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Université Catholique du Congo

Faculté d’Economie et Développement

Master 2, Economie, Commerce &


Coopération Internationale 2021-2022

COURS DE DIPLOMATIE ET RELATIONS INTERNATIONALES

Prof Dr PHAMBU ROMAIN


MASANGA TEDIKA
1

Université Catholique du Congo


Faculté d’Economie et Développement

Cours de Diplomatie et Relations Internationales

Prof Dr Phambu Romain Masanga Tedika


Année Académique 2021-2022
2

COURS DE DIPLOMATIE ET RELATIONS INTERNATIONALES

PLAN DU COURS

INTRODUCTION DU COURS

OBJECTIFS DU COURS

CONTENU DU COURS

CHAPITRE I : LES VECTEURS DE LA DIPLOMATIE

1.1. La Relation Bilatérale


1.2. La diplomatie Multilatérale
1.3. La paradiplomatie
1.4. La diplomatie de Club et de Groupes
1.5. La diplomatie publique et digitale
1.6. De la Négociation à la Médiation
1.7. Rituels et diplomatie

CHAPITRE II : LES ACTEURS DE LA DIPLOMATIE

2.1. Les Etats et leur outil diplomatique


2.2. Les Organisations intergournementales
2.3. Les diplomaties supra- étatiques
2.4. Les diplomaties sub-étatiques

CHAPITRE III : LA DIPLMOMATIE ECONOMIQUE


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0.1. INTRODUCTION DU COURS

Etendue du concept Diplomatie

Dans le champ des relations internationales, les études diplomatiques font l’objet d’un
regain d’intérêt récent, tant académique que pratique. L’élargissement de la scène
diplomatique aux acteurs sociétaux mais aussi aux puissances émergentes ne peut
constituer le seul facteur explicatif. D’autres paramètres doivent être pris en considération,
entre autres :
▪ La diversification des répértoires d’action dans un environnement marqué par les
préocccupations liées à l’image et à la réputation (branding) favorise l’essor
diplomatique ;
▪ La résonance de cette diplomatie avec les dispositifs de lutte contre le terrorisme ;
La pression de la contrainte budgétaire oblige à redéfinir les conditions de l’action
diplomatique ;
▪ L’essor des technologies de l’information et de la communication associé à la
sophistication des moyens de navigation numérique interroge le travail
diplomatique ;
▪ La prise en compte des émotions et des affects afin de rendre intelligible l’activité
diplomatique ; le développement des organisations intergouvernementales,
notamment régionales, entraîne la formation de nouveaux espaces diplomatiques,
ceux de la coopération inter-organisationnelle et de l’inter-régionalisme.

Tous les secteurs d’intervention diplomatique (de la sécurité au commerce en passant apr
la finance, la culture ou l’environnement) sont influencés par ces recompositions et cela
semble créer une impasse pour la compréhension de ce secteur aussi envahi mais dont on
arrive aps définir assez clairement les contours.

Comment sortir de cette impasse ? Peut-être en recourant à l’étymologie du concept de


« diplomatie » D’une manière générale, le concept de diplomatie est employé de manière
ouverte, par transposition des pratiques à un terme qui n’existait pas dans son usage
actuel. Il paraît donc scientofiquement périlleux de s’engager dans une rflexion sur les
contours disctinctifs de la diplomatie , en tant que concept.

Mais alors, qu’est-ce que la diplomatie ?

Le terme « diplomatie est d’origine grecque et à double usage. D’une part, en tant que
verbe - diploo-, il renvoyait à un double pliage et, d’autre part, en tant que nom -diploma-
,il désignait, tout au long du Moyen Age, des documents officiels pliés d’une manière
singulière et qui conférait à leur porteur des droits et des privilèges. A la Renaissance, les
diplomas sont associés à des actes du Pape.
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En particulier, un diploma est une lettre de nimonation papale. Ces lettres sont écrites par
un clerc que l’on appelle un diplomatarius. L’ensemble des méthodes nécessaires à la
vérification de l’authenicité de ces documents sera identifié, dès la fin du XVIIè siècle, sous
le vocable diplomatica. C’est d’ailleurs dans ce sens que le mot fait irruption pour la
première fois dans le Dictionnaire de l’Académie française de 1762.

Durant la même période, on assiste de manière concomitante à une extension du terme


diploma. Non seulement il continue de renvoyer à des documents attribuant des
privilèges à certains individus,mais le terme diploma en vient progressivement à désigner
également, par une série d’associations peu commodes à démêler, la collection de
documents officiels et de traités conclus entre différents souverains.
Ainsi, parce qu’il s’inscrit dans le contexte des traités entre entités souveraines, l’adjectif
dérivé de diploma, diplomatique, sera associé aux activités des envoyés d’un souverain
auprès d’une autre cour. D’où le lien entre activité diplomatique d’une part, paix, guerre
et alliance, d’autre part.

Une évolution formellement similaire à celle expérimentée par le terme diploma s’est
emparée de la notion de corps diplomatique. Si, au XVIIè siècle, le corps diplomatique est
analogue au corps du droit des gens, dès le milieu du XVIIIè siècle, il commence à désigner
l’ensemble des ministres accrédités auprès d’une cour.

En fin, le terme « diplomatie » fait son entrée dans l’édition de 1798 du Dictionnaire de
l’Académie Française est signifie « Sciences des rapports, des intérêts de Puissance à
puissances » Dans le dictionnaire Webster de 1817, la diplomatie est abordée de manière
large, puisqu’elle couvre désormais « les coutumes et le règles des ministères publics, les
formes de négociation ; le corps des ambassadeurs et des envoyés ». A peu de choses près,
la défintion de la diplomatie telle qu’elle nous est parvenue. En somme, outre les
variations conceptuelles rythmées par les soubresauts de l’étymologie, on peut souligner
que la diplomatie s’inscrit dans un domaine pratique distinct : celui de la guerre, de la
paix et des alliances. En d’autres termes, celui de la politique.

A cet égard, tout ce que l’on qualifie exagérément de nouvelles « diplomaties »


(humanitaire, culturelles ou autres) sert d’abord ces objectifs premiers de la diplomatie.
Qu’en est-il alors de son rapport à la politique étrangère ? Certaines ambiguités n’offrent
aucun secours à qui voudrait les différencier. En réalité, diplomatie et poltique étrangère
évoluent à des niveaux distincts mais complémentaires. La politique étrangère se situe à
un niveau méta. Elle formule les objectifs que la diplomatie exécute.
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Certes, la diplomatie est de l’ordre des moyens et des instruments. Mais, elle participe
aussi de la forme que prennent les interactions. Un mauvais ambassadeur peut faire
dérailler des années de relations sereines. Ainsi, la diplomatie concerne l’ensemble des
instruments et des pratiques à travers lesquels les acteurs, pas seulement les Etats,
entretiennent, coordonnent et réalisent leurs identités, intérêts et valeurs.

0.2. OBJECTIFS DU COURS

Pour des étudiants pouvant être appelés à jouer un rôle de premier plan dans le
Commerce extérieur de la RDC, l’importance d’un tel enseignement n’est pas à
démontrer. En effet, les échanges commerciaux constituent un centre d’intérêt
hautement stratégique dans le fonctionnement des relations économiques
internationales, la connaissance des contours de la pratique diplomatique est un préalable
devant leur permettre de se tirer d’affaire lorsque leur expertise sera mise à l’épreuve. Plus
qu’un simple élargissement des connaissances en matière diplomatique, ce cours se
donne l’ambition de renforcer capacités professionnelles des étudiants en Economie,
Coopération et Commerce international, dans le but de les rendre très compétitif plus tard
sur le marché de l’emploi. Au terme de cet enseignement, les étudiants devraient se dire
outiller d’un véritable vade-mecum indispensable à la gestion de leur carrière
professionnelle, quel que soit le secteur dans lequel ils seront appelés à s’exprimer

0.3. CONTENU DU COURS

Ce cours est organisé en trois chapitres.Le premier examine à la fois les environnements
au sein desquels se pense et se construit la diplomatie et les différentes configurations
qu’elle peut revêtir, du bilatéralisme ou multilatéralisme en passant par des nuances
intermédiaires possibles ( diplomatie de clubs et de groupes, para-diplomatie, etc.).
De plus, il étudie les supports de la diplomatie, depuis les plus classiques ( la négociation,
les rituels et protocoles) jusqu’aux nouvelles technologies de l’information et de la
communication. Le deuxième chapitre porte sur les acteurs de la diplomatie. Il couvre non
seulement les Etats, mais aussi les acteusr sub et supra-étatiques. Il confirme la double
pression des entités sub-nationales et des organisations internationales et non
gouvernementales qui transforme radicalement la tâche des diplomates étatiques. Enfin
le troisième chapitre examine différents secteurs diplomatiques.L’objectif n’est pas de
faire un inventiare de toutes les incarnations du phénémène diplomatique, mais de de
montrer que la diplomatie change de nature en fonctiondes secteurs. Ainsi, nous
aborderons la diplomatie économie, la diplomatie humanitaire et la diplomatie de
défense.
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Pour préparer ce cours, nous nous sommes largement inspiré des ouvrages de :
▪ BALZACQ Thierry, CHARILLON Frédéric et RAMEL Frédéric, Manuel de
Diplomatie, Presses de Sciences Po, Paris, 2018, 397p (achevé d’imprimer Avril
2019) ;
▪ Guy CARRON DE LA CARRIERE : La diploamtie économique, Le diplomate et le
Marché, Editions Economica, Paris, 1998, 224p
▪ MUCCHIELLI Jean-Louis, Relations Economiques Internationales, 4è édition,
Hachette Supérieur, Paris,2005, 159p
▪ RAINELLI Michel, Le Commerce International,onzième édition, Collection
Repères, Edition La Découverte, Paris 2015, 121p
▪ PLANTEY Alain et LORIOT François, Fonction Publique Internationale,
Organisations Mondiales et Européennes, Nouvelle édition mise à jour et
augmentée, Editions CNRS, Paris 2005, 497p ;
▪ NATIONS UNIES, Bureau de déontologie, Mettre l’éthique en pratique, Guide à
l’intention des fonctionnaires de l’O.N.U., Bureau de al gestion des ressources
Humaines de l’O.N.U., New York, Avril 2017, disponible sur le site web :
www.un.org/en/ethics/pdf/Roadmap_FR_Web.pdf
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CHAPITRE I : LES VECTEURS DE LA DIPLOMATIE

1.1. La Centralité de la Relation Bilatérale

La centralité de la relation bilatérale dans la diplomatie peut être abordée sur les plans
historique, stratégique et numérique :
▪ Sur le plan historique : la conduite des realtions diplomatiques entre deux
Etats par le biais de missions officielles commence au XVIIè siècle entre les
monarchies européennes et équivaut à ce que l’on qualifie de « diplomatie
traditionnelle » ou de « vielille diplomatie » Cette diplomatie qui émane du
traité de Westphalie en 1648, était caractérisée par le rôle central des
ambassades, un fort degré de secret dans les négciations, et les tissages de liens
par les mariages entre les grandes familles gouvernantes, qui accompagnaient
les rapprochemnts poltiques.
▪ Sur le plan stratégique : cette relation permet de promouvoir l’intérêt
national et structure les négociations internationales. En effet, la diplomatie
bilatérale, par le biais des ministères des Affaires étrangères, ambassades et
consulats reste en effet le meilleur outil pour porsuivre les intérêts d’un Etat,
que ce soit par le commerce et les investissements, la promotion de l’image et
de la culture d’un pays ou pour communiquer avec les diasporas. Par ailleurs,
la relation bilatérale est une étape importante pour aborder les négociations
internationales, puisque les intérêts communs se construisent d’abord au
niveau bilatéral, afin de pouvoir constituer des coalitions et mettre en avant
ces intérêts plus effiacecement dans les négociations multilatérales. Tout l’enjeu
des relations bilatérales est alors de parvenir à poursuivre l’interaction des
intérêts des Etats par la coopération, sans toutefois porter atteinte à leur
souveraineté et à leur liberté d’action reciproques.
▪ Sur le plan numérique : les relations bilatérales restent à ce jour l’échelon
privilegié des Accords conclus internationalement. L’ONU a recesné plus de
5000 traités bilatéraux signés entre 1990 et 1999.

Conduite des relations bilatérales

Les missions diplomatiques et les traités internationaux sont les fondements


institutionnels des relations bilatérales. Les Etats sont en effet dans une situation
de « relation diplomatique » dès lors qu’ils peuvent communiquer entre eux de
manière permanente et sans obstacles.
Le maintien de ces relations diplomatiques dépend d’un accord entre lesdits Etats.
Au-delà de la simple capacité de communication, la plupart des relations bilatérales
sont davantage structurées autour des relations entre chefs d’Etat et/ou de
Gouvernement, des ambassades, des acteurs privés et des relations entre sociétés
civiles.
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I. Les relations entre Chefs d’Etat et de Gouvernement

✓ Les Visites officielles rythment les relations bilatérales. Elles peuvent


impliquer les ministres des Affaires Etrangères et éventuellement des
ministres techniques tels que la Défense et l’economie , ou autre.
✓ Les visites d’Etat implique le Chef d’Etat et constitue le plus haut niveau
de contact diplomatique entre deux Etats. Elles sont accompagnées d’un
ensemble de cérémonies et durent généralement plus d’une journée. En
dessous des visites d’Etat se situent les visistes officielles (ou visites de
travail) qui peuvent impliquer le Chef de l’Etat ou de Gouvernement.
✓ Les Sommets bilatéraux : impliquent également les Chefs d’Etat et de
Gouvernement et ont la particularité de se tenir de façon regulière, selon une
périodicité établie par les partenaires impliqués. Outre les pays voisins et/ou
alliés, il existe de nombreux cercles de partenariat donnat lieu à des rendez-
vous au Sommet, tels que les partenariats globaux, partenariats stratégiques
et dialogues politiques de sécurité entretenus par un Etat avec des régions
particulières.
✓ Sommets et Visites remplissent des fonctions variées. Par exemple, ils
permettent d’envoyer des signaux diplomatiques quant à l’importance de la
relation bilatérale en question, de consolider la relation, de faire avancer les
dossiers qui ne peuvent pas ou plus être traités au niveau des ambassades
et de signer des déclarations et/ou accords contraignants ( traités ou accords
intergouvernementaux concernanat le commerce, al coopération technique,
etc.)
Du fait du rôle structurant de ces rencontres pour les relations bilatérales,plus que
n’importe quel autre type de relation internationale, on insiste sur sur l’identité et
le rôle des Chefs d’Etat et de Gouvernement, et sur la qualité de leurs relations
interpersonnelles. Celles-ci sont considérées comme affectant directement la teneur
des rapports bilatéraux et les avancées possibles en termes de coopération ou de
reglèment des contentieux.

II. La préeminence du rôle des ambassades :

Si l’identité des Chefs d’Etat et de Gouvernement pèse dans la balance pour


marquer les grandes étapes d’une relation bilatérale, le fonctionnement au
quatidien, routinier de celle-ci- et, de fait, la préparation même de ces « grands
rendrez-vous »- résulte du travail des diplomates et de l’ambassade.
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Pour mener ce travail, les ambassades sont organisées en différents services, par
secteur d’activité. Ceux-ci sont placés sous la tutelle du Ministère des Affaires
Etrangères ou de ministères dits techniques comme Le Commerce, Finances,
Transport, Défense, etc. Ces services ont pour rôle de mettre en œuvre des
politiques décidées au niveau national.
Cependant, des rapprochement privilégiés dans les domaines précis de politiques
publiques, résultant des échanges techniques, peuvent également à leur tour
permettre d’identifier des nouvelles pistes de coopération entre pays concernés.

✓ Historiquement, le premier domaine d’action des ambassades a été


l’économie et le commerce.

