Manuel Denseignement Sur La Sexualite
Manuel Denseignement Sur La Sexualite
Introduction
Essai de définition du terme : Du Latin sexus, le mot sexe, désigne l’ensemble des
caractères qui permettent de distinguer chez la plupart des êtres vivants le genre mâle et le
2
genre femelle. Il désigne aussi tout ou une partie des organes génitaux1. Le concept
« sexualité », par contre, désigne l’ensemble des phénomènes liés au sexe observable chez
les être humains ; il désigne l’ensemble de diverses modalités de la satisfaction instinctuelle
liée à la reproduction de l’espèce2. Cette définition souligne deux expressions au contenu
important, à savoir « ensemble de phénomènes liés au sexe » ou « ensemble de diverses
modalités de la satisfaction instinctuelle ». Chacune des deux expressions indique un paquet
de réalités qui consistent soit en attitude, soit en comportement, soit en acte chez les êtres
humains.
A la lumière de ces éléments, Muldworf propose une définition de la sexualité comme
fonction de reproduction, comme source de la vie affective, ou comme communication
érotique 3. Mais plus que cela, Luc-Marie Perrier propose une autre définition en ces termes :
« La sexualité est donc un concept large désignant une personne humaine dans sa
spécificité masculine ou féminine au cœur des relations sociales, au cœur de sa vie sociale,
économique, politique »4.
Théologie de la sexualité, quant à elle, est le discours de Dieu au sujet de la
sexualité. Elle est la façon logique et raisonnée de dire les données de la révélation au sujet
de la sexualité du point de vue de Dieu.
1
Dictionnaire Le Petit Larousse 2008 Multimedia. CD-ROOM PC.
2
Ibid.
3
Muldworf, cité par L’Association des Moralistes zaïrois, Morale et société zaïroise; actes de la première
rencontre des moralistes zaïrois du 1er au 4 Novembre 1978, (Etudes des moralistes zaïroises, Kinshasa :
Association des Moralistes Zairois, 1988), p. 57-58. A cela, il ajoute ceci : « La sexualité est à ce qu’il nous
semble, un dynamisme portant l’homme vers la femme et celle-ci vers l’homme en vue de se compléter
mutuellement, car l’homme et la femme sont chacun incomplets en eux-mêmes ».
4
Luc-Marie Perrier, Cours de Théologie morale sexuelle, dispensé à l’Institut Catholique de Bouar, 2008, p. 2.
5
Gn 1. 26-27.
6
Luther, Œuvres, tome III (Genève : Labor et Fides, 1963), p. 226.
3
montre qu’il est créé pour être ouvert à l’autre, partant aux autres. Cette ouverture à d’autres
se montre premièrement dans le mariage, ensuite dans d’autres relations. De par son statut
d’être créé à l’image de Dieu, celui qui est amour et qui aime d’un amour premier, la vocation
à l’amour est inscrite dans le cœur de l’homme. C’est pour cela que Luc-Marie Perrier dit :
« Il n’y a pas de raison rationnelle de l’amour. Nous sommes dans l’ordre du mystère, de
l’inexplicable, de l’ailleurs »7.
Le sexe de l’être humain est une création de Dieu qui la revêt de toute sa beauté et
sa bonté pour sa propre gloire. « Et cela lui a tellement plu qu’il en a dit lui-même que c’était
une très bonne créature »8, témoigne Luther. Que l’homme ne le diabolise pas dans la
mesure où le processus de sexualisation est si important que Dieu en rend l’homme
conscient et son mécanisme de fonctionnement ne dépend pas de la science. Créés des
êtres sexués par Dieu, l’homme et la femme ont la vocation d’achever leur humanité à deux,
la bénédiction et la permission de procréer ou de reproduire d’autres espèces humaines9.
b) Différentiation sexuelle
Il est écrit : « L’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme, et ils
deviendront une seule chaire »10. Il y a la différentiation de genres, mais il y a aussi
l’obligation de vivre cette différentiation dans l’acceptation l’un de l’autre, dans l’unité et la
profondeur affective, dans l’intégration l’un de l’autre dans le projet individuelle de vie. Car,
Dieu ne s’est pas trompé en différentiant les sexes ; une différentiation dans l’unité
harmonieuse. Dieu leur accorde toute leur importance. L’homme ne pourra jamais être
autrement que ce qu’il est ; il en va de même de la femme.
