Aménagement Concerté
Aménagement Concerté
RESUME
L’aménagement forestier a connu une évolution différentielle entre le nord et le sud de la
Méditerranée. Dans la rive nord de la Méditerranée, l’évolution du concept d’aménagement
accompagne le développement socio-économique, qui s’est traduit par un déplacement des besoins
tirés de la forêt: bois de qualité, paysagisme, accueil du public, amélioration du patrimoine
biologique... etc. Ainsi, les aménagements s’efforcent d’améliorer simultanément les potentialités et
les fonctions de la forêt.
Cependant, au Sud de la Méditerranée, l’exécution des plans d’aménagement type-forêt tempérée, n’a
pas permis, non seulement, d’atteindre l’objectif primordial sur lequel ils ont mis l’accent à savoir; la
régénération des ressources forestières, mais la dégradation de ces écosystèmes a continué avec un
rythme important. En effet, élaborés selon le principe du rendement soutenu, ces aménagements ne
prenaient pas suffisamment en considération la dimension socio-économique des zones forestières et
péri-forestières. Tenant compte de ce constat, de nouvelles approches d’aménagement basées sur la
participation et la concertation avec les populations riveraines sont développées.
En effet, la forêt méditerranéenne constitue une richesse économique et un bien social par les
multiples services qu’elle offre au profit des populations riveraines: bois de chauffe, bois de service,
glands, noix, champignons, plantes aromatiques et médicinales. Également, la forêt par ses ressources
pastorales vertes constitue un espace pastoral par excellence et demeure le seul refuge pour le bétail en
période de sécheresse.
Avant 1914:
Durant cette période, la forêt faisait parti des bien collectifs des tribus usagers. La notion
d'aménagement de forêts ou de règlement d'exploitation était quasiment absente. L'exploitation
forestière avait pour but la satisfaction des besoins en bois et en charbon des grandes agglomérations
urbaines.
Avec l’avènement du protectorat, la forêt a été domanialisée et la gestion des forêts a été confié à
l’Administration Forestière qui venait d’être crée. Cette période a connu un vaste programme de
recépage pour mettre de l'ordre dans les forêts feuillues notamment, celles du chêne-vert et du chêne
liège. Certaines mesures ont été prises afin de restaurer la forêt et contrôler les exploitations
(règlement d’exploitation, organisation de la profession) qui portent préjudice à la régénération.
Désormais, cette phase de reconstitution fut perturbée par la deuxième guerre mondiale qui a
bouleversé l’équilibre difficilement obtenu.
Les premiers plans d'aménagement ont vu le jour, les buts recherchés ont été la remise en état des
peuplements, la régénération assistée et la reconstitution des forêts naturelles, et enfin l'établissement
d'un plan d’aménagement des forêts particulièrement du chêne liège, du cèdre et du chêne-vert. Les
aménagements visaient principalement la production du bois d'œuvre et d'industrie et la production du
liège.
Après la mise en application de la première génération des aménagements, les forestiers constateront
que la régénération naturelle notamment du cèdre et du chêne-liège, les pins et le thuya, ne s’installait
pas comme prévu et décidait alors de revoir les méthodes d’aménagement de ces essences avec recours
à la régénération artificielle
Pour répondre à cet objectif, l’aménagiste a adopté des modes de traitement et des règles de culture en
fonction des types de peuplements et des conditions stationnelles. La régénération artificielle était
réservée aux sites où le renouvellement naturel est capricieux.
Cette phase a connu aussi l’apparition des aménagements sylvo-pastoraux notamment dans les
formations à chêne-vert par la formation de série traitée en futaie pastorale à longue révolution.
Période 1990-2001:
Depuis les années 90, la nouvelle philosophie d'aménagement repose sur les principes de
développement durable en se referant aux initiatives des instances internationales. A ce propos,
l'aménagiste a adopté une conception nouvelle par l’adaptation de l’aménagement aux principales
vocations et à la multifonctionnalité des formations forestières avec l'implication des populations
usagères. Également, cette nouvelle vision intègre la dimension environnementale et la conservation
de la biodiversité et tend vers une gestion informatisée des forêts.
Dans les pays Sud-Méditérrannéens, où la forêt continue à jouer un rôle de premier ordre sur le plan
social et pastoral, et malgré l’effort consenti pour l’élaboration fastidieuse des plans d’aménagement,
l’objectif primordial sur lequel ils ont mis l’accent - régénération et pérennité de la forêt- non
seulement n’a pas été atteint, mais la dégradation des écosystèmes forestiers continue avec un rythme
inquiétant en terme de dédensification et de défrichement.