Dès le XVIè siècle, le Consul avait pour mission-outre de protéger les ressortissants
de son pays à l’étranger- de « fournir des informations sur tout ce qui pouvait faciliter
ou entraver le commerce » avec son pays de résidence (Kessler,2012). A la fin du XIX
è siècle, le volet économique est ensuite revenu à l’ambassadeur. Il devient alors
responsable de la négociation des traités bilatéraux qui se multiplient dans les
domaines commercial et économique.

Les années 1970 ont ensuite connu, sur le plan national, la libéralisation de
l’économie et du commerce et sur le plan international, la mise en place de régimes
internationaux pour réguler le commerce a limité le champ d’action des Etats, pour
qui les seuls accords économiques encore négociables bilatéralement concernent les
régimes politiques sans économie de marché, ou très fragiles.

En outre, aujourd’hui, les entreprises multinationales mènent leur propre


« diplomatie », qui échappe bien souvent au contrôle politique national. Les
realations bilatérales entre Etats au travers les ambassades ont donc perdu leur
centralité dans le domaine économique.

✓ Le deuxième champ d’action des ambassades concerne la


coopération politico-militaire et les services secrets .

Outre les échanges économiques, la collecte d’informations (par exemple sur la


sitauation politique ou sécuritaire locale) a toujours constitué l’une des missions
principales des ambassades.
Or, internet et les médias en continu fournissent à présent une bonne partie des
informations qui étaient traditionnellement transmises par les ambassades vers
l’Etat qu’elles représentent.
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Cette fonction des missions diplomatiques n’est toutefois pas devenue obsolète :
des agenst des services de renseignement opèrent dans toutes les ambassades,
qu’ils soient identifiés comme tels ou agissant en incognito, sous une couverture de
« conseiller culturel » ou « attaché humanitaire » par exemple.
En outre, s’il y a aujourd’hui plus d’information aisément disponible, il y a
également plus de coopération entre Etats, et le rôle des missions militaires est
notamment de favoriser la coopération internationale sur les questions de éscurité
et de Défense.
En fonction du degré d’approfondissement de la relation, l’attaché militaire ou
attaché de défense peut être accompagné d’une équipe composée de représentants
de chaque armée ainsi que des agences chargées de l’acquisition des armes.

✓ Les ambassades jouent enfin un rôle important dans les relations, la


promotion culturelle et la coopération universitaire.

Cela peut passer par la mise en place d’instituts nationaux offrant accès à des
activités culturelles, à des cours de langues ou bourses d’études. Dans ce domaine,
l’action est menée généralement avec les acteurs de al Société Civile.

III. Les autres acteurs de la diplomatie bilatérale

Les canaux diplomatiques ont traditionnellement trois fonctions principales :


représenter, informer, négocier et coopérer. Hormis la représentation officielle, les
ambassades n’ont, aujourd’hui plus le monopole de ces activités.
Au -delà des diplomates, les acteurs des realations bilatérales incluent
d’autres acteurs politiques, comme les parlements et les partis politiques,
les acteurs privés (entreprises) et la société civile.
Parmi les acteurs politiques, les parlements et les partis politiques entretiennent des
relations bilatérales avec des pays alliés, voisins et/ou membres des mêmes
organisations internationales (Internationale libérale, internationale socialiste,
internationale chrétienne).
✓ Il existe par exemple des « Groupes d’amitié » parlementaires avec à peu
près tous les pays du monde, pourvu qu’ils disposent d’un Parlement.
L’objectfif de ces groupes interparlementaires est de tisser des liens avec les
autres parlementaires amis également de contribuer au rayonnement
national et d’influencer, dans la mesure du possible, les politiques menées
par les autres Etats.
✓ Outre les groupes d’amitié, il existe également des Groupes de travail
interparlementaires à vocation plus spécifique comme le « groupe de
travail parlementaire franco-britannique sur la coopération de défense ».
Les Commissions nationales spécialisées ( par exemple : « Finance »,
« Affaires sociales », « Défense ») organisent également des visites chez
leurs équivalents à des fins d’information.
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Les parlementaires nationaux sont donc également alliés aux diplomates


dans la défense des intérêts de leur pays, ce qui passe par des actions de
lobbying auprès de leurs homologues, en vue de peser sur les décisions
politiques du pays partenaire.

✓ En ce qui concerne les acteurs privés, en dehors de cas spéciaux, les


entreprises ont gagné en autonomie dans tous les secteurs, et même les
petites et moyennes entreprises sont amenées à produire à l’étranger ou à
exporter, ce qui leur donne un poids croissant dans les relations bilatérales,
et dans toutes les régions du monde.
Les Etats peuvent soutenir ces entreprises, par le biais de leurs chambres de
commerce qui fournissent une expertise, des ressources et des réseaux aux
entreprises désireuses d’exporter.
Les visites officielles peuvent également être l’occasion de faciliter l’accès au
marché étranger, notamment par le transport groupé d’une délégation de
Chefs d’entreprise. A leur tour les entreprises sont amenées à faire du
lobbying auprès des gouvernements et parlements étrangers, dans le but
d’obtenir des contrats ou d’influencer en vue d’une législation favorable
(régulations, normes). Cela passe par des actions de marketing et de
communication, un soutien des think tanks ou fondations, l’élaboration de
coalitions avec les acteusr de l’Etat cible (acteurs politiques, entreprises,
experts), l’entretien d’un réseau interpersonnel, etc.

✓ Pour ce qui est de la Société Civile, il s’agit plus du rôle important et


spécifique des Diasporas dans les relations entre deux Etats. Ce rôle est
généralement centré sur la mobilisation de la diaspora aux fins d’encourager
une politique favorable du pays d’immigration envers le pays d’origine, à
travers des actions de lobbying. En d’autres termes, les diasporas peuvent
utiliser les mêmes moyens de pression que ceux dont disposent les autres
acteurs non étatiques pour peser sur les relations bilatérales (plaidoyers,
levées de fonds, mobilisation de réseaux). Outre les diasporas, les groupes
ethniques et communautés religieuses et linguistiques peuvent entretenir
des relations dans les régions transfrontalières.
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✓ En défintive, on constate que les relations bilatérales sont le résultat


d’interactions entre de multiples acteurs acteurs, étatiques ou non, pouvant
couvrir une variété de domaines des politiques publiques. Lorsque l’on
étudie une relation bilatérale, il convient d’éviter, à tout prix, de se limiter
aux seuls échanges diplomatiques.
En effet, les relations commerciales, les relations financières, les images que
se font les deux peuples l’un de l’autre, les échanges culturels et intellectuels
compris au sens large et même les problèmes de de migration doivent être
pris en compte.
En outre on constate qu’il existe des interactions très fortes entre les
représentants officiels, les autres acteurs politiques, les acteurs privés, les
sociétés civiles. Il y a parfois une réelle imbrication entre les acteurs qui
peuvent, sur des sujets précis, se constituer en réseau, en coalition, pour
défendre des intérêts et des idées au plan international ou, à l’inverse, se
trouver en tension (relations bilatérales privilégiées et relation bilatérales
conflictuelles).

1.2. La diplomatie Multilatérale

A. Historicité de la diplomatie multilatérale

- A peu près aussi ancienne que la diplomatie des Etats, la diplomatie


multilatérale aborde aujourd’hui tous les enjeux internationaux : guerre et paix,
droits humains, commerce,environnement, etc. Au sens strict, la diplomatie
multilatérale met en relation un minimum de trois Etats. En pratique, elle
rassemble couramment des dizaines d’Etats (représentés par leurs diplomates
et leurs délégations) et un nombre croissant d’acteurs non étatiques.

- La diplomatie multilatérale a longtemps été organisée sous forme de


conférences ad hoc. Depuis la création de la Société des Nations (SDN) puis de
l’Orgnaisation des Nations Unies (ONU), elle s’incarne aussi beaucoup dans les
organisations internationales. Protéiforme et évolutive, elle demeure pourtant
trop souvent délaissé par les études de relations internationales, malgré son
ancienneté et son omniprésence sur la scène internationale.

- L’histoire de la diplomatie multilatérale, depuis ses origines, est ponctuée


par des regléments des conflits bien à portée bien souvent universelle.
D’emblée, cette diplomatie étatique naissante est confrontée à un exercice très
multilatéral lors du règlement de la guerre de Trente Ans (1616-1648), qui
a provoqué un vaste affrontement de puissances et dévasté l’Europe
continentale. De ce fait, ce sont 194 délégations, représentant aussi bien les villes
libres du saint-Empire romain germanique que les grandes monarchies
d’Europe, qui négocient les traités de Westphalie (1648).
13

- Aux XVII è et XVIIIè siècles, les querelles dynastiques et les convoitises


territoriales de la France de Louis XIV notamment continuent de
déclencher des guerres incessantes. La diplomatie est alors régulièrement
mobilisée pour inscrire dans les traités les conséquences territoriales de ces
guerres. Cette pratique diplomatique prend la forme de vastes congrès : 80
délégations participent, par exemple, au Congrès d’Utrecht (1712-1713), qui
vise à régler la guerre de succession d’Espagne.

- Un siècle plus tard, le Congrès de Vienne (1814-1815), qui clôt les guerres
napoléoniennes, réunit plus de 200 chefs de missions diplomatiques affluant de
toute l’Europe. Ce Congrès redessine la carte de l’Europe ( la France, en
particulier, est ramenée à ses frontières de 1789) et institue la solidarité entre les
monarchies d’Europe autour du principe dynastique qui avait été malmené par
la Révolution et par l’Empire napoléonien.

- La diplomatie multilatérale à l’œuvre au Congrès de Vienne est toutefois


dominée par les quatre grandes puissances victorieuses de Napoléon
(Angleterre, Prusse, Autriche-Hongrie, Russie).L’esprit du Congrès de
Vienne se prolonge ensuite dans le « Concert Européen »- alliance entre
ces quatre puissances à laquelle la France de la Restauration est conviée- qui
donnera lieu à des rencontres régulières, notamment au niveau des
ambassadeurs.

- Ce Concert européen s’éffrite dans la seconde partie du XIXé siècle avec le


retour des guerresen Europe (Crimée en 1854-1855, guerre de l’unité italienne
en 1870, guerre franco-allemnade en 1870) et s’éffondre définitivement avec la
constitution des allainces antagonistes (« Triplice » contre « Triple-Entente »)
qui conduisent la première guerre mondiale.

- Entretemps, la diplomatie européenne tend à s’ouvrir au reste du monde avec


les Conférences de Paix de la Haye (1899 et 1907), la seconde conférence
mobilisant notamment 44 Etats sur 57 Etats souverains à l’époque. La
diplomatie multilatérale reprend ses droits à la fin de la première guerre
mondiale avec la négociation du Traité De Versailles en 1919 :70 délégués
reprséentant 27 Etats y participent.

- Mais là encore, la négociation est dominée par les puissances victorieueses (


Angleterre, France, Italie, Eats-Unis), d’autant que les pays vaincus,
notamment l’Allemagne en sont exclus. La diplomatie multilatérale de
Versailles renoue avec la diplomatie de puissance malgré les nouveaux
principes de diplomatie « morale » affichés par le Président Wilson.
14

- Le Traité de Versailles aboutit néanmoins à la création de la SDN, première


Organisation de Sécurité Collective de l’histoire, qui compte jusqu’à 60
Etats membres au début des années 30. Affaiblie d’emblée par la défection des
Etats-Unis , le Sénat américain n’ayant pas ratifié lr Traité de Versailles,
la SDN révèle progressivement l’impuissance des démocraties européennes à
contre-carrer les coups de force des Etats autoritaires et totalitaires pendant les
années 1930.

- La SDN marque toutefois un moment important dans l’institutionnalisation


de la diplomatie multilatérale. Alors que la diplomatie des conférences , de
Westphalie à Versailles, était une diplomatie ad hoc, les Etats membres de la
SDN éngocient désormais dans les enceintes de celle-ci (Assemblée , Conseil) et
y détachent des diplomates résidant au siège de la SDN à Genève.

- La diplomatie multilatérale s’incarne ainsi dans une diplomatie qualifiée parfois


de « parlementaire », en tout cas institutionnalisée, dans le respect des règles
édictées par le Pacte de la SDN, notamment l’égalité entre memebres et la
règle de la décision à l’unanimité.

- La fin de la seconde guerre mondiale consolide l’institutionnalisation de la


diplomatie multilatérale avec la création de l’ONU, de la Banque Mondiale et
du Fonds Monétaire International (FMI) Les négociations qui prési toutefois à
la naissance de ces organisations est toujours aussi hégémonique.

- En effet, la Charte des Nations Unies, signée par les représentants de 50 Etats à
l’issue de la Conférence de San Francisco en juin 1945, a été rédigée pour
l’essentiel par les Etats-Unis pendant la guerre. « Déclaration des Nations
Unies » soumise à la signature des Etats en guerre contre les puissances de l’Axe
en janvier 1942), puis amendée lors des négociations étroites avec le Royaume-
Uni, la Russie et la Chine à la Conférence de Dumbarton Oaks à Georgetown,
Washington, DC (1944).

- L’histoire de la diplomatie multilatérale de 1815 à 1945 révèle ainsi deux


caractéristiques essentielles ; d’une part, les négociations sont surtout axées sur
les enjeux de guerre et de paix, d’autre part,elles restent largement dominées
par les grandes puissances.
15

Ce qui change en revanche au XXè siècle, c’est que la diplomatie multilatérale tend
à se mondialiser au-delà de l’Europe et que, par ailleurs, elle s’institutionnalise en
se déployant principalement dans les enceintes des grandes Organisations
Internationales.

Néanmois, la guerre froide porte un coup d’arrêt à l’expansion de la diplomatie


multilatérale, à l’ONU en particulier. Dans les années 1950, on assisté à la
polarisation de Assemblée Générale de l’ONU aveccdes Etats affiliés au « camp
occidental » et des Etats inféodés au « camp socialiste ».

Il faut donc attendre la fin de la guerre froide, symbolisée par la chute du mur de
Berlin dans la nuit du 9 au 10 novembre 1989, pour voir la diplomatie multilatérale
reprendre tous ses droits à l’ONU. Le Conseil de Sécurité, en particulier, réussit à
renouer avec les pratiques collégiales sur les enjeux de sécurité majeurs ( Annexion
du Koweit par l’Irak en 1990, par exemple).

Les organisations internationales créées en 1944-1945 constituent le socle


fondamentale de la diplomatie multilatérale contemporaine. L’ONU a vu
presque quadrupler le nombre d’Eats memebres entre 1945 (51) et aujpurd’hui
(193). La Banque Mondiale et le Fmi en réunissent presque autant (188).

Par ailleurs, depuis la fin de la guerre froide, la diplomatie multilatérale aborde de


plus en plus dans les grandes conférences mondiales des enjeux autres que
stratégiques : environnement, économie, aide au développement, droits humains,
etc.
Ainsi, la Conférence sur l’Environnement et le Développement des Nations Unies
organisée à Rio en 1992, où 178 Etats sont représentés, aboutit à l’adoption de la
Convention-cadre sur les changements climatiques.
A la même époque,plus de 120 Etats participent aux négociations du Cycle
d’Uruguay du General Agreement on Tariffs and Trade (GATT), vaste exercice de
diplomatie commerciale multilatérale, qui débouche en 1994 à Marrakech sur la
création de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC, qui rassemble 164 Etats
membres aujourd’hui).
Cette configuration de la diplomatie globale est désormais courante.
16

B. Adaptation des appareils diplomatiques des Etats au multilatéralisme

L’essor de la diplomatie multilatérale a conduit les Etats à se doter


progressivement-non sans réticences- de ressources administratives et humaines
dédiées aux organisations internationales. A partir de la création de la SDN en 1919,
les chancelleries diplomatiques procèdent à des ajustements et à des innovations
bureaucratiques afin de s’adapter à une configuration de représentation et de
négociation multipartite, permanente et de plus en plus institutionnalisée.
Les Ministères des Affaires Etrangères installent en premier lieu des services
dédiées aux organisations internationales.
Ces différents services visent à permettre aux Etats membres de tenter de
coordonner et d’harmoniser la politique extérieure élaborée par l’exécutif à
l’égard des Organisations internationales concernées( dans les systèmes
politiques fortement centralisés)., et des coopérer avec les instances
législatives (dans les régimes parlementaires).
Ces structures administratives ont également vocation à interagir avec d’autres
ministères considérés comme plus techniques (Santé, Education,Défense,
transport, etc .), voire à piloter certains supports administratifs nationaux
(dispositifs de coordination interministérielle, agences indépendantes, collectivités
territoriales, etc.)

