ? »
Je me mis à rire : « Je ne sais pas, moi. Ça m’est bien égal. »
Il était fort allumé : « Elle est rudement jolie et fraîche, la gaillarde ! Quels yeux ! Mais elle n’a pas l’air content. Elle doit avoir des embêtements ; elle ne fait attention à rien. »
Je murmurai : « Tu perds tes frais. »
Mais il se fâcha : « Je ne fais pas de frais, mon cher ; je trouve cette femme très jolie, voilà tout. Si on pouvait lui parler !