Bien plus, Augustin affirme : « Ils sont deux en une seule chair »11. Ce qui importe ici
est la bisexualité de la structure fondamentale de l’être humain. « Il n’existe pas d’être qui ne
soit homme ou femme. La division des sexes est non seulement un donné biologique, mais
ontologique », témoigne Robert Grimm12. « Il les créa homme et femme » est une parole
délibérative qui indique la pluralité d’êtres dans l’unité observée à l’origine. Luther écrit : «
Cette parole nous donne la certitude que Dieu a partagé les hommes en deux catégories et
a voulu qu’il y ait homme et femme, ou Il et Elle »13. Karl Barth renchérit : « L’être humain est
homme et femme […] La différentiation sexuelle est justement la seule dans laquelle
l’homme soit créé »14. L’homme a de commun avec les animaux cette différentiation
sexuelle, cependant ce qui le distingue de ces derniers est qu’il est l’image et le reflet de
Dieu. Crée à limage de Dieu, l’être humain a le devoir de bien gérer la sexualité.
son fils Isaac. La fille également est consultée par ses parents devant des témoins ; elle
donne son accord et reçoit la bénédiction de ses parents qui approuvent son mariage. Le
mariage de Rébecc a et Isaac reçoit honneur et bénédiction de tous.
Gn 29.14-20: Jacob a identifié Rachel dans la campagne révélant à ses yeux des
vertus. Il ne s’est pas jeté sur elle pour la violer ou la prendre pour femme à l’insu des
parents simplement parce qu’il l’a trouvée sur son chemin. Jacob est venu exprimer son
sentiment et son désir à Laban, le père de la fille, et demande officiellement sa main contre
les années de service que lui-même a fixées. Pendant ses années de service, il avait toutes
les occasions pour violenter Rachel, mais il s’est gardé chaste, maîtrisant ses passions
jusqu’à honorer totalement son engagement vis-vis- de la belle-famille et devant Dieu.
Mt 1.18-25 : Deux jeunes son reconnus fiancés, Joseph et Marie ; ils gèrent leurs
fiançailles dans la crainte de Dieu. Les deux se gardent chastes pour honorer les normes
sociales et celles de la loi divine. Curieusement, Joseph découvre un jour que sa fiancée est
enceinte. Il se propose de rompre discrètement leur lien sans diffamer sa fiancée et sans
compromettre son témoignage. Seule l’intervention de lange de Dieu l’a rassuré et
encouragé à s’assumer vis-à-vis de Marie qu’il a prise pour femme, mais sans la connaître
jusqu’à ce qu’elle ait accouché l’enfant qu’elle portait.
Jn 2.1-11 : Un mariage a eu lieu à Cana en Galilée, et Jésus y fut invité avec ses
disciples. L’atmosphère qui a prévalu et la carence de la boisson à laquelle Jésus a pourvu
témoignent de l’importance numérique des convives et l‘honneur que ce mariage a apporté à
la société en général.
A la lumière de ces textes, Combien sont des mariages contractés aujourd’hui qui
donnent lieu aux conflits ouverts et aux déchirures des tissus sociaux et relations
interpersonnelles ? La différentiation sexuelle est-elle bien vécue même après la chute de
l’homme et ces modèles servent-ils d’exemples pour les nouveaux engagements dans le
contexte du péché?
15
Perrier, Cours de théologie morale sexuelle, p. 8.
16
Gn 3.16.