Pour illustrer les limites de cette démarche, on étudiera l’évaluation de l’application de deux plans
d’aménagement (1951-72 et 1972-92) dans une subéraie de plaine au Maroc, celle de la Maâmora,
considérée comme la plus vaste subéraie de plaine au monde, qui occupe actuellement 70.000ha.
Elaboré selon les normes des forêts tempérées, cet aménagement s’est fixé comme objectifs, la
production maximale de liège de reproduction, la mise en valeur des vides par des reboisements
(Eucalyptus, Pins, Acacia,) et le maintien de chêne-liège là où la régénération est possible.
Elaboré selon le principe de la rentabilité économique, ce deuxième aménagement s’était fixé comme
objectifs: (i) le maintien du chêne-liège dans les zones où il est économiquement rentable avec une
densité supérieure à 100 souches/ha; (ii) la substitution de chêne-liège par des essences introduites
dans les zones où la suberaie est souffrante où le périmètre terrier est inférieur à 80 ml.
Cette nouvelle vision orientée sur les bénéfices financiers réalisables, a permis l’extension des
plantations d’eucalyptus sur 38.000 ha. Cette option a été encouragée par la mise en place d’une usine
de production de pâte à papier à base d’eucalyptus. Au terme de cet aménagement, la superficie de
chêne liège a continué à régresser pour atteindre 67.000 ha soit une régression de près de 23% par
rapport à 1972.
L’évaluation de l’application des deux plans d’aménagement a fait ressortir une perturbation de
l’écosystème chêne-liège en Maâmora à travers deux indicateurs pertinents à savoir l’occupation des
sols et la densité de chêne-liège. En effet, la suberaie a connu une nette régression de 38% en l’espace
de 40 ans au profit des plantations artificielles d’Eucalyptus et de pins. En terme de densité, on assiste
à une forte dédensification, la classe de densité inférieure à 100 souches/ha est passée de 11.600 ha en
1951 à 57.000 ha soit 75% de la superficie de la suberaie en 1992.
De la mise en œuvre de ces aménagement qui ont négligé la dimension sociale et écologique, sont nés
de sérieux conflits sociaux avec l’amplification du poids des droits d’usage compromettant ainsi, le
devenir de la forêt au Maghreb par l’absence de régénération naturelle, l’accentuation du parcours et
les ébranchages des peuplements.
Tenant compte des principaux problèmes identifiés dans ces zones à savoir: la faiblesse des revenus en
milieu rural, la dégradation des ressources naturelles, l’isolement et le manque d’accès à l’information,
et l’insuffisance des infrastructures de base, la mise en œuvre de l’approche classique d’aménagement
demeure contraignante.
Face à l’échec de l’approche classique et des résultats modestes obtenus et compte tenu de l’évolution
de la question forestière depuis le sommet de Rio (1992) par l’adoption par la commission des nations
unies pour l’environnement et le développement (CNUED) des principes forestiers non contraignants,
la tendance actuelle privilégie l’approche d’aménagement concerté qui accorde une attention
particulière aux concepts de partenariat et de la participation.
5. L’AMENAGEMENT CONCERTE
L’aménagement concerté repose sur l’association des usagers à l’ensemble des étapes de l’étude:
conception, identification des unités socio-territoriales, négociation, planification, dimensionnement,
réalisation, gestion, suivi et évaluation des actions.
L’approche est basée sur la recherche d’un aménagement concerté et pluri-objectifs par massif
forestier qui tient compte des objectifs de préservation des formations naturelles et de conservation de
la biodiversité, des besoins des populations riveraines et des objectifs de développement socio-
économique en périphérie de ces massifs.
Il s’agit d’identifier les vocations des différents espaces forestiers et les formes de gestion les plus
appropriées pour préserver et valoriser les ressources de façon durable au bénéfice commun des
populations riveraines et de l’intérêt collectif.
- La définition des unités socio-territoriales qui serviront de base pour l’aménagement et la gestion des
ressources (commissions locales des forêts et comités massif),
- L’identification des usagers et des usages pratiquées, ainsi que leur impact sur les ressources naturelles
disponibles.
- La définition des différentes vocations forestières, agricoles, et pastorales...etc., pratiquées à l’échelle des
terroirs de la zone d’étude.
- La définition consensuelle des objectifs d’aménagement et des programmes d’action proposés pour chaque
terroir avec respect du schéma d’aménagement du territoire au niveau régional.