En second lieu, les Etatts membres ont tour à tour mis en place des représentations
ou des missions permanentes auprès des Orgnaisations internationales (équivalent
multilatéral des ambassades bilatérales), afin d’y exercer les fonctions
diplomatiques traditionnelles de représentation, d’information et surtout de
négociation. Les missions permanentes jouent également un rôle central dans la
diplomatie de nombreux Etats dotés de ressources diplomatiques insuffisantes
pour être déployés à l’échelle de la planète et qui concentrent ainsi leurs efforts sur
les moyeux multilatéraux que constituent NEW YORK (où siègent notamment
l’ONU et le PNUD), WASHINGTON (Banque Mondiale et FMI), GENEVE (Bureau de
l’ONU, CICR, HCR, OIT, OMC, OMS), VIENNE (AIEA, Bureau de l’ONU, ONDUC, OPEP,
OSCE), BRUXELLES OTAN, Union Européenne), PARIS (OCDE, OIF, UNESCO) ou LA HAYE
(Cour Internationale de Justice, Cour Pénale Internationale, Tribunal du Droit de la
Mer). La quasi-totalité des Etats s’investit désormais dans la diplomatie
multilatérale, tant à l’échelle globale que régionale.

En troisième lieu, les Etats ont également dû accompagner l’essor de la Fonction


Publique Internationale, corollaire de cellui des Organisations internationales. Les
premières unions administratives mises en place durant la seconde moitié du XIXè
siècle ont eu recours à la mise à disposition des fonctionnaires nationaux détachés
par des ministères techniques compétents des principaux Etats membres.
17

Et enfin, de plus en plus d’acteurs non étatiques (ONG, Entreprises, Groupes


d’intérêt, Lobbies, etc.) contribuent à al diplomatie multilatérale des Eats en
participant de manière directe ou indirecte aux délégations officielles, aux
négaociations internationales, aux réunions en mant ou en vaval, à l’élaboration des
textes internationaux, ou en organisant des sommets parallèles aux garndes
Conférences internationales.

C. Omniprésence des négociations multilatérales dans les relations


internationales

- Cette situation résulte du fait que la diplomatie multilatérale repose sur une
pratique de négociation qui s’apparente à un processus de gestion de la
complexité, rendant les négociations multilatérales tès longues : il a fallu 8 ans
pour conclure le cycle d’Uruguay du GATT (1994), 8 années également pour un
Accord climatique post KYOTO (2015), 9 ans ans pour négocier la Convention
des Nations Unies sur le droit de la mer (1982), etc.
Une explication courante de la complexité des négociations multilatérales
consiste à mettre en avant le nombre d’Etats impliqués. Une autre explication
avancée est leur sensibilité, leur multidimensionnalité et leur technicité.

- Ce qui rend la diplomatie multilatérale contemporaine plus complexe


aujourd’hui tient donc compte à ce que l’esprit et les règles de celle-ci ont changé
par rapport aaux situations du passé où quelques puissances victorieuses
imposaient un Accord de Paix à tous les autres Etats en présence. De fait, le
multilatéralisme qui s’est développé après 1945 a ceci de praticulier que,
s’il réserve encore des droits particuliers (le siège permanent et le droit
de vto au Conseil de Sécurité aux cinq puissances victorieuses de 1945
par exemple), il véhicule des normes fondamentales comme l’égalité en droits
entre Etats souverains (égalité consacrée par le Charte de l’ONU en son article
2), l’inclusivité des Organisations internationales, la réciprocité, la
collégialitédes décisions prises, l’esprit de compromis.

- Par conséquent, l’exercice de la puissance coercitive ou de l’hégémonie est


moins accepté aujourd’hui : dans une négociation multilatérale, tous les Etats
sont attentifs au respect de leurs droits, à commencer par les Etats du Sud et les
« petits Etats » qui sont les plus nombreux sur la scène internationale (105 Etats
membres sur 193 ont moins de 10 millions d’habitants) Une illustration
essentielle de ce nouvel « ethos » de la diplomatie multilatérale est le recours
fréquent au Consensus pour approuver les Accords finaux, pratique qui
ménage la souveraineté de chacun, qui légitime les décisions collectives de
manière inattaquable , et qui relève souvent d’un véritable « accomplissement
collectif » dans la négociation.
18

1.3. La paradiplomatie

A. Le Concept de paradiplomatie

- Le néologisme « paradiplomatie » apparaît dans la littérature scientifique au


cours des années 1980. Il s’inscrivait alors dans le renouveau de l’étude du
fédéralisme et de la politique comparée et servait fondamentalement à décrire
les activités internationales des provinces canadiennes et des Etats américains
dans le contexte de la mondialisation et de la croissance des relations
transfrontalières en Amérique du Nord (Paqui, 2004).

- L’inventeur du concept, PANAYOTIS SOLDATOS, professeur émerité de l’Université


de Montréal, définit la paradiplomatie comme la poursuite directe, à des
degrés variables, d’activités internationales de la part d’un Etat fédéré
(Soldatos, 1990). Ivo D. DUCHACEK épouse lui aussi le concept dont il devient un
grand théoricien, parce qu’il le trouve supérieur à son concept de
microdiplomatie puisqu’un sens péjoratif lui est attribué.
Pour lui, l’ajout « para » devant « diplomatie » exprime convenablement ce
dont il s’agit, soit une politique internationale de la part d’un Etat fédéré,
une politique internationale qui peut être parallèle, coordonnée ou
complémentaire à celle de l’Etat central, mais qui peut également parfois
entrer en conflit avec la politique internationale du pays (Duchacek,1990).

- Bien que le concept de paradiplomatie tende à être le plus utilisé, il demeue


néanmoins contesté par plusieurs auteurs. Certains préfèrent utiliser
l’expression « diplomatie régionale sub-étatique » et d’autres privlégient
l’expression « diplomatie parallèle », ou encore « diplomatie à paliers
multiples ».

B. Quel type d’acteurs internationaux ?

Leur statut est à mi-chemin entre celui d’un pays souverain et celui d’une
Organisation non gouvernementale (ONG) ou d’une Entreprise
multinationale. Leur statut est ambigu, ils ne sont pas des acteurs reconnus du
droit international au même titre que le pays.
Mis à part certaines exceptions prévues dans le droit interne comme en Belgique,
ces gouvernements qualifiés de « gouvernements non centraux » ne peuvent
pas formellement signer de véritables traités internationaux au sens du droit
international. Ils ne peuvent pas non plus ouvrir de véritables ambassades ou
consulats.
19

Cela dit, ce manque de reconnaissance par le droit international ne leur enlève pas
toute capacité d’agir au niveau international. Leur mode d’action se situedavantage
dans le registre des ONG. En effet, les gouvernements non centraux envoient des
missions d’étude et de prospection à l’étranger, ils participent aux foires
commerciales et à certains forums internationaux, tel le forum économique
mondial de Davos.

C. Quelques illustartions de la paradiplomatie

1. Belgique :

En 1993, une révision constitutionnelle a accordé aux régions et communautés le


droit de développer la coopération internationale, y compris la ratification des
traités, dans les matières relevant de leur compétence exclusive (article 167,
paragraphe 3). Les questions culturelles et éducatives sont, selon le paragraphe 3
de l'article 127, les domaines relevant de leur compétence exclusive. Cette faculté
comprend la rédaction des traités, qui sont ratifiés par les Conseils des
Communautés française et flamande par décret (article 128 (1.1)). L'article 130,
paragraphe 4, prévoit le même droit pour la Communauté germanophone et ajoute
les "questions personnelles" à ses domaines de compétence. Les Communautés
ayant acquis le droit exclusif de développer leurs relations internationales sur ces
questions exclusives, le Roi ne peut signer, ratifier ou dénoncer les traités en leur
nom. Seuls les traités conclus avant le 18 mai 1993 peuvent être dénoncés par le Roi.
La rigidité du champ de compétences de la Belgique a soulevé des difficultés
juridiques pour l'approbation des traités internationaux traitant des questions
fédérales et communautaires. Ces traités, dits traités mixtes, font l'objet d'un accord
de coopération entre l’État fédéral, les Communautés et les Régions (8 mars 1994),
qui prévoit un mécanisme complexe de partage des responsabilités.

2. Canada :

Les provinces canadiennes comptent parmi les unités infranationales les plus
actives sur la scène internationale. Le montant total dépensé en diplomatie par les
dix provinces canadiennes est égal à celui des cinquante États américains, malgré
le fait que la population du Canada représente seulement un neuvième de la
population américaine et son économie un quatorzième de celle des États-Unis. Les
provinces canadiennes sont en grande partie motivées par des préoccupations
économiques découlant du degré élevé de diversité économique entre les provinces
du pays et de l'intégration du Canada aux marchés mondiaux, en particulier au
marché américain par le biais de l'ALENA. Neuf des dix provinces commercent
davantage avec les États-Unis qu'avec le reste du Canada.
20

Les relations avec les principaux partenaires commerciaux, en particulier les États-
Unis, sont les plus importantes. En même temps, le nationalisme québécois a
motivé la province francophone du Québec à resserrer ses liens avec la France et
les autres membres de la Francophonie. De plus, la constitution du Canada est
généralement interprétée de façon décentralisatrice, ce qui donne beaucoup de
responsabilités aux provinces.

3. Etats-Unis :

Les états fédéraux des États-Unis ont une diplomatie parallèle, autonome par
rapport à celle menée par le gouvernement américain. Auparavant, le champ de
compétence des états américains ne s'étendait pas aux relations internationales,
mais cela a changé avec la mondialisation des échanges commerciaux. Leur
diplomatie parallèle peut aussi toucher des domaines de compétence qui ne sont
pas traditionnellement de leur ressort, comme les droits de l'homme,
l'environnement, ou la sécurité militaire. En 2005, l'ensemble des états américains
dépense 200 millions de dollars dans leur paradiplomatie, et possède, en 2001, 183
représentations à l'étranger.

4. En définitive :

Le phénomène paradiplomatique, bien que généralement peu spectaculaire,


représente certainement un changement important sur le plan de l’étude de la
politique étrangère et de la politique internationale. Le phénomène est extensif,
intensif et permanent. Les intérêts internationaux des gouvernementaux des
gouvernements centraux sont très variés et importants. Dans leurs actions
internationales, ces gouvernements, malgré l’asymétrie des cas, disposent d’une
marge de manœuvre et de ressources considérable.

1.4. La diplomatie de Club et de Groupes

- L’Organisation des Nations Unies reconnaît 197 Etats. Cependant au sein même
de cette assemblée, autrement dit du G197, des groupes de discussion et de
partenariat réduits se sont constitués au fil du temps. Ils se sont articulés sur
bases géographiques, thématiques, fonctionnelles ou plus idéologiques.

- Cette multitude des groupes restreints qui cherchent à orienter efficacement les
décisions, on conduit sur la scène internationale à la mise sur pied d’institutions
subrégionales et spécialisés, mais également de groupes plus informels de
réflexion et d’action.
21

- Les rassemblements interétatiques en format restreint peuvent compter un


grand nombre de membres. Il en est ainsi du G77 inauguré en 1964. La coalition
conçue pour promouvoir les intérêts économiques et politiques des pays en
développement en rassemble aujourd’hui 132.

- Définir au sein d’une commuanauté aussi diverse des objectifs, des positions
communes et des modes d’action en synergie ne s’avère pas toujours aisé. Par
souci d’efficacité, les Etats sont conduits à compléter leur participation aux
macro-organisations par modus operandi mobilisant un nombre plus limité
d’acteurs. Ainsi en 1971, au sein du G77, il fut décidé d’édifier un G24 afin que
les pays en voie de développement puissent être mieux entendus au Fonds
Monétaire International (FMI).

- La constitution d’instruments diplomatiques unissant un petit nombre de pays


ne signifie en rien des ambitions limitées comme en témoigne depuis 2005 le G4
associant l’Allemagne, le Brésil, l’Inde et le Japon dans le but de permettre
d’accéder à chacun des pays au statut de membre permanent du Conseil de
Sécurité.

- Si les assemblages interétatiques peuvent avoir un seul but à atteindre, ils


peuvent être plurifonctionnels. La mise sur pied des cercles informels de
discussion pour concourir à la gouvernance mondiale ou subrégionale est
d’abord une méthode de travail diplomatique. Elle n’est pas une fin en soi. Elle
vise à renforcer les relations de confiance entre les Etats d’Etat et de
Gouvernement, voire entre leurs ministres ou les fonctionnaires fonctionnaires.
C’est un moyen intergouvernemental d’influence pour chercher à peser
politiquement dans des enceintes internationales et un outil de négociation
privilégié pour sortir des crises les plus complexes.

- Si les Etats ont régulièrement recours à un mode de mobilisation combinant des


dispositifs formets et informels, ils savent s’ouvrir au-delà du monde politico-
administratif au sens strict. Des groupes d’influence agrégeant sur une base
régulière des femmes et hommes d’Etat, des intellectuels voire des hommes
d’affaires se sont positionnés sur la scène internationale pour faire évoluer les
opinions publiques, infléchir les diplomaties conduites au sein des
Organisations internationales et dans le cadre des relations bilatérales. Ils ont
pu jouer un rôle d’importance dans la définition de nouvelles normes
juridiquess internationales, et concourir à la résolution de conflits.
22

1.6. La diplomatie publique et digitale

Les principales différences entre les diplomaties traditionnelles et stato-centrées et


les nouvelles expressions de la diplomatie tiennent aux formes de participation et
de communication sur lesquelles chacune repose.

Dans la nouvelle forme de diplomatie, les flux de communication hiérarchisés sont


remplacés par des flux multidirectionnels qui ne visent pas toujours les élites
politiques, même si leurs objectifssont souvent d’influencer les attitudes et les choix
politiques de ces élites. L’enjeu est alors d’identifier les nœuds clés et les
interlocuteurs potentiels au sein des arènes politiques pour construire des relations
liées aux objectifs.

Les technologies numériques se surperposent et reforcent ces tendances. Alors que


Fergus Hanson, à la suite du Département d’Etat américain, considère que le cœur
de ce qu’il appelle : « eDiplomacy » est « l’utilisation d’internet et des TC pour
tenter d’atteindre des objectifs diplomatiques », la diplomatie nimérique
implique un certain nombre d’éléments qui dépassent ce cadre et qu’il est
nécessaire d’identifier pour donner du sens à ces évolutions complexes.

- Le premier élément, et sans doute le plus visible, tient à l’environnement


changeant au sein duquel la diplomatie fonctionne qui reflète l’évolution des
agendas et la capcité à les influencer.
Ce phénomène s’accompagne d’une accélération des événements ( la rapidité
de leur développement, de leurs vélocités ( en termes de vitesse et de direction)
et de leurs implications pour les décideurs.
Cette tendance a été identifiée comme une des caractéristiques de la
globalisation et que les nouvelles technologies- et particulièrement celles
mobiles comme les smartphones- donnent du pouvoir aux individus et aux
roupes pour imprimer une forme aux événements.
La capacité des gouvernements à déployer des ressources numériques est aussi
cruciale que leur aptitude à les contrôler, notamment à travers des interventions
étatiques dans l’accès à l’internet et aux médias sociaux.
Ces évolutions suggèrent que le contrôle des Etats sur les événements et sur les
agendas diminue, mettant en exergue le besoin de nouvelles compétences et de
structures tout en dépendant de celles en service.