17
Djitangar, « Pour une attention particulière de notre Eglise-famille de Dieu à la femme en son sein et dans la
société », Lettre Pastorale, 2 Février 2004.
18
Perrier, Cours de théologie sexuelle, p. 8. . « La concupiscence n’est rien d’autre que le désir teinté de
recherche de soi, le désir sexuel perturbé, détourné de sa finalité amoureuse. Elle est le désir sexuel faisant de
l’autre une occasion de plaisir personnel, le désir sexuel blessé par le péché »
5
Mt 19.3-10 nous éclaire davantage sur les problèmes de la sexualité affectée par le
péché. Face à la conception erronée de la femme et la sexualité exprimée par les pharisiens
(v. 3), Jésus-Christ a simplement rappelé la beauté et la bonté originelles de cette création
divine et l’a opposée à sa réalité dans le contexte du péché. Il leur rappelle l’idéal et la norme
de la sexualité voulue par Dieu (v. 5). Le langage de la répudiation démontre la pratique de
la sexualité en dehors de la révélation. Et pour lever l’équivoque, Jésus ordonne : « Que
l'homme donc ne sépare pas ce que Dieu a joint » (v.6). Insatisfaits de la réponse de Jésus,
ses interlocuteurs poursuivent le dialogue en demandant la justification de la lettre de
divorce autorisée par Moise. En réponse, Jésus mentionne le cœur comme source du vrai
problème de l’humanité dans sa gestion de la sexualité (v.8). La dureté du cœur humain
radicalement influencé par le péché est à l’origine des problèmes de la sexualité. Jésus
relève en plus une insuffisance dans la manière de vivre la sexualité (v. 9). Dans ce
dialogue, Jésus corrige et instruit à ses interlocuteurs en tenant compte de leur faiblesse et
leur limitation19.
L’homme gère donc la sexualité sous l’influence du péché de deux manières.
Premièrement, il y a le caractère dominant de l’homme lors des rapports sexuels avec la
femme ; c’est-à-dire que lorsque le désir du sexe surgit en l’homme, la tension qu’il vit dans
son corps l’amène souvent à reléguer au second rang les questions de santé de sa femme,
son goût, son humeur, sa disponibilité et sa participation à l’acte sexuel20. Deuxièmement, le
sentiment de la féminité constitue un handicap à la plénitude de la sexualité au sein du
couple. Cela s’explique d’abord par le fait que pendant le rapport sexuel, la femme ne se
livre pas entièrement à son amant pour connaître le sens profond de l’amour21. Ci après,
quelques exemples négatifs de la sexualité dans l’Ecriture.
1. Valeur de la sexualité
La sexualité est de l’ordre créé. Sa valeur apparaît dans le mandat de la procréation
donné par Dieu au premier couple en Eden. « Dieu les bénit, et Dieu leur dit: Soyez féconds,
multipliez, remplissez la terre »22. La raison fondamentale se trouve dans Genèse 1. 28 qui
« donne la certitude que l’homme et la femme ont le devoir et l’obligation de s’assembler
pour se multiplier. Dieu y attache une bénédiction et ajoute quelque chose à la création », dit
Luther23. Au lieu de considérer cette parole de Dieu en Genèse 1. 28 comme un simple
commandement, pour Luther, il faut la lire comme une œuvre divine qu’il n’appartient à
personne d’empêcher ou d’interdire24. D’ailleurs, Dieu a créé homme et femme avec la
capacité innée du plaisir sexuel et de la vie dans un environnement familial.
A la lumière de ce mandat et dans le contexte de la création, sa pratique aux origines
devrait échapper aux effets de la chute. Car, Dieu a déclaré très bon ce qu’il avait fait. Par la
suite, l’on observe la pratique de la sexualité dans le contexte de la chute, parce qu’il en a
résulté la conception et la procréation de la race humaine. Notons que la chute n’a pas
déformé ou modifié la valeur de la sexualité, mais elle rend plutôt difficile la condition de la
procréation chez la femme. Dieu lui-même crée en l’homme et la femme un système interne
qui crée le besoin et déclenche le désir de l’accomplissement. Comment cela se conçoit-il ?
