La Grande Terreur
La Grande Terreur
Contexte :
D’août 1937 à novembre 1938, Staline organise le plus grand massacre d’Etat commis en
Europe en période de paix. En 16 mois, le NKVD arrête et condamne 1% de la population :
750 000 personnes sont exécutées et près d’1 million sont déportés au Goulag.
A l’issue de procès truqués, les « procès de Moscou », 60 000 cadres du Parti et officiers
de l’Armée rouge sont exécutés. Mais 92% des victimes de la Grande Terreur sont des
citoyens ordinaires désignés par le NKVD comme des « éléments antisoviétiques » :
anciens koulaks, membres du clergé orthodoxe, délinquants et marginaux, représentants
des minorités nationales… Ils font l’objet d’une dizaine d’opérations d’exécutions de
masse. Lorsque Staline met un terme à ces dernières, il fait éliminer la plupart des
bourreaux.
En 1956, N. Khrouchtchev condamne les crimes de l’époque stalinienne, évoquant les
purges politiques, mais il passe sous silence cette répression de masse. A la chute de
l’URSS, l’ouverture des archives permet enfin de comprendre la « Grande Terreur ».
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entièrement toutes les cellules et organisations locales de l’Organisation militaire
polonaise, et en premier lieu l’ensemble des cadres espions et saboteurs de cette
organisation dans les domaines de l’industrie, du transport et de l’agriculture. L’opération
devra être achevée dans un délai de 3 mois, soit le 20 novembre 1937
2. Devront être immédiatement arrêtés :
a. Les membres actifs de l’organisation militaire polonaise démasqués par l’Instruction
(…)
b. Tous les prisonniers de guerre de l’armée polonaise restés en URSS
c. Tous les émigrés polonais en URSS »
Le commissaire du peuple à l’Intérieur de l’URSS, commissaire général de la Sécurité d’Etat, Iejov.
Ordre opérationnel du NKVD n°00485, 11 août 1937
« Strictement confidentiel,
Préparez un lieu secret, si possible dans une cave du bâtiment du NKVD, où les condamnés à mort
seront exécutés. Les exécutions auront lieu de nuit. Avant l’exécution, vous vérifierez
soigneusement l’identité de l’individu exécuté. Les corps seront enterrés dans une fosse commune
creusée à l’avance dans un lieu secret. Le transport des corps devra être effectué exclusivement
dans des véhicules de fonction du NKVD. Vous signerez le certificat individuel d’exécution en un
seul et unique exemplaire. Ces certificats seront envoyés tous les cinq jours sous pli scellé et par
paquet séparé spécial uniquement par coursier du NKVD au chef (du département
d’enregistrement statistique). Vous êtes personnellement responsable du secret absolu
concernant le lieu, la date, l’heure et les méthodes d’exécution. (…) Vous m’enverrez la liste du
personnel du NKVD autorisé à prendre part au processus d’exécution. En aucun cas, il ne sera fait
appel à la police ordinaire, ni à des militaires. Toutes les personnes impliquées (…) signeront un
document spécial les engageant au secret sous peine d’arrestation immédiate. »
Directive du 2 août 1937 envoyée par Popachenko, chef du NKVD de la région de Kouïbychev, au
responsable des opérations de répression dans le district d’Oulianovsk
« C’était la première fois de ma vie que je touchais à une faux. Or même pour un faucheur
mâle expérimenté, couper le foin sur les bosses d’un marais n’est pas une chose simple. Nous
fauchions pieds nus. Ahanant, perdant le souffle, nous avancions sur plusieurs lignes en balançant
nos faux et tout le jour nous pataugions ainsi dans les marais en titubant sur les bosses. Le retour
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dans les huttes se faisait la nuit. Nous étions trempées et souillées de vase jusqu’à la taille. (…) Les
gens qui ont vécu l’époque stalinienne sans être jetés en prison nous disent parfois qu’ils ont
souffert plus que nous. Dans une certaine mesure, c’est vrai. D’abord – et c’est le plus important –
le sort nous a préservés, nous, du terrible péché qu’était la participation directe ou indirecte aux
assassinats et aux persécutions. Ensuite, l’attente du malheur est parfois plus torturante que le
malheur lui-même. Mais voilà justement : le terrible malheur qui s’était abattu sur nous ne nous
avait pas délivrés pour autant de l’attente perpétuelle, harassante, de nouveaux coups. »
Evguenia S. Guinsbourg, le Ciel de la Kalyma (Le Vertige, t.2), Editions du Seul, 1980 pour la traduction
française, Points, 1997
https://www.youtube.com/watch?v=ES8A4JgwOV8