- En ce qui concerne l’agenda de politique étrangère, un deuxième aspect


de la diplomatie digitale porte sur le cyber-agenda. Ainsi, la Cybergouvernance
et la « liberté sur internet » sont devenues des enjeux cruciaux dans les
négociations globales. Les questions relatives à la Cybersécurité sont devenues
23

importantes par tous les actuers diplomatiques, particulièrement les diplomates


et les ministères des Affaires Etrangères.

- La troisième échelle du débat sur la diplomatie digitale se focalise sur


l’utilisation d’internet et des technologies numériques connexes pour la gestion
du savoir. Généralement, pour un Gouvernement, cela implique de prendre en
compte de manière efficiente les données dans une ère de « méga-données » ;
ce qui a une incidence particulière pour les Ministères des Affaires Etrangères
qui ont l’obligation de gérer à bon escient des sources rares d’information.

- Le quatrième élément relatif à la digitalisation de la diplomatie concerne


l’usage des technologies numériques dans le développement des performances
du service public, l’amélioration des prestations et le renforcement de leurs
contributions à l’élaboration de al stratégie (des politiques).

- Ces quatre aspects de la diplomatie digitale ne sont pas des catégories


entièrement dissociées, mais sont des éléments connexes d’un environnement
politique d’une complexité croissante, transcendant le clivage entre politiques
nationales et internationales.

1.7. De la Négociation à la Médiation

A. Faut-il négocier ?

- Historiens et ethnologues s’entendent pour considérer que la négociation


caractérise toutes les sociétés humaines. Les internationalistes précisent quant à
eux que les concepts de négociation et de diplomatie sont étroitement associés
depuis le XVIè siècle.

- En 1842, le Dictionnaire politique de Garnier-Pages indique que « les


négociations embrassent presque tout le champ de la diplomatie ». le
Dictionnaire Diplomatique paru dans l’entre-deux-guerres explique quant à
lui que « la négociation est la raison d’être on seulement de l’agent
diplomatique en tant que Chef de mission, mais encore de la diplomatie
toute entière ».

- Depuis, lors, l’association de eux termes est systématique. En 2008, les 125 pages
d’un rapport intitulé « le travail diplomatique.Un métier et un art » se réfèrent
176 fois au terme « négociation ». Qu’il s’agisse de défense ou de sécurité, de
commerce ou d’environnement, de culture ou d’aide humanitaire, le diplomate
négocie. Il ne fait certes pas que cela. Il représente, informe, protège ses
ressortissants. La dinversité de ces tâches n’empêche toutefois pas que la
négociation demeure l’une des principales fonctions diplomatiques.
24

- Sur le plan des définitions, ce terme désigne un processus par lequel


deux ou plusieurs parties, accompagnées ou non d’un médiateur,
interagissent dans le but d’atteindre une position acceptable au regard
de leurs divergences.

- Cette définition permet de mettre enexergue quatre éléments clés de toute


négociation. Le premier élément vise son aspect relationnel. La négociation
implique inévitablemet une interaction entre des acteurs, et, parlà, une forme
de communication plus ou moins formelle.

- Le deuxième élément concerne les divergences inhérentes à toute


négociation. Ces divergences peuvent concerner les faits,des objectifs, des
méthodes ou encre des valeurs. Qu’elles soient réelles ou perçues, elles se
révèlent cruciales pour passer du duel au duo. Le troisième élément rappelle
que les parties sont liées par un certain degré d’interdépendance : aucune
d’entre elles ne peut en principe parvenir à un résultat satisfaisant sans l’autre.
Enfin le quatrième élément : la solution recherchée doit être mutuellement
acceptable, même si l’Accord est inéquitable ou dééséquilibré.

- Sur le plan de l’activité diplomatique : la négociation diffère à la fois du


simple échange de vues et de la diplomatie coercitive par laquelle une partie
tente d’imposer ses préférences de manière unilatérale. La négociation permet
aux diplomates de défendre au mieux leurs intérêts nationaux sans provoquer
pour autant une situation de guerre permanente. Cela ne signifie pas toutefois
que ce processus se revèle approprié dans tous les cas.

B. Peut-on tout négocier ? Peut-on, par ailleurs, négocier avec n’importe


qui ?

- Le premier questionnement vise l’objet de la négociation. Certaines réalités


paraissent à priori peu négociables. Croyances, valuers, identités ne sont ppas
le fruit d’un compromis.Elles onst par nature non divisibles et peu susceptibles
d’être modifiées à l’issue d’une quelconque tractation. De la même façon, les
notions de justice et de vérité ne semblent pas, dans leur principe en tout cas,
pouvoir faire l’objet d’un marchandage.
Ainsi dans le cadre de négociations à dominance conflictuelle plutôt que
coopérative, il n’est pas rare que des partues affirment d’emblée le caractère
innégociable de certaines positions.
25

- Il paraît, par conséquent, délicat de présenter certains objets comme


innégociables par nature. Certaines réalités-fussent-elles présentées et perçues
comme telles pendant des décennies- peuvent à terme, en fonction des
circonstances et des objectifs de chaque acteur, faire l’objet d’une transaction. Le
caractère innégociable d’une position ne s’impose, en somme, que lorsque la
négociation a échoué.

- Le deuxième questionnement concerne le type d’interlocuteurs auxquels il


s’agitit de faire face. Cette question se pose dès que l’une des parties refuse de
s’assoeir à la table des négociations avec une partie présentée comme illégitime.
L’argument est souvent répété : « on ne négocie pas avec un dictatuer ou
avec un terroriste ».
Le débat sur l’opportunité de négocier reste ouvert Pour nombre de diplomates,
la question ultime n’est sans doute pas de savoir s’il faut négocier avec des
dictatuers ou des terroristes, mais quand et comment négocier avec eux.

- Face à ces interrogations, le défi est de parvenir à doser éthique et pragmatisme


tout en étant conscient de la précarité d’un tel équilibre. Pareil dosage rappelle
que la crédibilité même d’une négociation implique que l’usage de la force
ne soit pas exclu a priori. L’articulation entre la négocaition et la
confrontation armée est complexe.
Le recours à à la force est dans la plupart des cas, suivi à plus ou moins long
terme par une reprise des négociations. L’intérêt du recours à la force n’est dès
lors pas de dispenser les acteurs d’une négociation pénible et coûteuse en temps
et en énergie, mais de postposer ce processus dans l’espoir de favoriser un
rapport de force plus avantageux.

C. Quand faut-il négocier :

La variable temporelle se révèle décisive pour comprendre les résultats d’une


négociation. Cette variable peut se décliner de deux façons. La première concerne
le timing, tandis que la seconde se concentre sur la durée des négociations.

Existe-t-il un moment favorable pour engager une négociation ? Les


diplomates doivent-ils être sensibles à une forme de momentum ?
Chercheurs et praticiens s’accordent sur le fait qu’un conflit a peu de chances d’être
résolu s’il n’a pas atteint un certain degré de maturité. Sous cet angle, une double
condition semble nécessaire pour entreprendre une négociation ou une médiation
fructueuses.
26

- Primo, que chaque partie en présence comprenne qu’elle n’a aucune chance de
l’emporter en misant sur une escalade de force.
- Secundo, que chaque partie perçoive la négociation comme une issue possible
afin de parvenir à un Accord satisfaisant pour l’ensemble des parties.

- Ces deux conditions ont été remplies lors du processus d’Oslo en Norvège qui
permit en 1993 la signature d’un Accord symbolisé par une poignée de main
ente Yasser Arafat et Yitzhak Rabin (7 mois 14 rencontres secrètes,) Les mêmes
conditions caratérisent les négociations qui aboutirent au démantèlement de
l’Apartheid en Afrique du Sud .

- Si le reglèment du conflit se passe à travers un Médiateur, ce dernier ne doit


intervenir ni trop tôt, ni trop tard afin de ne pas perturber le processus de
mûrissement lui-même. La spécificité du contexte propre à chaque cas permet
de refléchir au rôle du médiateur de manière différenciée. Son objectif est de
dépasser less obstacles, blocages et autres impasses qui empêchent la poursuite
des négociations. Son rôle varie quantà lui d’un cas à l’autre, allant de la stricte
neutralité jusqu’à la pression caractérisée.

- La variable temporelle permet de mettre en lumière une seconde dimension liée


à la durée des négociations. Une fois qu’un processus est lancé, quand
s’agit-il de l’arrêter ? Envisager les processus de négociation dans le long
terme élargit considérablement els perspectives. L’expression « post conflit »
fait certes l’objet d’un consensus dans le champ de relations internationales.
Praticiens et chercheurs l’utilisent pour distinguer ce qui relève de la
prévention, de la résolution et de la transformation des conflits. Il paraît
toutefois utile de s’interroger : comment démobiliser les esprits ?; Quand se
situe-t-on, enréalité, dans l’après-conflit ?; Sur base de quels critères ?

- Ces questions invitent de concilier les temporalités propres à tous les acteurs
impliqués dans la transformation des relations entre anciens ennemis. A la table
des négociations, les protagonistes principaux sont souvent distingués en
fonction de leurs intérêts respectifs. Ne s’agit-il pas aussi de les différencier en
fonction de leur temporalités propres ? Le temps des professionnels de la paix
n’est pas celui des élites. Le temps des descendants n’est pas celui législateurs.
Le temps des pays donateurs n’est pas celui des survivants.
27

- Cette diversité permet de s’interroger sur l’impact à long terme de toute


médiation. Que celle-ci soit assurée par une équipe diplomatique ou une
organisation privée, elle vise en général l’obtention d’un Accord entre
protagonistes. Ne peut-elle pas en outre favoriser la mise en œuvre effective des
Accords et, de manière ultime, la multiplication des plateformes concourant à
la coexistence et au rapprochement des parties ? Cet élargissement des
perspectives invite à réfléchir à la troisième et dernière question qui structure
cette refléxion. Au-delà des propos liés à la légitimite des acteurs en présence et
au timing le plus approprié pour entamer des négociations, encore faut-il
s’entendre sur les principales variables qui permettent d’expliquer le résultat de
ces négociations.

D. Comment négocier ?

- De nombreux auteurs se sont penchés sur les facteurs explicatifs du succès ou


de l’échec des négociations. Dès 1716, François de Callières fait de la
négocaiation un objet d’étude. Son ouvrage De la manière de négocier avec les
souverains s’inscrit dans la lignée du Prince de Machiavel par les conseils qu’il
prodigue à ses lecteurs. Mais plutôt que deréduire la négociation à un préparatif
de guerre, il la décrit aussi comme augure de paix.Depuis beaucoup de manuels
de type « mode d’emploi » ne cessent de se succéder.

- Ces ouvrages insistent notamment sur l’importance de la préparation et


des aspects formels de la négociation. Les questions liées au statut, à la
langue utilisée, à la fixation de l’agenda, du mandat ou de l’ordre du jour
conditionnent bien souvent le résultat du processus.

- La plupart de ces ouvrages présentent les techniques, tactiques et autres


stratégies de la négociation, se référant surtout aux principes classiques de la
rhétorique, de l’argumentation et des processus de persuasion. A côté de ces
manuels du bon négociateur, nombre d’articles et de livres présentent différents
angles d’approche pour comprendre les mécanismes de la négociation.

- Cinq approches méritent d’être distinguées : l’approche structurelle ;


l’approche comportementale, l’approche processuelle, l’approche
stratégique, l’approche culturel
28

A. Approche structurelle :

- L’approche structurelle se concentre essentiellement sur la notion de pouvoir.


Selon cette approche, toute négociation peut être analysée comme un
marchandage mettant en jeu des manifestations de puissance.

- Sous cet angle, le résultat des négocaitions internationales découle directement


des asymétries de pouvoir. Pour la plupart des auteurs, ce résultat ne fait que
confirmer la distribution de pouvoir initiale entre les parties, les plus puissants
étant à même d’orienter le déroulement du processus.

- Il convient cependant de nuancer cette opinion en soulignant le caractère relatif


du pouvoir. Au-delà de la puissance réelle de chaque protagoniste, souvent
mesurée de manière chiffrée (sur la base d’éléments stratégiques, économiques
ou démographiques), ne s’agit-il pas aussi, sinon surtout, de prendre en
considération la puissance telle qu’elle est perçue par les parties ?

- Dans le même sens, il est intéressant de prendre au sérieux les mécanismes qui
permettent aux parties jugées a priori les plus faibles de modifier le rapport de
force initial. Songeons notamment à l’intervention des tierces parties qui leur
sont favorables (Etats, alliés), au soutien procuré par des ONG ou des médias,
parfois susceptibles d’influencer la scène publique internationale.
La négociation ne peut donc être réduite à une stricte mise en balance des
ressources matérielles de chaque partie. Le pouvoir demeure certes l’une des
variables les plus fondamentales du jeu diplomatique, mais le moins puissant
n’est certes pas pour autant systématiquement à la merci du plus fort.

B. Approche comportementale :

- L’approche comportementale précise quant à elle que le résultat d’une


négociation ne reflète pas simplement un rapport de force, mais dépend aussi
de l’attitude, de la motivation et de la personnalité des acteurs. La plupart des
diplomates considèrent que la négociation est un art qui ne s’enseigne
pas. Un art difficile, basé sur le réalisme et la patience, ainsi que sur une
créativité et une flexibilité à toute épreuve. Une somme de talents pour
clarifier sa position et cerner celle de l’autre, dialoguer jusqu’au point d’entente,
équilibrer les concessions pour protéger la relation.
29

- Selon cette approche, le résultat de la négociation est directement lié aux offres
et aux demandes faites par les parties afin d’aboutir à des concessions Sont
mobilisées à cet effet la théorie des jeux, lathéorie économique (qui permet
d’étudier les coûts comparatifs) et la psychologie sociale (qui décortique les
comportements coopératifs et compétitifs)

- Basée sur la rationalité des acteurs, cette école pose un certain nombre de
questions fondamentales liées au choix des acteurs, aux conditions qui affectent
ce choix et au degré de confiance qui existe entre les parties. A titre d’exemple,
l’étude du dilemme du prisonnier a permis d’élaborer une théorie de la
coopération reposant sur une forme de confiance conditionnelle. Dans
cette perspective, la stratégie la plus probante à long terme est de
commencer par coopérer et de répondre, dans un deuxième temps, sur
le même mode que l’autre partie.

C. Approche Stratégique :

- L’approche stratégique ne peut ni prédire la conduite des acteurs, ni l’issue de


leurs interactions. La négociation elle-même repose sur des calculs et des
perceptions qui rendent imprévisibles son déroulement et son aboutissement.

- Ce constat renvoie à la délicate articulation entre notions de rationalité et de


prévisibilité. Le fait que les parties s’efforcent d’agir rationnellement et
que,rétrospectivement, le résultat de leur négociation paraisse lui aussi
rationnel ne signifie pas que ce résultat puisse être calculé à l’avance.

- Les historiens le rappellent : il est décisif d’envisager les décisions prises


par les acteurs en gardant à l’esprit le contexte qui était le leur- fait
d’ambiguïtés et des risques plutôt que de certitudes et dévidences.

D. Approche processuelle :

- Cette approche attire l’attention non pas ur le comportement des acteurs ou


leurs stratégies respectives mais sur les processus de négociation comme tels.
Reposant sur le découpage d’une négociation en phases successives, elle invite
à distinguer la prise de contact, les phases d’information,
d’argumentation et d’ajustement des positions, et finalement la
formation de l’Accord. L’intérêt d’une telle distinction est de cerner au mieux
les fonctions, les outils et les qualités requises pour chacune de ces phases. Sur
le terrain, les processus de négociation progressent toutefois rarement de
manière linéaire et idéalement séquencée. Caractérisés par de nombreux allers
et retours, ils ne sont ni irreversibles ni systématiquement articulés autour de
phases clairement identifiables.
30

E. Approche Culturelle :

- Cette approche souligne l’importance des variables culturelles dans le cadre de


toutes négociation ninternationale. Elle s’interroge sur le rôle du langage,
des systèmes de valeurs, des codes ou encore des rites.