J-P Signoret répond : « La motivation sexuelle résulte de l’action des hormones portées par
la circulation sanguine au niveau du système nerveux central »25. Il ajoute que « diverses
formations interviennent pour recevoir l’information hormonale, les messages sensoriels et
réaliser une activité adaptée »26.
Il ressort de ces idées que la sexualité revêt des aspects biologiques très
fondamentaux et des aspects socioculturels, car sa gestion requiert le contrôle par la
société. Car, ce n’est pas dans le vide, mais c’est dans un contexte socioculturel que l’on
apprend et découvre la sexualité27. Cela est la démonstration du caractère relationnel de
l’homme.
2. But de la sexualité
L’homme et la femme sont tous les deux créés pour la communion l’un avec l’autre
dans l’harmonie et la procréation. Augustin argumente : « L’éternelle vérité même par
laquelle tout a été créé, assure que devrait être donnée à l’homme une aide qui fut
semblable à lui […] Or, si l’on se demande à quelle fin il fallait que cette aide fût créée, nulle
autre probabilité ne se présente à l’esprit que la nécessité d’engendrer des enfants »28. Il
ajoute en soulignant : « Cette raison de la création et de l’union de l’homme et de la femme,
ainsi que cette bénédiction, n’ont pas cessé de valoir même après le péché de l’homme et
22
Gn 1. 27-28.
23
Luther, Œuvres, tome III, p. 226.
24
Ibid.
25
P.-P. Signoret, « Sexuel (comportement) » in Encyclopaedia Universalis, Vol. 14, p. 932.
26
Ibid.
27
Judith K. Balswick & Jack O. Balswick, Authentic Human Sexuality; an Integrated Christian Approach
(Downers Grove: InterVarsity Press, 1999), p. 17-27.
28
Institut d’Etudes Augustiniennes, La Genèse au sens littéral, Livres VIII-XII, trad. P. Agaesse et A. Solignac
(Série Œuvres de Saint Augustin, Paris : Institut d’Etudes Augustiniennes, 2001), p. 95-97.
7
son châtiment »29. Pour atteindre l’objectif fixé par Dieu au travers du sexe créé, les deux
genres sont appelés à vivre ensemble maritalement sans mépris du corps l’un de l’autre.
Déjà dès l’enfance, la personne humaine, consciente ou inconsciente, est engagée dans le
processus de la découverte de la sexualité jusqu'au jour où elle l’expérimente dans le cadre
voulu par le créateur.
Dieu ne se laisse pas embarrasser par la croissance potentielle de l’espèce
humaine ; il l’encourage au contraire en créant la différentiation sexuelle, en ordonnant en
premier lieu la procréation. Cela veut dire que le mariage est marqué par Dieu d’une bonté
essentielle à l’origine même. Cependant, pour éviter tout dogmatisme, il convient de
nuancer les positions sur cette question. Dieu a donné l’ordre de se multiplier et de remplir
la terre, certes, mais il ne rend pas tous les couples féconds pour atteindre cet objectif. Il a
créé l’homme et la femme pour leur communion, et cela en raison de la déclaration « Je lui
ferai une aide semblable à lui » qui est postérieure à l’ordre de procréer en Gn 1.28. Par
ailleurs, il accorde librement aux uns ou aux autres la grâce de participer à la procréation de
la race humaine. Il refuse aussi librement à certains couples la possibilité d’enfanter tout en
les bénissant d’une autre manière. Cela signifie que la présence des enfants dans un foyer
est une bénédiction de l’Eternel (Ps 127.3), un don de sa part en vertu de sa souveraineté et
de sa liberté.