Par ailleurs, le schéma d’aménagement concerté est élaboré selon les étapes suivantes:
L’analyse de la situation actuelle de l’espace forestier et péri-forestier permet, à travers les contraintes
et potentialités relevées, d’établir des cartes de vocations des espaces qui intègrent la typologie des
peuplements, les faciès pastoraux, les données éco-physiographiques du milieu et l’aptitude des terres
et l’utilisation actuelle des sols.
Ces cartes de vocation indiquent l’affectation optimale qui peut être assignée à chaque espace afin
qu’il puisse assurer une fonction économiquement viable, socialement acceptable et écologiquement
faisable.
Sur la base de la carte des vocations des espaces forestiers, des entretiens et des réunions d’animation
sont tenus avec les différents acteurs locaux. Ces discussions portent sur les besoins des populations
riveraines (bois-énergie, parcours, apiculture autres.....) et les différentes façons de les satisfaire pour
être en conformité avec la vocation de l’espace.
Le diagnostic participatif est basé sur le principe de concertation avec les deux types de structures à
mettre en place:
Les commissions locales des forêts (CLF): elles regroupent des représentants des communautés utilisant
un même espace forestier et agricole (terroir). C’est une instance de concertation et de résolution des
problèmes plus ciblés dans l’espace et constituent des relais locaux plus proches des douars que le
comité massif.
Le comité de massif: est constitué, en plus des représentants des CLF, des représentants des différents
acteurs concernés par le développement local. C’est une instance de concertation et de coordination
pour l’organisation de l’exercice des droits d’usage au niveau d’un massif forestier. Également, ce
comité participe à l’élaboration et à la mise en œuvre du plan d’aménagement concerté et à la
sensibilisation des populations et des communes concernées à la nécessité d’une approche globale
d’aménagement des zones forestières et péri-forestières.
5.2.3. Plans de développement: Propositions d’aménagement et plan de gestion
Les directives d’aménagement de l’espace forestier et péri-forestier sont élaborés Sur la base du
diagnostic de la situation actuelle et de la concertation avec les commissions locales des forêts. Par
ailleurs, le plan de gestion traduit les directives en actions programmées dans le temps et dans
l’espace. La programmation est faite sur la base de «paquets d’actions» identifiés à partir du diagnostic
participatif dans un cadre cohérent qui prend en compte les zones forestières et péri-forestières. Les
actions rurales sont négociées dans le souci de faire aboutir les programmes de reforestation, de
sylviculture et de préservation de la biodiversité.
L’aménagement concerté a été initié depuis 1998 dans une région forestière au Nord du Maroc, soit la
région du Rif connue par son relief accidenté, son agressivité pluviométrique (1200 à 2000 mm/an),
l’ampleur des phénomènes d’érosion et particulièrement par la forte densité des populations avec plus
de 100 habitants/km². Les écosystèmes forestiers du Rif sont soumis à de multiples contraintes d’ordre
socio-économique et juridique qui pèsent lourdement sur la gestion des ressources naturelles. Les deux
principales causes de dégradation directe du capital forestier dans cette région sont le défrichement
pour la mise en culture et la coupe de bois de chauffage et de feu avec une moyenne de 12
tonnes/ménage/an, qui contribuent pour près de 90 % au processus de déforestation.
L’évaluation préliminaire de cette expérience d’aménagement concerté, fait ressortir les principaux
résultats suivants:
La mise en place d’une quarantaine d’associations de développement local pour la gestion des
infrastructures collectives;
L’organisation des femmes rurales autour d’activités génératrices de revenus: artisanat, couture,
apiculture, huilerie collective et sériciculture....
la subvention des fours collectifs développés localement dont la gestion est assurée par des
groupements féminins au niveau de la communauté villageoise.
Ces mesures sociales ont permis l’allègement de la pénibilité de la femme rurale en la libérant de ses
charges quotidiennes notamment, le ramassage et le colportage du bois de feu, lui permettant de
profiter des programmes d’alphabétisation avec l’appui des ONG locales;
La mise en place des infrastructures rurales: pistes (120 km), adduction d’eau potable au profit de 875
ménages;
La construction de salles de cours et de centres de santé;
La construction de centre d’approvisionnement en butane.
Ces actions ont permis le désenclavement des communautés rurales en améliorant les possibilités
d’accès aux services sociaux et à l’information, d’acquisition d’intrants et de commercialisation des
productions locales.
L’affectation des ressources doit correspondre à une programmation flexible des activités;
La nécessité de l’intégration des actions de développement et de gestion des ressources naturelles par
zone homogène en vue de favoriser une synergie entre les différentes composantes du projet et
l’émergence de pôles de développement (forêt, élevage, irrigation, arboriculture fruitière...).