- Au-delà de la question des stéréotypes nationaux, souvent décisifs durant les


phases de préparation et de premiers contacts ; il s’agit de prendre au sérieux
les structures et les pratiques sociales, les modes d’autorité ainsi que les
événements perçus dans la mémoire collective de chaque groupe comme des
précédents marquants.

- La frontière entre approches comportementale et culturelle n’est toujours pas


aisée à marquer. Il semble néanmoins crucial de repérer le rôle joué par les
éléments composant les millefeuilles culturels qui conditionnent nombre de
positions. Si ces éléments ne permettent pas, à eux seuls, de prédire le
déroulement d’une négociation, ils peuvent constituer des obstacles de taille sur
le plan de la communication, des perceptions et des émotions. A ce sujet, une
forme d’empathie sur le plan non pas seulement personnel, mais aussi culturel,
figure parmi les qualités clés qui font d’un diplomate un négociateur chevronné.

1.8. Rituels et diplomatie

- La scène diplomatique st constellé de « rituels d’interaction »(Goffman, 1974).


Pourtant, les manules et les handbooks de diplomatie proposent rarement, voire
jamais,un chapitre sur les rituels.

- Le Oxford Handbook of Modern Diplomacy, par exemple, ne fait apparaître


aucun passage sur la question, alors que l’éfficacité de certains éléments
fondamentaux de la diplomatie, tels que la représentation, le protocole, les
sommets internationaux et la négociation, repose souvent sur des rituels plus
ou moins habilement maîtrisés et déployés à bon escient (Thierry Balzacq,2019).

- Comme le souligne si bien Goffman : « quelle que soit l’activité en cours,


aussi profane et aussi matérielle qu’elle apparaisse, elle peut être
l’occasion de multiples petites cérémonies, dès lors que d’autres
personnes sont présentes. L’observance de ces pratiques, régie par les
obligations et les attentes cérémonielles, fait qu’un flux constant de
complaisances traverse la société, et que l’entourage ne cesse de
rappeler à chacun le devoir qu’il a de se tenir fermement et de respecter
le caractère sacré d’autrui. Les gestes que parfois nous nommons vides
sont peut-être, en fait, les plus pleins de tous » (Goffman, 1974) Mais,
finalement, qu’est-ce qu’un rituel ? Voilà une question qui mérite d’être
clarifiée
31

A. Qu’est-ce qu’un rituel ?

- Les définitions concernant le rituel ont des points d’appui différents, mais une
ligne de démarcation permet d’en distinguer deux familles : d’une part,
celles qui, en particulier à la suite d’Emile DURKHEIM (1912) définissent
le rituel comme un trait important du sacré et d’autre part, les définitions
qui détachent le rituel de toute référence au sacré.

- Pour la première approche rattachée au sacré , le rituel est considéré


comme un cérémonial stylisé à travers lequel des personnes reliées de plusieurs
manières aux acteurs centraux, ainsi que ces derniers eux-mêmes, réalisent des
actions enfonction de leurs rôles séculiers ; et les participants croient que ces
actions prescrites expriment et changent les relations sociales de telle sorte
qu’elles leur apportent bénédiction, purification, protection et
prospérité…(Gluckman, 1966). Les clarifications conceptuelles qui s’écartent de
la référence religieuse constituent

- la deuxième entrée possible dans l’univers des rituels. Certaines sont


extensives, d’autres se distinguent nettement par leur parcimonie.

- STANLEY Tambiah offre une définition plus large. Pour lui, en effet, le rituel est
« un système culturellement construit de communication symbolique. Il
est constitué de schèmes de séquences ordonnées de mots te d’actes,
souvent exprimés à travers de multiples médias, dont le contenu et
l’agencement se caractérisent par un degré variable de formalité(
conventionnalité), de stéréotypie (rigidité), de condensation (fusion) et
de redondance (répétition) » (Tambiah,1979).

- RAPPAPORT Roy, qui a développé une des approches les plus puissantes et les
plus ramassées du rituel, s’inspire à bien des égards de cette définition. Mais il
précise que ceux qui participent au rituel ne sont pas totalement les auteurs des
séquences des mots et des actes répétés.
Dans son approche, le rituel devient donc « une performance de séquences
plus ou moins invariables d’actes et de mots non entièrement encodés
par les participants » (Rappaport, 1999)
32

- Si une bonne définition du rituel, c’est-à-dire une défintion qui s’attache


à la forme et non au contenu variable des rituels, doit éviter d’en lister les
fonctions, on ne peut faire l’économie d’une prise en compte des fonctions dès
lors que l’on s’intéresse à une famille de rituels, notamment les rituels
diplomatiques. Pour cela, il faut travailler de manière empirique, en partant
d’un rituel particulier. Le protocole diplomatique fournit un tel terrain
d’enquête, à partir duquel on pourra non seulement spécifier les fonctions d’un
rituel mais aussi clarifier davantage comment opère un rituel.

B. Principaux rituels :

E1 : Le Protocole :

« Support et expression de l’ordre diplomatique »

- On distingue, grosso modo, l’un, le protocole officiel, régule les interactions


entre les autorités d’un même Etat, l’autre, le protocole diplomatique,
désigne l’ensemble des normes, conventions et pratiques qui régissent
les contacts et les interactions entre les autorités d’Etats différents.

- Toutefois, le fait que le protocole régule les interactions renseigne peu sur le
contenu de celles-ci. De même, les ingrédients protocolaires peuvent varier d’un
pays à un autre ; mais la « nécessité interne » du protocole reste immuable :
mettre en forme l’ordre diplomatique. En somme, une manière de penser et
de construire de l’ordre sous-jacent aux rapports entre Etats.

- Baromètre des relations internationales pour certains, arme


diplomatique pour d’autres, le développement du protocole diplomatique
moderne remonte à la fin du XVIIè et à la première moitié du XVIIIè siècles. Parmi
les précursseurs, deux textes témoignent de cette évolution :
L’Ambambassadeur (1680-1681), écrit par Abraham de WICQUEFORT, et De la
manière de négocier avec les souverains (1716), commis par François de CALLIERES,
ancien secrétaire de Louis XIV.

- Certes, ces deux ouvrages ont pour thèmes centraux la négociation et le rôle de
l’ambassadeur. Mais ce qui est frappant, c’est que les audiences, les civilités et
les cérémonies sont élevées au rang de « parties les plus essentielles de
l’Ambassade » (Wicquefort, 1680).
33

E2 : La Question des préséances

- Une des questions essentielles du protocole que le Congrès de Vienne (1815) a


dû trancher est celle des préséances. L’objet des préséances est d’abord de
fixer un ordre hierarchique entre les parties en présence. Il n’est donc pas
étonnant que la question des préséances ait donné lieu, avant sa formalisation à
Vienne, à des différents entre les nations européennes soucieuses d’affirmer leur
autorité les unes sur les autres, notamment pendant le Moyen-Age et l’ère
moderne. Le protocole véhicule toujours une structuration hierarchique
des rapports entre les diplomates et reste un instrument efficace dans
l’expression structurée du contenu des relations entre Etats.

- Comme le remarque SERRES, « les agents étrangers représentent quelque chose


deplus élevé qu’eux-mêmes. C’est à la personne morale dont ils sont
l’expression que s’adressent les honneurs qui leur sont rendus. On n’a pas assez
remarqué que « le protocole ne connaît ni peuple victorieux, ni peuple
vaincu, et qu’il impose à des nations même ennemies, des égards
réciproques, sans tenir compte de leur rapport de forces… » (Serres,
1992)

- Ainsi, le protocole codifie les prérogatives, les privilèges et les immunités.


De plus, il procure aux cérémonies diplomatiques un cadre normatif, lequel
favorise des interactions pacifiques. Dans les terms de Tambiah (1979), le rituel
« apporte temporairement la perfection dans un monde imparfait »

E3 : La remise des lettres de créance :

- Le rituel de la remise des lettres de créance est instructif à plusieurs égards.


D’une capitale à l’autre, des subtilités peuvent être introduites, mais surtout le
moment peut être délicat pour l’ambassadeur, notamment quand les relations
entre les deux Etats sont détériorées. D’ailleurs, les lettres de créance peuvent
être rejetées pour exprimer notamment la désapprobation d’une politique,
d’une décision ou d’un comportement.

- Ainsi, le Président François Mitterrand refusa-t-il les lettres de créance


du nouvel ambassadeur d’Afrique du Sud pour protester contre
l’incarcération de Pierre-André Albertini, un coopérant françois.
L’accréditation de l’ambassadeur sud africain en France n’intervint
qu’après la libération d’Albertini. Plus récemment, c’est la Vatican qui
n’a pas donné suite à la nomination de Laurent Stefanini comme
ambassadeur de France auprès du Saint-Siège. Désigné en 2015,
Laurent Stefanni a attendu environ un an et demi une accrédition qui
n’est jamais arrivée. La France a finalement décidé de le nommer auprès
de l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la
Culture (Unesco) et de proposer au Pape François le nom de Philippe
Zeller, lequel a rapidement été accepté et reçu en audience, mettant fin
à une longue opposition entre Paris et le Vatican.
34

E4 : La poignée de main :

- La poignée de main est un des gestes les plus courants de l’économie-système


diplomatique. Certaines ont marqué l’histoire des relations internationales ;
elles sont devenues iconiques – exemples : celle entre Raül Castro et Barack
Obama (2013) ; scellant les Accords d’Oslo, la poignée de main entre
Yasser Arafat et Yitzhak Rabin (1993) ; celle de Mikhaïl Gorbatechev et
Ronald Reagan (1988).

- La poignée de main qui est considérée à priori comme un geste banal de la vie
quotidienne obéit pourtant à un code précis.Il existe, de fait, des règles détaillées
sur la poignée de main « idéale » : elle doit être brève sans fuyante ni trop
longue, ce qui reviendrait à prendre la main de l’autre en otage ;
communiquer de la force sans être dominatrice ; chaleureuse sans être
envahissante.

- La poignée de main relève à la fois d’un rituel de transition et d’un rituel d’accès,
au sens goffmanien( Goffman, 1974)
En effet, la poignée de main signale le début ou la fin d’une interaction ou d’une
situation diplomatique. Les personnes qui se serrent la main se
reconnaissent et, par là même, « se confirment qu’elles se considèrent
réciproquement comme des personnes civiles, en rendant un hommage
discret au caractère sacré de la personne (Keck 2012-2013).

- La poignée de main est une action coordonnée ; un mouvement vers l’autre qui
escompte une réponse sans laquelle la situation devient embarassante. Dans la
main tendue, c’est une part de soi-même qui se donne ; elle est, en ce
sens, une forme de prestation totale (Mausss, 1923-1924).

- La main tendue, en même temps qu’elle invite, institue une obligation de


réponse. Ainsi, l’absence de poignée de main dans une situation qui en appelle
d’ordinaire peut susciter des commentaires sur la qualité de la relation.
35

E5 : En définitive :

- Les rituels diplomatiques s’incarnent principalement dans des cérémonies


( dîner, remise de cadeaux, signature de traités, invitations aux défilés
militaires, etc.), qui sont autant des occasions pour les performances
diplomatiques. Dans le repas officiels , par exemple, les individus sont
répartis autour de la table en fonction de leur rang et de leurs rôles. On y
joue notamment sur la dsitance et la proximité pour repartir les corps. De
même, par exemple, une revue de la garde royale dans la carrosse de la Reine
d’Angleterre signale le désir de communiquer une estime et une proximité
physique et émotionnelle dont ne bénéficient pas tous les Chefs d’Etat qui
sont reçus en visite officielle.

D’une manière générale,les rituels diplomatiques comportent une réelle mise en


scène, une performance plus ou moins spectaculaire. C’est ce qui a convaincu
certains auteurs à considérer que le rituel était synonyme de théâtre. Ainsi
Wicquefort (1680-1681) compare l’ambassadeur à un comédien « exposé sur
le théâtre aux yeux du public pour y jouer de grands rôles »

Mais le lien entre théâtre et rituel n’est pas sans différences.

D’abord, le rituel ne dépend pas d’une audience ( ce qui neveut pas dire
qu’ne audience ne peut se constituer autour de celui-ci), alors que la présence
d’une audience caractérise fondamentalement le théâtre. En un mot : le
rituel s’organise autour des participants, lesquels peuvent revêtir des
rôles différents durant son déroulement.

La seconde différence concerne les conséquences déontiques de


l’acte, c’est-à-dire ce que l’acte autorise, prescrit ou interdit. Les
participants à un rituel sont tenus de se comporter comme le stipule le rituel,
au-delà du moment où se déroule celui-ci. Le théâtre n’impose pas le même
degré d’implication à ses acteurs, et encore moins à son audience. Par le fait
même de praticiper à un rituel, on accepte de se hisser à la hauteur de ce qui
est prescrit. En d’autres termes, le rapport de ce qui est encodé dans le
processus détermine les limites respectives du rituel et du théâtre.
36

Enfin, les rituels diplomatiques, notamment les dîners officiels, les


visites d’Etat,la signature de traités, prennent forme en deux temps :
une préparation (en coulisse) très détaillée à l’abri des regards et
parfois en l’absence des participants au rituel qui joueront (en scène)
les interactions préparées pour eux. Dans le cadre d’une visite officielle,
par exemple, le Chef du protocole fait des croquis où il situe les uns et les
autres, consulte son homologue étranger, interroge sur le nombre de
membres de la délégation, leur rang, etc. Ce qui se déroule le jour prévu est
l’aboutissement d’un processus qui aparfois pris des mois (voire plus) de
préparation en coulisse. En somme, le rituel ne s’improvise pas et les
participants sont dans une situation paradoxale : à la fois auteurs et
non-acteurs des gestes, des mouvements et des mots qu’ils
expriment.
37

CHAPITRE II : LES ACTEURS DE LA DIPLOMATIE

2.1. Les Etats et leur outil diplomatique

- La plupart des manuels sur la diplomatie font correspondre la création des


outils diplomatiques permanents à l’Europe de l’Ouest de la fin du Moyen Âge.
Les administrations diplomatiques contemporaines seraient des créations
occidentales qui se seraient imposées comme référentiel universel aux autres
Etats du monde. Malgré les appels réguliers de Nerhu à une « voie » indienne
en politique étrangère, de nombreuses études montrent que le service
diplomatique de l’Inde s’est constitué en 1947 à partir de la proto-organisation
que le Gouvernement britannique avait mise en place pour gérer les relations
extérieures de sa colonie.

- En Europe, la fonction de Consul est considérée par les historiens comme la


plus ancienne. Depuis le Xè siècle, on note la présence des consuls marchands
chargés de défendre de défendre les nationaux d’autres pays dans les litiges
maritimes et commerciaux dans les villes grecques antiques et
méditérranéennes. La situation évolue à partir du XVè siècle avec l’envoi entre
les cités italiennes (Gênes, Venise et Florence) des premiers Ambassadeurs. A la
différence des Consuls, les ambassadeurs ne sont plus chargés de défendre
seulement leurs nationaux impliqués dans les litiges, mais de représenter leur
souverain auprès des autorités politiques. La formaule se généralise en Europe
aux XVIè et XVIIè siècles. Le Roi François Ier envoie ainsi le premier ambassadeur
permanent auprès de la Sublime Porte d’Instabul en 1536. C’est également à
partir des XVIè et XVIIè siècles que les Etats européens commencent à créer des
administrations diplomatiques au sein des machines gouvernementales.

- En France, le règne d’Henri II voit la création, en 1589, du premier poste de


Secrétaire d’Etat chargé des Affaires Etrangères. Il est confié à Louis de Revol, qui
devient le premier titulaire du poste de Ministre français des Affaires Etrangères. Le
poste est perennisé par la suite dans l’organigramme de l’Etat français, quelle
que soit la nature du régime politique. En Grande- Bretagne, il faut attendre
1782 pour que soit crée le foreign Office. Aux Etats-Unis, le Département d’Etat
voit le jour en 1789. C’est enfin au milieu du XIXè siècle que la Chine, le Japon
et l’Empire Ottoman procèdent à la création d’une administration permanente
des Affaires Etrangères.
38

- En Occident, le XIXè siècle est marqué par l’apparition d’une spécialisation


fonctionnelle des outils diplomatiques : les Ministères des Affaires Etrangères
se voient dotés de départements et de bureaux géographiques et thématiques.
Après la seconde guerre mondiale, le processus de décolonisation puis
l’éclatement de grands Etats fédéraux (URSS, Yougoslavie) voient semultiplier
le nombre d’Etats et donc d’Ambassades et des Consulats dans le monde.