En somme, tout usage de la sexualité autre que celui de l’accomplissement de
l’homme et la procréation pourrait paraître comme une déviance, une perturbation de l’ordre
créé ou une exception dans l’appréciation de la sexualité. Toujours est-il que, dans le plan
de Dieu, le mariage a son utilité dans la sphère physique, dans ce monde historique.
29
Ibid., p. 97.
30
Mc 12. 25. La Bible Thompson avec Chaînes de références ; Version Louis Segond révisée, dite à la Colombe.
31
Benno van den Toren, « Mariage, célibat et concubinage », p. 4.
8
32
Voir Balswick & Balswick, Authentic Human Sexuality; an Integrated Christian Approach, p. 14-16 pour plus
d’informations sur les interférences biologique et socioculturelle de la formation du concept « genre ».
33
Buakasa Tulu Kia Mpansu, « La sexualité. Dune culture à l’autre », in Association des Moralistes zaïrois,
Morale et société zaïroise; actes de la première rencontre des moralistes zaïrois du 1er au 4 Novembre 1978, p.
63-72.
34
Vu le caractère relationnel de la sexualité, les gens en parlent lorsque la nécessité l’exige, c’est-à-dire en cas
de transgression de la norme de son usage, d’abus ou d’expression de la masculinité exagérée.
35
Vangadang Moussa Céphas, « L’analyse anthropologique de la contribution des églises protestantes dans le
processus du développement intégral de l’homme », Monographie de Licence en Anthropologie, université de
Bangui, 2011, p. 25, 29.
9
que le foyer est fondé. Très souvent, ce qui est plus suivi par la société est la chasteté de la
fille ; celle du garçon est quasiment imperceptible. Toutefois, la conduite du jeune homme
est l’objet du suivi communautaire.
La fidélité, quant à elle, demeure dans toutes les sociétés une valeur principale qui
confère à l’intéressé(e) le respect, promeut la personne aux fonctions sociales de grande
échelle. Car celui qui est fidèle dans la gestion de sa sexualité est supposé recéler une
discipline morale interne qui peut lui permettre d’assumer des charges même complexes au
sein de sa communauté.
En dépit de ces valeurs, dans les sociétés africaines, la femme n’a pas toujours une
place première aux yeux des hommes.
b) Le statut de la femme
Dans la plupart des sociétés africaines, « le statut social des femmes africaines a été
défini par plusieurs auteurs modernes comme un statut d’aliénation, d’exploitation sans frein
par les hommes », le témoigne Pierre Alexandre36. Pourtant, c’est dans ce cadre que le
mariage garde toute sa valeur. Il apparaît comme la régulation sociale par excellence de la
sexualité »37. Cependant, la motivation pour le mariage ne vise pas toujours cet objectif chez
tous les peuples. Par exemple, dans la culture marba au sud-est du Tchad, « il faut se marier
à plusieurs femmes pour avoir beaucoup d’enfants qui constituent une main-d’œuvre
abondante »38. Ici, le mariage ne vise pas exclusivement à remplir la fonction initiale prévue,
la procréation ; au-delà de cela, il y a la dimension utilitaire et économique.
Dans la plupart des cultures africaines, la femme est considérée par l’homme comme
un être inférieur. Elle est classée dans la catégorie des enfants quel que soit son âge39. Sa
faiblesse physique est supposée avoir atteint aussi son moral et son intellect. Par
conséquent, l’opinion de la femme n’est pas souvent prise en compte. Dans le contexte du
développement par exemple, « la femme finit par se faire comprendre qu’elle n’est rien et
qu’elle ne peut rien apporter pour la société »40. En cela, la femme peut être prise en
mariage pour des buts égoïstes.