La concentration des actions dans le temps et dans l’espace, de manière à assurer un impact direct et
rapide sur les conditions de vie des populations.
6. CONCLUSION
Fort des expériences et des leçons tirées sur un siècle de gestion forestière et en s'inspirant des
recommandations de la CNUED (Rio 1992) et du PAF-Méditerranéen, les pays du Maghreb ont pris
conscience de la dimension sociale et de la nécessité de lutte contre la pauvreté rurale dans
l’élaboration des stratégies à moyen et à long terme de développement durable des zones forestières et
péri-forestières.
Dans cette logique, la stratégie forestière maghrébine doit s’appuyer, désormais, sur la politique
nationale d’aménagement du territoire et doit répondre aux besoins prioritaires des populations des
zones forestières et péri-forestières. Ainsi, le modèle d’aménagement concerté doit être entrepris et
suivi en partenariat avec les principaux groupes d’intérêt dans le cadre d’une politique de
développement rural intégré.
Conditions d'accés : Sélection parmi les étudiants de l’IAV et de l’ENAM ayant réussi les 2 années de la filière
agronomique + tests sportifs et psychotechniques qui se déroulent à l’école.
Matières principales : Écosystèmes naturels et pastoraux, télédétection, aménagement des aires protégées,
productivité forestière, aménagement récréatif, génétique des peuplements forestiers, sylviculture appliquée,
développement rural.
Débouchés : Les lauréats de l'ENFI sont recrutés par le Haut Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte
Contre la Désertification.
Stage : Stage de formation au niveau des triages et des sous centres de développement forestier pour les
étudiants de la 3ème année Stage de formation au niveau des services forestiers et des centres de
développement forestier pour les étudiants de la 4ème année.
Aménagement Des Forêts
Le développement forestier est un pôle d’une grande importance au sein du Haut Commissariat aux
Eaux et Forêts et à la Lutte Contre la Désertification. N’a-t-on pas dit que le meilleur moyen de
préserver une ressource naturelle est de la développer?
Mais pour développer il faut connaître le capital et son état actuel, choisir les options de
développement en fonction des possibilités de production et des contraintes, planifier dans le
temps et dans l’espace, coordonner et associer tous les acteurs au développement de l'économie
forestière.
Dans ce processus, les études d’aménagement des forêts constituent le point de départ. Outil
incontournable pour une gestion durable des espaces forestiers, ces études permettent d’élaborer,
sur des bases scientifiques, les actions à entreprendre en matière de reboisement, de régénération
et d’amélioration sylvopastorale et de reconstitution des massifs forestiers, de sylviculture et
d’exploitation forestière ainsi que les équipements et les infrastructures nécessaires.
Pour la mise en œuvre de toutes ces actions, il est fait appel à une multitude de profils et de
métiers ainsi qu’a des approches de gestion qui n’ont cessé d’évoluer au fil des temps. L’approche
participative et partenariale occupe actuellement une place prépondérante dans la stratégie du
HCEFLCD pour l’association et l’implication des acteurs dans la préservation et le développement
des espaces forestiers (populations riveraines, secteur privé, société civile, ONG…).
Concept
Définition
L'étude d'aménagement forestier repose sur un processus d'analyses permettant de connaître la
richesse et les potentialités des milieux naturels et également de préciser les besoins socio-
économiques présents et futurs. L'ensemble de ces analyses permet de guider le choix des
objectifs qui vont être retenus pour la forêt.
En définitive, l’aménagement forestier qui constitue l’outil de planification et de gestion forestière à
long terme, repose sur un ensemble d’analyses forestières et socio-économiques pour conclure sur
les actions à entreprendre à l’échelle d’un massif forestier durant une période d’aménagement
allant de 20 à 30 ans (régénération, reboisement, exploitation, équipement et encadrement…).
Objectifs
- d'ordre économique: permettre une exploitation durable des produits forestiers ligneux et non
ligneux;
- d'ordre social: prendre en considération les droits d’usages reconnus aux populations riveraines.
Le répertoire des forêts aménagées montre que plus de 2,2 millions d’hectares de forêts naturelles
et 366.000 hectares de périmètres de reboisement (forêts artificielles) sont aménagés et disposent
d’outils techniques pour une gestion durable. La superficie aménagée par essence est donnée
comme suit :
Cèdre 136.402 ha
Chêne-liège 212.267 ha
Thuya 322.767 ha
Arganier 59.303 ha
Chêne vert 816.116 ha
Pin et genévrier 150.876 ha
Matorrals 520.688 ha