- C’est dans la seconde partie du XXè siècle que se développent beaucoup de


nouveaux départements chargés des négociations multilatérales dans les
ministères ainsi que des représentations permanentes auprès des Organisations
Internationales (Organisations de Nations Unies, Union Européenne, Union
Africaine).

- A partir des années 1960, les outils diplomatiques deviennent aussi de


nouveaux enjeux de débat public dans les Etats démocratiques. Les parlements
et la presse s’interrogent plus régulièrement sur l’efficacité, leur coût, et sur le
bien-fondé de leurs méthodes, en particulier celles concernant les activités
sociales de représentation. Le début du XIXè siècle voit se produire, sous l’effet
de ce débat, une réduction de la carte des Ambassades et Consulats par les pays
occidentaux. Mais à l’inverse, il est marqué par la création de nouveaux postes
diplomatiques par par les Etats émergents (Brésil, Chine, Turquie). Longtemps
placée au deuxième rang mondial après les Etats-Unis pour le nombre de ses
postes diplomatiques, la France est dépassée en 2017 par la Chine qui a ouvert
des Ambassades dans l’ensemble du monde, et notamment dans les régions
considérées plus importantes pour sa diplomatie, comme l’Afrique.

2.2. Design institutionnel :

A. Les Ministères des Affaires Etrangères :

- D’une manière générale, les ministères des Affaires Etrangères occupent une
place élevée dans l’échelle de prestige des gouvernements,en raison de la
symbolique que revêt la représentation de l’Etat dans les relations
internationales.

- Lors de la composition d’un Gouvernement, il n’est pas rare qu’une


personnalité politique influente soit appelée à diriger l’outil diplomatique
de l’Etat. En fonction des pays et des moments, les ministères des Affaires
Etrangères sont en charge de seules affaires étrangères, comme en Allemagne,
aux Etats -Unis ou au Brésil. Ils peuvent se voir adjoindre les questions d’aide
au développement ou coopération au développement comme en France et en
Grande Bretagne, les questions de commerce extérieure comme en Belgique, et
les deux comme au Canada.
39

- Les Ministres des Affaires Etrangères sont rarement issus de l’administration


diplomatique, cela peut arriver sans que cette pratique soit la norme. Les
Ministres des Affaires Etrangères sont le plus souvent des généralistes
de la politique qui découvrent l’outil diplomatique lors de leur
nomination. Ils ont supplés par des ministres adjoints chargés d’un
domaine fonctionnel. Ces derniers sont appelés, selon les pays ; Vice-
Ministres, Ministres Délégués ou Secrétaires d’Etat.

- Les Ministres des Affaires Etrangères des Etats de l’Union Européenne ont ainsi
sous leur responsabilité un Ministre Adjoint aux affaires européennes, qui se
concentre sur les dossiers négociés à Bruxelles.

- Les Ministères des Affaires Etrangères sont organisés autour de deux univers
professionnes différenciés : d’une part, l’admnistration centrale située dans
la capitale et d’autre part, les représentations diplomatiques et
consulaires situées dans les Etats partenaires et auprès des
Organisations Internationales.

- Les administrations centrales sont généralement structurées en directions


géographiques (Asie, Europe, Afrique, Amériques) et en directions
thématiques (Direction économique, Direction politique, Direction
Juridique).
Dans de nombreux Etats, les réformes ont introduit, à partir des années 1990,
de nouvelles directions chargées de traiter de nouveaux enjeux de politique
étrangère.
Les administrations centrales ont enfin tendance à déléguer certains pans de la
diplomatie ( comme la culture ou l’économie) à des Agences dotées d’une
certaine autonomie de gestion. En Allemagne, le Goethe Institut et en Grande
Bretagne, le British Council, sont des Agences chargées de la diplomatie
culturelle des deux pays.
- En RDC, trois Ministères ont dans leur portefeuille les attributions de la gestion
de la politique étrangères, c’est notamment le Ministère d’Etat-Ministère des
Affaires Etrangères et des Congolais de l’étranger, le Ministère de la
Coopération et de l’Intégration régionale Le Ministre des Affaires Etrangères
a rang de Vice-Premier Ministre

B. Les représentations diplomatiques et consulaires :

- Les représentations diplomatiques et consulaires sont des excroissances


adminstratives des ministères des Affaires Etarngères à l’étranger. La
représentation diplomatique, tout d’abord, est l’institution qui officialise la
présence d’un Etat accréditant auprès d’un Etat accréditaire ou d’une
Organisation Internationale.
40

- Dans le premier cas, il s’agit d’une Ambassade bilatérale. Dans le second


cas, il s’agit d’une représentation permanente ( lorsque l’Etat est membre de
l’organisation internationale concernée) et d’une mission ou délégation
permanente (lorsque l’Etat n’est pas membre de l’organisation internationale
concernée).

- Une représentation diplomatique est dirigée par un Ambassadeur : elle


jouit des privilèges et immunités reconnus par la Convention sur les relations
diplomatiques signée à Vienne en 1961. En particulier, l’Ambassade et la
représentation permanente demeurent parties intégrantes du territoire
de l’Etat accréditant conformément au principe juridique de
l’extraterritorialité. Toute intervention de l’Etat accréditaire dans l’enceinte de
l’ambassade est considérée comme une violation du droit international.

- Une représentation consulaire est une institution établie sur le territoire d’un
Etat de résidence en vue de remplir trois missions : la protection de l’intérêt
des ressortissants ; le développement des relations commerciales,
culturelles, scientifiques et économiques ; la délivrance des documenst
administratifs aux ressortissants et des documenst de voyage aux
ressortissants étrangers.

- A la différence d’une Ambassade, un Consulat n’assure pas la


représentation politique de l’Etat.
Il existe une hiérarchie dans la dénomination des représentations consulaires :
Consulat Général, Consulat, Vice-Consulat et Agence consulaire ou
Consulat honoraire. Dans ce dernier cas, la tâche y est souvent assurée par un
agent bénévole qui peut être un national expatrié ou un ressortissant de l’Etat
de résidence. Le personnel d’un poste consulaire jouit des privilèges et
immunités reconnus par la Convention sur les relations consulaires signée à
Vienne en 1963.

- La densité du réseau diplomatique et consulaire d’un Etat dépend de ses


ressources internes, mais aussi de ses ambitions de poltique étrangère. Si l’on se
limite aux seules ambassades bilatérales, Cinq (5) Etats disposent en 2017 d’un
réseau qui couvre une grande partie des 193 Etats reconnus par l’ONU : les
Etats-Unis (170 ambassades), la Chine (166 ambassades), la France (146
ambassades), le Royaume-Uni (152 ambassades) et la Russie (146 ambassades).
41

- Les petits Etats qui sont les plus nombreux, pratiquent souvent l’accréditation
multiple d’un Ambassadeur pour mieux satisfaire leur présence diplomatique.
En 2017, l’Ambassadeur du Ghana à Prague est accrédité en République
Tchèque, mais aussi en Slovaquie, en Hongrie, en Roumanie et en Macédoine.
Ses services sont dès lors concernés par les realtions diplomatiques avec cinq
pays d’Europe Entrale et balkanique.

C. Le Corps des diplomates :

- La création de missions diplomatiques permanentes à partir du XVIIè siècle


donne naissance en Europe à la profession de diplomate, exercée le plus souvent
par des représentants de la noblesse qui développent des codes communs.
François de CALLIERES, diplomate auprès de Louis XIV, auteur en 1716 d’un Traité
intitulé De la manière de négocier avec les souverains, parle des intérêts communs
des dippomates européens comme d’une véritable « franc-maçonnerie ».

- Ces liens de sociabilité entre personnes bien données donnent


naissance au concept « Corps diplomatique », dont les pratiques sont
institutionnalisées d’abord par le Vatican puis par les empires.

- Le Congrès de Vienne reconnaît en 1815 le titre « de Doyen du corps


diplomatique » attribué à l’ambassadeur ayant la plus longue ancienntneté en
poste dans un Etat.

- Le mode de recrutement des cadres de la diplomatie varie d’un Etat à l’autre.


Dans plusieurs pays, ce recrutrement se fait sur base d’un concours
(France,Etats-Unis, Brésil, Chine, Japon, Belgique…) Aussitôt, recrutés, ils
deviennet fonctionnaires de carrière. Beaucoup d’Etat opèrent un recrutement
mixte qui combien le système de carrière avec les nominations par le pouvoir
politique. Les nominations politiques concernent surtout les postes
d’Ambassadeur et sont très mal perçues par les diplomates de carrière qui y
voient une concurrence à l’obtention des postes les plus importants. Aux Etats-
Unis, la nomination d’Ambassadeurs extérieurs à la carrière est davantage
considérée comme légitime, car elle prend place dans le système dit des
dépuilles (Spoil System) qui autorise chaque Président nouvellement élu de
nommer des proches aux principaux postes de l’Etat.
42

- Dans les Etats démocratiques où il existe une diplomatie de carruère, les


gouvernements sont de plus en plus soucieux de veiller à la représentation du
corps diplomatique par rapport au corps social. Cela peut se traduire par des
politques volontaristes consistant à promouvoir les femmes ou la diversité
sociale et ethnique.

- A l’exception des Etats d’Europe du Nord, comme la Finlande et la Norvège, les


femmes sont encore ous-représentées par rapport aux hommes dans les emplois
d’encadrement des Ministères des Affaires Etrangères. Mais ces considérations
sur les Etats démocratiques ne doivent pas faire oublier que, dans nombreux
Etats non ou semi-démocratiques, le recrutement des diplomates dépend encore
essentiellement de la proximité du régime politique en place. C’est le cas de
nombreux pays du Continent africain et d’Asie centrale.

- Si les pratiques sont variables d’un Etat à l’autre, un diplomate passe en


moyenne un tiers de sa carrière à l’administration centrale et deux tiers en poste.
Lorsqu’il est en fonction au sein d’une Ambassade ou d’un Consulat, le
diplomate est exempté du paiement des taxes dans les pays de résidence, selon
les termes de deux Conventions de Vienne. Sa personne et sa famille, ainsi que
leur domicile privé, ne peuvent être perquisitionnées par les autorités du pays
de résidence. De même, le diplomate ne peut pas être condamné par un tribunal,
ce qui crée des tensions entre Etats en cas d’acte criminel. Des diplomates
responsables d’accidents de circulation ayant coûté la vie à des citoyens de pays
de résidence n’ont jamais été jugé jugés. En poste, le diplomate est souvent
mieux rémunéré qu’à l’administration centrale, car il bénéficie d’indemnités de
résidence.

- Les Ambassadeurs ne peuvent représenter leur Etat dans un autre Etat que s’ils
obtiennent d’abord un agrément et s’ils présentent ensuite leurs lettres de
créance au chef d’Etat du pays.
La réponse à une demande d’agrément intervient généralement dans une
période d’un mois. Le refus- qui se traduit en pratique par un défaut de réponse-
est une procédure très rare, qui empêche la nomination de l’ambassadeur
pressenti par son Etat. Les quelques cas de refus d’agrément qu’on a observés
le sont soit pour des raisons politiques, soit pour des raisons liées strictement
aux personnes.
43

D. Les pratiques diplomatiques

Alors que les technologies permettent une diffusion accélérée de l’information, les
pratiques diplomatiques sont soumises à des dynamiques profondes de
changement dans tous les Etats, en particulier pour ce qui concerne la collecte de
l’inforamtion et son traitement. En revanche, certaines pratiques comme la
représentation et la négociation ont peu évolué par rapport au XIXè siècle.

1. Collecte d’informations :

La collecte d’informations reste un élément essentiel du travai les Ministères des


Affaires Etrangères. Les diplomates, qu’ils soient à l’administration Centrale ou en
poste, continuent à produire un immense nombre de notes et rapports pour
informer leurs gouvernements. Il s’agit pour eux de décrypter les événements dans
d’autres Etats et au sein des Organisations Internationales, afin de faciliter la
décision de politique étrangère. Les sources d’information du diplomate restent les
échanges avec les homologues des Etats et, de plus en plus, les acteurs non
gouvernementaux, la particpation aux réunions publiques et l’analyse des médias.
Le support de communication privilégié reste le télégramme chiffré.

2. La négociation :

Soumis à la concurrence de nombreux autres ministères, mais aussi des Chefs


d’Etat et gouvernement lors de la fabrication de la politique étrangère, les
diplomates affirment volontiers que leur principale valeur ajoutée reste la maîtrise
de la négociation internationale. Les Ministères des Affaires Etrangères continuent
à beaucoup négocier au nom de l’Etat, dans un format qui est bilatéral (avec un
autre Etat) ou multilatéral ( au sein des Organisations Internationales).

Le développement du multilatéralisme depuis la fin de la seconde mondiale a


sécrété des pratiques consistant à anticiper davantage les positions d’acteurs
multiples et à construire des coalitions.
Par ailleurs, la politique étrangère (y compris dans certains Etats autoritaires) est
fabriquée par les Etats qui sont rarement des monolithes, mais plutôt des entités
segmentées reposant sur des compromis entre les Minsitères des Affaires
Etrangères et les autres ministères, les Chefs d’Etat et de Gouvernement, les
parlements, les autorités infranationales et les groupes d’intérêt. L’idée d’une
politique étrangère pilotée par le seul minstère des Affaires Etrangères relève
largement du mythe.
44

Aussi les Ministères des Affaires Etrangères consacrent-ils beaucoup de temps à


coordonner les positions de politique étrangère de leur Etat, y compris lorsque ce
dernier est centralisé. Cette coordination au sein de leur Etat occupe autant les
Ministères que les négociations avec les partenaires, faisant écho à ce que Robert
PUTNAM appelle « les jeux à deux niveaux ».

3. La représentation

Dans l’imaginaire social, le diplomate est une personne qui continue à passer
beaucoup de temps à recevoir, à être reçu et à fréquenter les événements sociaux.
Cette activité, qui a peu changé depuis le XIXè siècle, est souvent perçue comme
mondaine et peu utile. Dans les ministères des Affaires Etrangères, elle continue à
être prise au sérieux et porte un nom précis qui est la représentation.
Effectivement, cette dernière demeure une pratique importante en poste,
particulièrement dans les ambassades bilatérales où le Chef de poste et ses
collaborateurs organisent et assistent à de nombreux repas, cocktails et réceptions.
Dans ce genre d’événements, la représentation ne vise pas uniquement à créer de
la confiance avec l’Etat de résidence. Elle s’adresse à l’ensemble des acteurs sociaux
et, en particulier, au monde économique. La diplomatie économique qui vise à
faciliter le commerce et l’investissement des entreprises dans un pays de résidence
est une tâche qui occupe de plus en plus les ambassadeurs. Pour comprendre le
sens de la représentation, il faut donc dépasser le simple constat de mondanité.

2.2. Les Organisations intergournementales

A. Développement :

- L’essor des organisations intergouvernementales s’appuie en partie sur les


diverses concentrations sectorielles qui émergent à la fin à la fin du XIXè siècle.
Le développement de ces unions administratives visait alors à résoudre un
certain nombre de problèmes liés à l’intensification et à l’extension des échanges
internationaux.
En matière de commerce, de transports ou de communication, les traités
bilatéraux ne suffisaient plus : il s’agissait désormais de s’accorder sur des
dispositifs à même de s’étendre à d’autres participants.
45

- Des premières unions internationales à vocation technique apparaissent alors ,


afin de faciliter l’échange d’informations et le développement de standards
communs : -Union télégraphique (1865), Comité Météorlogique
Permanent (1874), Union de mètre (1875), Union de la Propriété
Industrielle (1883), instauration du méridien de Greenwich comme
« méridien zéro »(1884), Union de la propriété littéraire (1886), Union
pour le transport de marchandises par le Chemin de fer (1890).