c) La polygamie en Afrique
Comme ailleurs, la polygamie est acceptée dans les sociétés africaines. Elle est vue
comme un signe de noblesse, d’aisance sociale pour celui qui s’y engage. Jacques Maquet
soutient cette affirmation en ces mots : « L’Afrique est polygynique en ce sens que cette
forme de mariage y est partout socialement reconnue et qu’elle y jouit de plus de prestige
que la monogamie »41. La communauté attend de voir chez le mari polygame les preuves de
ses capacités de maintenir la cohésion familiale et l’harmonie conjugale afin d’éviter des
conflits dus à la gestion partisane ou partiale de l’amour que réclame chaque coépouse. En
cas de défaillance dans ce domaine, ce sont les personnes âgées qui approchent le mari
pour l’instruire sur les règles de la conduite d’un foyer polygame et lui conseiller une attitude
responsable. Les enfants issus de cette famille sont acceptés par la société, cependant le
droit d’hériter de leur père est plus concédé aux enfants de la première épouse.
Une chose qu’il faut reconnaître est que « les partenaires dans un mariage polygame
ne peuvent jamais être « une seule chair ». Le mari ne peut pas se donner entièrement à
une femme, parce qu’il est partagé et doit également se donner à l’autre ou aux autres. Une
épouse, à son tour, ne peut jamais se donner entièrement à son mari, parce qu’elle est
consciente que ce dernier n’est pas entièrement à elle ; elle a des concurrentes »42. Dans un
36
Pierre Alexandre, Dictionnaire des civilisations africaines, Paris : Fernand Hazan, 1968), p. 172.
37
Dadoun, « Sexualité humaine », in Encyclopaedia Universalis, vol. 14, p. 927.
38
Vangadang, p. 30.
39
Ibid., p. 29.
40
Ibid., p. 28. Le témoignage de l’auteur relate ceci : « Pour des raisons esthétiques semble-t-il, les femmes sont
soumises à un traitement dégradant qui consiste à la perforation des lèvres supérieure et inférieure dans
lesquelles on introduit un disque en bois ou en quartz poli appelé « labret ». Non seulement cette pratique
déforme complètement la bouche des femmes, mais elles perdent toutes leurs dents sauf les molaires ».
41
Jacques Maquet, Dictionnaire des civilisations africaines (Paris : Fernand Hazan, 1968), p. 333.
42
Benno van den Toren, « Mariage, célibat et concubinage », p. 6.
10
foyer polygame, l’équilibre de l’amour n’est jamais observé quel que soit le tempérament du
mari, quelle que soit la soumission d’une ou des épouses. La raison est que « le mariage
polygame ne peut donc jamais atteindre la profondeur du don de soi et de la réception du
don de l’autre comme Christ se donne à son Eglise et l’Eglise à Christ. Cet amour n’est
possible que dans un mariage monogame »43.
En dépit de cette difficulté pour l’homme, la procréation le motive à s’engager la
polygamie en Afrique.
43
Ibid.
44
1 Sam 1. 1-19. L’exemple des deux femmes d’Elqana, Peninna et Anne, illustrent mieux cette réalité en
Afrique.
45
D’après les médecins, le disfonctionnement érectile peut être causé par une maladie, une fatigue du corps suite
aux travaux intenses, la non programmation du plaisir sexuel par le cerveau à cause d’autres préoccupations qui
priment, ou encore le déplaisir qui résulte de la monotonie avec la même partenaire.
46
La croyance selon laquelle l’excision garde la femme fidèle dans le mariage, après constant des faits, se
montre fausse. Car l’handicap physique dont la sexualité de la femme prend un coup durable l’amène à penser
que le partenaire de vie dans le foyer est la cause de son insatisfaction sexuelle. Cela la pousse à aller ailleurs
chercher l’expérience d’une satisfaction avec un autre partenaire. Cela veut dire que les cas d’infidélité sont plus
relevés dans les foyers dont les épouses sont excisées.
11
Fort des propos qui précèdent, chez certains peuples d’Afrique, la perception de la
femme, le silence sur la sexualité et les interdits sans explication constituent un frein au
développement de la sexualité tant dans les vies individuelles que dans les vies de famille.
47
Dictionnaire Le Petit Larousse 2008 Multimedia. CD-ROOM PC.
