La Littérature en Question
La Littérature en Question
Le débat sur la place du poète dans la cité remonte à l’antiquité, avec la réflexion de
Platon dans la République, en effet Platon prétend bannir le poète de la cité, par conséquent,
la poésie est assimilée a une forme de délire, ou bien de la folie, elle est non seulement
distincte des activités rationnelles dans la cite, mais aussi incompatible avec la démarche
dialectique. Platon distingue entre deux modes de connaissance à savoir : un mode de
connaissance enthousiaste, et un mode de connaissance rationnel. Baudelaire a réfléchi avec
son « spleen » sur la place du poète dans un contexte politique et social dans lequel le poète
est maudit, il est question d’un siècle de désenchantement ; une situation définie selon
l’expression le « Mal du siècle ». De fil en aiguille, on commence à réfléchir sur la dimension
éthique de la poésie comme exercice spirituel après la seconde guerre mondiale, il s’agit
d’étudier les rapports entre la mystique et la poésie. Dans le numéro spécial 19-20, de la
revue « Fontaine » paru en Mars-avril 1942 et intitulé « De la poésie comme exercice
spirituel », Max-Pol Fouchet ajoute que :
La poésie ainsi conçue se pourrait définir, dans une large acception, comme celle qui se refuse
au divertissement. S’il est vrai que les hommes, pour parler comme Pascal, n’ayant pu guérir
la mort, la misère, l’ignorance, se sont avisés, afin de se rendre heureux, de n’y point penser,
l’exercice spirituel est justement d’y penser, de rejeter leur oubli, de chercher à les connaître
Baudelaire précise que la poésie est ainsi un acte spirituel qui transcende le réel brut et
qui affirme la dimension spirituelle de l’homme. Il affirme que l’imagination est non
seulement « la reine des facultés » car elle lie analyse et synthèse mais aussi elle est la reine
du vrai. Rimbaud quant à lui renoue avec la tradition de la voyance dans Les lettres du voyant.
Mallarmé associe l’emploi ordinaire de la parole à une communication de l’échange
monétaire, en effet le poète appelle à une rupture avec le langage courant qui s’échange
comme la monnaie. La question de l’opposition entre la poésie et le discours rationnel s’avère
une question centrale dans l’histoire de la poésie française. L’abbé Bremond souligne la
dimension mystique de la poésie avec ses recherches sur la poésie contemporaine, en effet le
poète assimile la poésie à une forme de prière, il consacre ses recherches à l’étude du
« sentiment religieux » depuis la fin des guerres de religion jusqu’à nos jours. Selon Bremond
le poète pur c’est celui qui se rapproche de l’intensité spirituelle et la prière, en effet la poésie
pure se définit par son caractère musical : un vers pur, c’est un vers débarrassé de l’éthique,
du social, du propos, du sens même, mais qui, par sa seule musique, vaut comme une unité
autonome et charme le lecteur, le transportant vers un ailleurs tout mystique.
Jean Onimus confère à la poésie une fonction libératrice dans une société contemporaine
de consommation, il considère la poésie comme une connaissance concrète qui s’oppose à une
connaissance abstraite, scientifique et rationnelle. Onimus insiste sur la dimension
existentielle de la poésie, il prête à tous les arts une nature poétique, il souligne également que
la connaissance scientifique exile l’homme de monde et transforme le monde en un objet de
connaissance abstraite. Le rôle de la poésie dans la société était abordé par plusieurs revues
littéraires pendant les années d’occupation1, ces revues aspirent à une poésie qui va de pair
avec un acte de résistance. L’écrivain ou bien le poète doit être contemporain de son siècle
selon le premier numéro de la revue « Confluences ». À l’encontre de la théorie de « l’art pour
l’art », ces revues littéraires assignent à la littérature une dimension engagée.
Nous avons vu que la poésie dépend du contexte dans lequel elle émerge, en effet le
débat sur la poésie ne date pas d’hier ; il faut remonter à l’antiquité pour découvrir les
prémices de cette question, en outre la poésie était traversée par plusieurs questions au 20ème
siècle. Plusieurs poètes ont interrogé non seulement le rapport de l’homme au monde mais
aussi la fonction du langage poétique, plusieurs autres ont interrogé la question de
l’inspiration poétique.
1
Jehl Florian, Résistance de la poésie : les revues littéraires durant la Seconde Guerre mondiale[en ligne],
Université Paris-Sorbonne, disponible sur : www.ejournals.eu/pliki/art/8592/ (consulté le 18 juin 2019).