- Ces coopérations sectorielles restaient cependant éminemment fragiles : elles


présentaient des degrés variables d’institutionnalisation et regroupaient bien
souvent des experts techniques à défauts de représentants politiques de leurs
Etats membres.

- L’approfondissement du multilatéralisme au XXè siècle doitse lire dans la


continuité de ces initiatives. La création de la Société des Nations (SDN) en 1919
et plus encore celle de l’Organisation des Nations Unies (ONU) en 1945
marquent cependant une nouvelle ère d’institutionnalisation et de politisation
des Orgnaisation Internationales. La concertation multilatérale ne se réduit
désormais plus à de seules ambitions fonctionnelles mais relève d’un principe
dynamique et politique de coopération, tourné vers la recherche d’objectifs
convergents et d’intérêts communs. Les Organisations Intergouvernementales
connaissent alors un essor quantitatif et qualitatif spéctaculaire : leur nombre,
leur composition et leurs missions s’élargissent simultanément.

B. Missions des Organisations Intergouvernementales

- Les Organisations Intergouvernementales poursuivent quatre missions


essentielles :

- Définir les droits de leurs membres et leurs modalités d’exercice. A


l’image de l’ONU et de la norme de souveraineté ou de l’Organisation Maritime
Internationale et du droit de la mer, les organisations internationales se présentent
commes les garantes du droit international ou de certaines de ses dimensions.

- Faciliter l’échange, le recueil et la diffusion d’informations, de


nombreuses organisations pour permettre une gestion concertée des biens
publics mondiaux ( Organisation Mondiale de la santé – OMS-, Organisation des
Nations Unies pour l’Education- Unesco).

- Apporter l’assistance en contribuant au redressement des pays les


moins avancés et/ou en situation post-conflit (Fonds Monétaire
International- FMI-, Banque Mondiale, Banque européenne pour la
reconstruction et le développement- BIRD)
46

- Prévenir et Gérer les conflits ( Union Africaine, Communauté des Etats


de l’Afrique de l’Ouest, SADC, etc.)

C. La représentativité des Organisations intergouvernementales

- Le droit international a contribué, bien que tardivement, à l’affirmation des


Organisations Intergouvernementales en leur reconnaissant la personnalité
juridique.
- Au début du XXè siècle , la doctrine majoritaire en l’envisageait absolument
pas : les Etats avaient le monopole de la personnalité juridique internationale et
les Organisations Intergouvernementales ne pouvaient avoir l’existence
autonome, distincte de celle de leurs membres.
- La plupart des traités institutifs récents reconnaissent expressement la
personnalité juridique aux Organisations Intergouvernementales. En l’absence
de reconnaissance explicite dans les traités, la personnalité juridique des
Organisations Intergouvernementales est présumée, jusqu’à ce que l’examen des
termes de leur traité institutif confirme ou infirme cette présomption.

- Les Organisations Intergouvernementales constituent donc, au côté des


Etats, des personnes morales, des sujets de droit international public,
avec cette double signification : elles sont à la fois dotées d’une capacité
juridique et soumises au droit.

- Les Organisations Intergouvernementales tirent de leur traité institutif ,leur


personnalité juridique, leurs compétences qui leur permettent de conclure des
traités avec leurs Etats membres, des Etats tiers et d’autres Orgainsations
Intergouvernementales, d’adopter des actes juridiques unilatéraux, de porter
des réclamations internationales pour les dommages subis, etc.

- A la différence des Etats qui naissent d’un fait (la réunion d’un territoire,
d’une population et d’une autorité politique exclusive) et jouissent d’une
capacité juridique primordiale et plénière (liée à eur souveraineté), les
Organisations Intergouvernementales sont le fruit d’un acte juridique,
qui ne leur accorde qu’une capacité fonctionnelle, finalisée au regard
des buts qui leur sont assignés par les Etats qui les créent.

- Les Organisations Intergouvernementales paraissent donc des sujets de droit


secondaires, dont les compétences sont gouvernés par un principe de spécialité.
47

D. Les Organisations intergouvernementales dans les processus de


négociation

- Dans le processus de négociation, les Organisations Intergouvernementales


occupent une place duale. Elles constituent à la fois, l’espace où se déploient
les négociations multilatérales, et un acteur de plus en plus autonome, à même
de peser à la fois sur les objets et sur les pratiques des négociations par
l’entremise de leurs secrétariats généraux.

- La compétence capitalisée par certains Organisations Intergouvernementales,


ou l’importance des pouvoirs qui leur sont conférés, autorise aussi parfois les
Organisations Intergouvernementales à investir une fonction quasi législative
vis-à-vis de leurs membres.

- Parfois, les Organisations Intergouvernementales participent elles-mêmes


directement aux processus normatifs internationaux en prenant part aux
négociations en leur qualité de sujets de droit.

- Dans le cadre de leurs compétences, elles peuvent ainsi se lier par convention à
des Etats, y compris aussi tiers à l’organisation. L’Union Européenne est par
exemple engagée dans environ 140 Accords commerciaux ; elle est memebre de
l’OMC depuis le 1er janvier 1995 ; le 12 décembre 2015, elle a ratifié l’Accord de
paris sur le Climat. Les institutions multilatérales ne sont pas sans incidence sur
les négociations qu’elles peuvent contribuer à entreprendre et/ou auxquelles
elles peuvent plus directement participer.

2.3. Les diplomaties supra- étatiques

Aucours des dernières décennies, les Organisations internationales régionales ou


globales se sont établies comme des instruments majeurs de production et de mise
en œuvre des biens public supra-étatiques.

La prolifération des Organisations internationales (et l’augmentation de leur


champ de responsabilité) a été accompagnéd’une émergence continue d’acteurs
diplomatiques localisées en dehors des gouvernements nationaux et opérant à la
place au sein de structures supra-nationales.

Ces fonctionnaires internationaux qui sont basés dans et travaillent pour une
Organisation internationale ont un rôle actif dans la formulation de politiques
publiques multilatérales.
48

Toutefois, leur indépendance est variable que l’on se place sur le plan des structures
organisationnelles formelles ou sur celui des structures organisationnelles
informelles. Toutes les Organisations internationales ne disposent pas d’une large
bureaucratie, mais beaucoup ont obtenu une délégation d’autorité leur permettant
de contribuer de manière substantielle au développement et à la mise en œuvre
d’un agenda de politiques publiques, ce qui leur a donné une influence sur le
processus de prise de décision dans son ensemble.

Le Néofonctionnalisme et l’intégration des diplomaties nationales :

Le néofonctionnalisme (conceptualisé par Ernst Haas dans son ouvrage de 1958, The
Uniting of Europe) est une évolution du fonctionnalisme, une approche initialement
proposée par David Mitrany.

Ce dernier pensait qu’un système toujours plus étendu d’Organisations


internationales gérées par des experts pouvait être une force transformatrice au sein
du système international et surpasser les logiques nationalistes compétitives.

Haas reformula cette cette vision technocratique et élitiste en une approche plus
politique, étudiant les multiples manières dont les intérêts sectoriels sub-nationaux,
toujours en compétition ou en coopération entre eux, pouvaient être réconciliés à
travers l’intervention créative d’acteurs technocratiques supranationaux.

Le néofonctionnalisme est une approche difficile à classifier selon les


critères habituels, car elle emprunte à la fois aux théories des relations
internationales et à la politique comparée. Le néofonctionnaire reconnaît
l’importance fondamentale du rôle des Etats, notamment lors de la création
des organisations internationales ou lors des renégociations des traités.
Néanmoins, il met également l’accent sur deux catégories d’acteurs non
étatiques qui mettent en œuvre une dynamique en faveur de plus
d’intégration :
▪ les groupes d’intérêt et les mouvements sociaux transnationaux qui se
forment à une une échelle régionale ;
▪ les secrétaires internationaux des organisations.

Selon cette approche, l’intégration régionale est forcément un processus


conflictuel et sporadique, fait de Va-et- Vient. Mais l’approche considère
que des gouvernements démocratiques et pluralistes dirigeant des
sociétés complexes vont graduellement se trouver soumis à des
dynamiques économiques, politiques et sociales à l’échelle d’une région,
et vont résoudre leirs différents en acceptant de déléguer un certain
nombre de compétences à des entités supranationales.
49

2.4. Les diplomaties sub-étatiques

A. Qu’est-ce que la diplomatie sub-étatique ?

La diplomatie sub-étatique désigne l’ensemble des activités extérieures entreprises par


des entités infra-étatiques. C’es le moyen par lequel les régions, les parlements et les
Collectivités territoriales mettent en œuvre leurs agendas au-delà des frontières
nationales. Certains parlent à ce sujet de paradiplomatie, de diplomatie à paliers
multiples, de protodiplomatie ou encore de microdiplomatie.

B. Diplomatie sub-étatique, paradiplomatie et protodiplomatie

Paradiplomatie et diplomatie sub-étatique sont souvent utilisées de manière


interchangeable. C’est le cas lorsqu’on définit la paradiplomatie comme « les activités
internationales des entités sub-étatiques. Cependant beaucoup d’autres auteurs réduisent
cette sorte de diplomatie en la définissant comme « l’action extérieure des gouvernements
infra-étatiques »
Un concept connexe également utilisé est celui de « protodiplomatie ». Ce terme décrit la
politique étrangère d’un Etat sub-étatique qui cherche à entreprendre une sécession » elle
se distingue du concept précédent par son objectif qui est de passer de l’autonomie interne
à la souveraineté internationale.

C. Diplomatie sub-étatique, diplomatie parallèle et diplomatie à paliers


multiples

Dans une perspective comparative, la diplomatie parallèle suppose une conduite


indépendante et non concentrée de l’action extérieure portée par des entités infra-
étatiques. Elle porte l’idée de l’éclatement de la politique étrangère d’un Etat. C’est
notamment le cas lorsqu’un exécutif régional suit une ligne différente et même
contradictoire par rapport à celle proposée par le gouvernement central. En révanche,
l’idée de diplomatie à paliers présente l’activité extérieure d’un Etat comme une politique
publique pensée et unifiée où différents acteurs nationaux et sub-nationaux négocient et
s’accordent sur les orientations. Chacun des acteurs joue alors sans sa partition sans
empiéter sur le domaine de l’autre. On se rapproche ici du partage de compétence en
matière de politique étrangère. Cela traduit l’idée que les relations internationales des
unités sub-africaines sont « le fruit de stratégies formellement élaborées et convergentes ».
50

D. Les Diplomaties sub-étatiques : diversité des acteurs et d’instruments :

On ne peut parler de façon générale et indifférenciée de l’action diplomatique des entités


sub-étatiques. Disctinction doit être faite entre les Collectivités territoriales des Etats
Unitaires et les entités étatiques réunies dans les Etats fédéraux. Il faut tenir compte
également du mode de partition des compétences et du mode d’exercice de la tutelle
étatique, qui varient considérablement d’un Etat à un autre en fonction des
particularismes historiques. Il faut prendre en considération enfin le type de pouvoir
impliqué dans ces échanges diplomatiques : pouvoir excéutif, s’il s’agit d’un
gouvernement local, ou pouvoir législatif, s’il s’agit d’un parlement régional.

Dans ce point, nous nous penchons successivement sur trois types d’acteurs de la
diplomatie sub-étatique : les gouvernements des régions, les parlements et les
collectivités locales. Chacun de ces acteurs se caractérise par des pratiques
diplomatiques qui sont propres.

0. La diplomatie des régions :

- Parmi les différentes types d’acteurs sub-étatiques, les régions-comprises ici


comme les entités fédérées ou les territoires disposant d’un statut d’autonomie
spécifique dans certains Etats unitaires (comme La Catalogne en Espagne) –
sont les premières à avoir engagé une diplomatie parallèle à celles des Etats et
à avoir attiré l’attention des cheercheurs. C’est pourquoi la diplomatie des
régions est celle qui est le plus souvent associée au terme : « paradiplomatie ».,
d’autant plus qu’elle est parfois le fait d’entités fédérées qui revendiquent une
plus grande autonomie sur la scène internationale, voire leur indépendance.

▪ Principaux acteurs et intensité de la diplomatie des régions :

- Au début du XXIè siècle, certains spécialistes avançaient le chiffre de 350 entités


régionales actives sur le plan international. Les provinces canadiennes, les Etats
américains, les Länder allemands et les Cantons suisses ont intensifié leur
présence internationale à partir des années 1960, ils ont été rejoint dans la suite
par les Länder autrichiens, les régions et communautés belges, les Etats
australiens et les Communautés autonomes espagnoles.
- On trouve également des exemples de diplomatie régionale en Asie Sud-Est, en
Asie Centrale, en Amérique Latine et en Afrique. Les situations de ces régions
sont très variables d’un pays à l’autre, voire même à l’intérier d’un même pays.
51

▪ Les Instruments de la diplomatie régionale :

✓ La représentation :

- Les formes que prend la politique étrangère des Etats fédérés sont nombreuses.
En effet, à l’exception du recours à la force militaire, qui reste une prérogative
exclusive de l’Etat souverain, la gamme des outils et instruments diplomatiques
utilisés par les entités régionales est aussi large que celles des Etats.

- Les plus courants de ces instruments sont les réseaux de représentation et de


délégation nà l’étranger, qui permettent d’établir un contact permanent avec un
pays, une région ou une institution internationale. En fait, les réseaux des entités
régionales peuvnet parfois être plus importants que ceux des Etats souverains.
Ainsi, parmi les régions les plus actives sur la scène internationale, la Flandre
compte aujourd’hui une centaine de représentations à l’étranger, la Catalogne
une cinquante et le Québec 26.
A titre de comparaison, Israël en compte une centaine, la Cpote d’Ivoire, la
Finlande et la Corée du Nord une cinquantaine.

✓ Traités, Accords ou Ententes :

Des traités, accors ou « ententes » peuvent également être négociés entre ces
régions ou entre une région et un Etat souverain. Le Québec, très actif sur ce plan,
a conclu plus de 755 ententes internationales dont 388 sont toujours en vigueur,
comme l’entente franco- québécoise sur la reconnaissance des qualifications
professionnelles signée en 2008, ou encore l’entente portant sur le développement
de la coopération en recherche industrielle et en innovation technologique signée
en 2017 avec l’Israël

✓ La délégation :

Certaines régions participent, au sein de la délégation de leurs pays, à des


rencontres dans des grandes organisations et institutions internationales telles que
l’Organisation des Nations Unies (ONU), l’Organisation Mondiale du Commerce
(OMC) ou encore l’Union Européenne. Parfois une entité fédérée peut même être
membre de plein droit d’une organisation internationale, comme le Québec au sein
de l’organisation internationale de la Francophonie (OIF), ce qui permet
d’influencer directement des décisions dans de nombreux domaines.
52

✓ Les Missions d’étude et de prospection :

Les missions d’étude et de prospection à l’étranger, le financement de campagnes


de relations publiques pour accroître leurs exportations et attirer les
investissements, l’organisation des visites officielles pour accueillir les leaders
d’autres pays ou régions, ou encore la mise en place d’institutions de coopération
régionales ou transrégionales comlètent cette liste non exhaustive des instruments
utilisés par les régions pour accrître leur influence sur le plan diplomatique.

1. La diplomatie parlementaire des régions :

- Si à l’origine les relations internationales constituaient un domaine dans lequel


la marge de manœuvre des parlements était limitée, ces derniers ont réussi
progressivement à investir ce champ. En effet, de nombreux parlements
entretiennent aujourd’hui des liens avec l’extérieur, que ce soit dans le cadre
bilatéral ou au sein d’institutions parlementaires multilatérales.
- Bien connue pour sa fonction législative et de contrôle des actions du
gouvernement à l’échelle interne, l’institution parlementaire connaît ainsi un
rôle en plein essor sur la scène internationale, au point qu’on peut
incontestablement parler aujourd’hui d’activités des parlements.
- Depuis une trentaine d’années, ces activités qu’ils mènent en marge et en
complément de la diplomatie gouvernementale constituent ce qu’il est convenu
d’appeler : « la diplomatie parlementaire.

▪ Instruments de la diplomatie parlementaire :


- Les parlements connaissent une multitude de canaux à travers lesquels ils
échangent avec l’extérieur. On peut les diviser en deux catégories : les canaux
bilatéraux et les canaux mulylatéraux

Les canaux bilatéraux (groupes d’amitié, visites , rencontres) :

- Parmi les formes que peuvent prendre les échanges diplomatiques entre
parlements, les groupes d’amitiés sont sans doute la plus fréquente. Il s’agit
d’un groupe ayant pour but de tisser des relations diplomatiques avec les
parlementaires d’un Etat ou d’une région donnée, à travers des échanges, des
missions, des colloques, l’entretien d’un réseau d’influence ou encore des
interactions entre des personnalités et ces groupes.

- Outre les groupes d’amitié et les commissions interparlementaires, les visites


et rencontres entre parlementaires de différents pays et régions s
multiplient ces dernières années, encouragées par la mondialisation et la facilité
des communications.
53

- Généralement, c’est le président de l’Assemblée Nationale et le Président du


Sénat qui incarnent cette forme de diplomatie parlementaire . Les présidents des
assemblées parlementaires reçoivent ainsi de nombreuses personnalités
effectuant un voyage officiel ou une visite d’Etat, tandis qu’eux-mêmes se
rendent fréquemment à l’étranger, à titre égalment officiel, pour rendre visite à
leurs homologues ou renforcer les liens entre parlements. Là encore, il est
difficile de juger de l’influence et de la portée de ce type de rencontre, la part de
l’entretien protocolaire étant souvent assez importante.

Les canaux multilatéraux

- La Coopération interparlementaire, c’est-à-dire les différents actions qui


contribuent, d’une manière ou d’une autre, à la diplomatie parlementaire, passe
par des assemblées parlementaires internationales.
- Ces organisations multilatérales se caractérisent par leur grande diversité, tant
sur leurs intérêts thématiques, leurs objectifs, leurs structures que leurs
méthodes de travail.
- La doyenne de ces assemblées parlementaires internationales est l’Union
Interparlementaire qui, depuis, 1889, fait office d’organisation mondiale des
parlements des Etats souverains. Mais dans la liste des Organisations au sein
desquelles les parlemenst des entités sub-étatiques sont paticulièrement actifs,
on pourra citer notamment l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie
(APF) et la Conférence des Assemblées Législatives Régionales
Européennes (CALRE).

- L’APF est un Organise Consultatif de la francophonie dont les objectifs


vont du rayonnement de la langue française à la promotion de la
démocratie et des droits de l’homme. On y trouve le Canton de Jura, le
Canton de Vaud, le Québec, Manitoba, la Nouvelle Ecosse ou encore Ontario.

- CALRE réunit pour sa part les présidents des assemblées


parlementaires régionales qui en commun de disposer de pouvoirs
légisaltifs et d’appartenir à des Etats membres de la Communauté
Européennes., notamment les Communautés autonomes d’Espagne, les
régions d’Italie, les régions et communautés de Belgique, les Länder autrichiens
et les Länder allemands. Ses objectifs vont de la promotion du rôle des
parlementaires régionaux au sein de l’Union Européenne à la défense
des valeurs et principes de la démocratie régionale et à la promotion de
la coopération et de l’échange d’expériences entre ses membres.
54

2. La diplomatie des Collectivités locales

- Le terme de « collectivité locale « peut avoir des significations légèrement


différentes en fonction de la culture politique et du degré de centralisation des
Etats. Dans le monde anglophone,on parle pltôt de local government. Dans
notre cours, nous utilisons une définition assez générale qui comprend les
collectivités locales comme une partie du territoire d’un Etat qui dispose
d’une certaine autonomie de gestion – même partielle-, certaines
compétences lui étant dévolues par l’Etat dans un processus de
décentralisation.
Les Collectivtés locales peuvent notamment être des Communes ou
municipalités, des départements, des cercles ou des régions (s’il s’agit
d’un Etat unitaire).

- Parfois qualifiée de « diplomatie territoriale », l’action diplomatique de ces


Collectivités trouve son origine dans la politique des jumélages franco-
allemands née au lendemanin de la seconde guerre mondiale, et dont l’objectif
était la réconciliation
- En se penchant sur les jumélages noués entre communes de part et d’autre du
Rhin, des chercheurs ont mis en exergue le poids des acteurs privés et des
assocaitions locales pour faire advenir un rapprochement durable entre les deux
pays, illustrant dès sa création le rôle important que pouvait être amené à jouer
cette diplomatie territoriale.

- Favorisée par la globalisation et le processus d’intégration européenne depuis


1980, l’action internationale des Collectivités locales s’est largement développée
ces dernières décennies. Elles sont de plus en plus nombreuses à agir sur la
scène mondiale, dans des domaines très divers.

- Au-delà des relations bilatérales nouées avec d’autres collectivités locales


étrangères, dans le cadre d’abord des jumelages puis, plus largement, de la
coopération décentralisée (un terme qui désigne toutes les realations d’amitié,
de jumelage ou de paternariat nouées entre les collectivités locales des pays
différents), les gouvernements locaux s’associent aujourd’hui dans de multiples
réseaux internationaux comme l’Association Internationale Villes et Ports
(AIVP), le Résaeu mondial des villes portuaires, ou Cités et Gouvernements
Locaux Unis (CGLU), la principale organisation mondiale des villes jumelées
qui agit notamment dans les domaines de la démocratie locale, de la
décentralisation et de la Coopération décentralisée. Ces Collectivités et ces
réseaux sont aujourd’hui en quête de reconnaissance internationale auprès des
Organisations régionales et d’Organisations internationales.
55

CHAPITRE III : LA DIPLOMATIE ECONOMIQUE COMME INSTRUMENT DE


REGULATION DE L’ORDRE ECONOMIQUE INTERNATIONAL.

- La pratique diplomatique a opéré une mutation majeure dans les dernières


décennies, voyant ses objectifs se tourner vers l’économie, le commerce et
les intérêts du secteur privé. De nouveaux acteurs ont également fait leur
entrée sur la scène diplomatique, à l’instar de l’Union européenne. Les
thématiques économiques sont désormais devenues centrales, tant et si
bien que le terme de diplomatie économique est aujourd’hui
fréquemment utilisé dans la presse ou par les institutions et
représentants politiques.
- Si la pratique de la diplomatie fut longtemps le monopole des États, de
nouveaux acteurs internationaux comme l’Union européenne ont depuis fait
leur apparition. Comment la pratique de la diplomatie a évolué au cours des
siècles ? Comment définir la diplomatie économique ? Comment caractériser la
diplomatie économique ? C’est à ces deux questions que nous allons tenter de
donner quelques éléments de réponse.
-
2.1. Qu’est-ce que la Diplomatie Economique ?

- La diplomatie s’oriente de manière croissante vers l’économie. Reste à définir


un peu plus précisément la notion de diplomatie économique. Le dictionnaire
de diplomatie de Berridge et James nous propose deux définitions.

- Il s’agit d’abord de la « diplomatie qui concerne les questions de politique


économique, incluant le travail des délégations à des conférences telles
que celles organisées par des organismes comme l’Organisation
mondiale du commerce. Bien que distincte de la diplomatie commerciale
ayant cours lors de missions diplomatiques, elle englobe également
l’activité de suivi et le rapportage sur les politiques économiques dans
les pays tiers ainsi que les conseils sur les meilleurs moyens de les
influencer ». Une deuxième acception de la diplomatie économique renvoie à
la « diplomatie qui utilise les ressources économiques - tant les récompenses que
les sanctions - dans l’optique de la poursuite d’objectifs particuliers de politique
extérieure. »

- La limite entre la diplomatie « politique » traditionnelle et la diplomatie


économique est parfois complexe à distinguer si bien qu’il devient difficile de
déterminer l’existence d’une ligne de division pertinente entre les deux. Comme
l’évoquent Lee et Hocking : l’origine de la diplomatie dans beaucoup de
pays, dès le Moyen-âge, est liée à l’entretien de relations cordiales en
vue, notamment, de faciliter le commerce.
56

- Une caractéristique valable aujourd’hui : pour preuve, ministères des Affaires


étrangères et ministères du Commerce ont été fusionnés dans plusieurs pays à
l’instar de l’Australie, du Canada ou de la Belgique, témoignant du
rapprochement des missions de ces deux entités et de l’effacement de la
frontière entre diplomatie traditionnelle et diplomatie économique.

- Guy CARRON DE LA CARRIERE (1998) définit la diplomatie économique


comme une diplomatie commerciale qui protège l’économie, sert et se
sert de l’économie. La diplomatie utilise l’économie et l’économie se met au
service de la politique étrangère, c’est leur troisième point de contact. A cela, il
n’y a rien de surprenant étant donné la place qu’occupe l’économie dans toutes
les régions du monde, mais rien de nouveau non plus car depuis longtemps la
diplomatie est agissante de manière universelle. Toutefois, l’arme économique
de la diplomatie est le maintien par un gouvernement de ses moyens
d’intervention économique pour parvenir à ses fins. Il peut s’agir d’une faveur,
comme une aide financière et un privilège douanier, d’une sanction ou d’une
manifestation d’hostilité sous forme, par exemple, d’une guerre tarifaire, d’un
embargo ou d’un blocus.

2.2. Du point de vue des Etats :

- Pour le Service Public Fédéral « Affaires Etrangères, Commerce Extérieur et


Coopération au Développement » belge, la diplomatie économique consiste à
« promouvoir les intérêts économiques belges à l’étranger » par
plusieurs moyens, comme « le soutien du secteur privé belge lors
d’activités internationales », de « missions économiques princières » ou
de « visites d’État et ministérielles. […] La Belgique est également promue
sur le plan international en tant que lieu propice à y effectuer des affaires »

- Le Ministère des Affaires Etrangères Français apporte également quelques


éléments : « La diplomatie économique française poursuit trois objectifs
principaux, qui sont complémentaires : soutenir nos entreprises sur les
marchés extérieurs ; attirer vers notre pays des investissements
étrangers créateurs d’emplois, mieux adapter le cadre de régulation
européen et international à nos intérêts économiques défensifs et
offensifs. ».
57

- Deux chercheurs belges VAN BERGEIJK et MOONS précise que « la


diplomatie économique consiste en un ensemble d’activités visant les
méthodes et procédés de la prise internationale de décision et relatives
aux activités économiques transfrontières dans le monde réel. […] Elle a
comme champs d’action le commerce, l’investissement, les marchés
internationaux, les migrations, l’aide, la sécurité économique et les
institutions qui façonnent l’environnement international, et comme
instruments les relations, la négociation, l’influence ».

- Le Département d’État américain expose également sa vision : « La diplomatie


économique consiste à la fois en la captation des dynamiques de
l’économie mondiale pour améliorer la politique étrangère américaine et
aussi à utiliser les outils de la politique extérieure pour consolider la
force économique des Etats-Unis »

- Au regard de ces définitions, nous pouvons déduire que la diplomatie


économique aurait trois fonctions principales : (i) Faciliter les débouchés des
entreprises nationales à l’étranger, (ii) Attirer les investisseurs
extérieurs sur le territoire domestique et (iii) Infléchir les règles
internationales dans le sens des intérêts domestiques.

- La diplomatie économique touche à des domaines divers et variés comme : le


commerce, l’investissement, les migrations, l’aide au développement, et
utilise comme outils les relations, l’influence et la négociation.

2.3. Les Méthodes et Stratégies de la Diplomatie Economique :


- Les outils économiques de la diplomatie sont variés :
✓ Une présence qui sera vecteur d’influence,
✓ Une position de créancier qui justifiera l’usage de moyens de
pression,
✓ Un avantage financier ou technique qui permettra d’être écouté
et entendu,
✓ Une capacité d’investissement qui se traduira en influence, en
définitive,
- Toutes les situations qui pourront être exploitées par un pays pour renforcer sa
main des relations interétatiques. C’est ainsi donc, non seulement la politique
des échanges commerciaux et d’investissement financiers extérieurs est
concernée par cette forme de diplomatie mais aussi et surtout la politique de la
coopération dans toutes ses formes : régionales, internationales, sud-sud et
Nord-sud, etc.
58

2.4. Globalisation et Diplomatie Economique :

- Avec la globalisation de l’économie internationale, c’est-à-dire avec l’effacement


des barrières qui séparent économie intérieure et économie extérieure d’un
pays, la diplomatie économique a ajouté les échanges économiques sous toutes
leurs formes aux relations commerciales qui ont constitué son premier champ
de compétence , mais elle a été amenée à prendre aussi en charge les multiples
autres relations , de toutes natures, qui se sont créées entre Etats, puis à
s’occuper du bon fonctionnement du régime de liberté et de concurrence qui
régit ces relations. La diplomatie poursuit donc trois centres d’intérêt que sont
la diffusion de l’économie de marché, la prospérité des partenaires et
l’équilibre économique mondial.

- La diplomatie économique s’est donc construite un nouvel univers fait des


rencontres et d’institutions. De ce fait, elle semble avoir pris une autonomie de
mouvement qui va au-delà de la seule spécialisation, non pas qu’elle soit
étrangère aux autres aspects des relations interétatiques et notamment
à la diplomatie politique pure qui, en définitive, trace les orientations
fondamentales, mais elle impose ses rythmes, ses lieux et ses problématiques.
La diplomatie économique se doit donc de déborder le cercle classique de la
diplomatie traditionnelle animée par les seuls agents (diplomates) des
ministères des affaires étrangères pour apporter l’expertise technique singulière
et nécessaire dans ces sommets et ces organisations où les problématiques
posées ne se discutent pas qu’entre diplomates.

- Cette diplomatie constitue donc une dimension transversale dans la


conduite de la politique des affaires étrangères dont le but ultime est de
faire triompher les intérêts nationaux à l’extérieur. Les échanges
commerciaux et économiques étant un des canaux privilégiés de ce mode
opératoire, l’intégration de la dimension économique dans le grand dispositif
de la polits affaires étrangères ne serait qu’une orientation relevant du bon sens.
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3.5 La diplomatie économique et le Diplomate :

- Les Ministères des Affaires Etrangères sont responsables de l’ensemble de la


politique étrangère d’un pays et l’une des prérogatives qui en résultent est celle
de délivrer les pouvoirs requis pour signer un accord international mais ils n’ont
pas pour autant la compétence exclusive sur l’ensemble de conclusion des
accords. La répartition des négociations et des signatures peut donc être sujet
de discussion, voire de tiraillement avec les autres départements ministériels et
ces rivalités se règlent au cas par cas.
- Cependant, Il serait raisonnable d’attribuer l’ensemble des affaires financières
et, par extension, des questions économiques, au ministre de l’Economie et des
Finances, quand il s’agit de négociations multilatérales (FMI, BIRD, OMC,
CNUCED, etc.) ou de discussions bilatérales sur l’Aide, la fiscalité, la protection
des investissements, etc. En effet, les Ministères des Affaires Etrangères ne sont
pas absents de ce vaste domaine et font valoir que son importance croissante
devrait entraîner une implication grandissante, il n’en reste pas moins que ce
sont les Ministères (éventuellement de l’Economie ou encore du Commerce
Extérieur) qui sont chefs de file et qui, habituellement, signent.
- La situation de la diplomatie économique est donc particulière et se manifeste à
deux niveaux : d’une part ses acteurs ne sont pas que des diplomates et d’autre
part les Ministères des Affaires Etrangères n’en ont pas le monopole. Cette
particularité plaide une intégration judicieuse des ministères
stratégiques de la diplomatie économique au sein d’un méga ministère
incluant aussi les Affaires Etrangères.

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