48
Mvumbi Ngolu Tsasa, « Crise morale et sexualité », in Association des Moralistes zaïrois, Morale et société
zaïroise; actes de la première rencontre des moralistes zaïrois du 1er au 4 Novembre 1978, p. 52.
49
Laura Lévi Makarius, Le sacré et la violation des interdits (Coll. Science de l’homme, Paris : Payot, 1974), p.
21.
50
« Anonyme, « Le tabou sexuel pendant l’allaitement » in Santé et Allaitement Maternel. Consulté le 25
Février 2011. En ligne : http://www.santeallaitementmaternel.com/se_former/histoires...
51
Il convient de signaler qu’il y au Nigeria et en Tanzanie une pratique qui prône l’homosexualité, mais dans son
contexte culturel, elle n’a rien à voir avec l’homosexualité. Il s’agit d’une femme plus ou moins âgée dans son
foyer qui, réalisant qu’elle ne plus la possibilité de procréer ou que sa famille n’a pas héritier, épouse
officiellement une jeune femme envers qui elle assume à tous égards la fonction de mari. Cependant, elle la
passe au plus jeune fils de la famille ou à un autre membre de la famille reconnu viril qui vit maritalement avec
elle afin de lui susciter un descendant. Tous les enfants nés de leur union portent le nom du mari légal, donc le
nom de la femme avec qui la jeune femme a célébré le mariage.
12
rituelles pour bénéficier d'une bonne croissance. Le deuxième pilier concerne les rites
initiatiques qui comportaient parfois des pratiques homosexuelles. Par exemple, chez le
Mevungu, les Beti et le Ko'o, chez les Bassa dans le sud et centre du Cameroun, il existe
des cérémonies initiatiques qui comprenaient notamment des attouchements à caractère
homosexuel entre femmes. Le troisième pilier concerne les pratiques homosexuelles en
l'absence d'hommes ou de femmes. D’après l’auteur, chez les Azande du Sud-Ouest du
Soudan, en République Démocratique du Congo et en Afrique australe, existent des
pratiques homosexuelles existaient parfois entre co-épouses qui disaient ne pas être
satisfaites par leurs maris. Le dernier pilier concerne l'homosexualité identitaire. Il s'agit
exclusivement d'hommes ou de femmes, qui préfèrent avoir des relations avec des
personnes du même sexe. Dans le Sud de l'actuelle Zambie par exemple, ces personnes
étaient appelées mwaami dans la langue Ila52.
Vue comme une inclination contraire aux traditions africaines, cette pratique
s’enracine de manière diffuse ou presque discrète au sein des sociétés modernes tant dans
les milieux urbains que dans les zones rurales avec l’aide des médias.
52
Christian Eboulé, « L'homosexualité en Afrique noire : Entre tabou et idées fausses » in Revue Bamako
Hebdo, 12/06/2010. Consulté le 25 Février 2011.
En ligne : http://www.maliweb.net/category_reply.php?NID=61822&page=1&cid=...
53
Makarius, p. 20.
54
H. Webster, Le Tabou (Paris : Payot : 1952), p. 62-63.
55
Droits de l’homme « Camps de refugiés en Afrique : Aide humanitaire ou chantage sexuellement
transmissible ? ». Mis en ligne le 16 Mai 2006. Consulté le 26 Février 2011.
En ligne : http://www.ufctogo.com/Camp-de-refugies-en-Afrique-Aide-1424.html
56
Ibid.
13
Par ailleurs, souvent évoqué dans certains pays d’Afrique, mais encore tabou, le
harcèlement sexuel est une violence, une agression dans sa pratique traditionnelle comme
moderne. Des psychiatres l’assimilent carrément à un crime, en révélant que le harcèlement,
comme le viol, est une affaire de pouvoir dans laquelle le harceleur agit à huis clos et évite
donc de s’exposer au grand jour57. En Algérie par exemple, une campagne de plaidoyer a
été engagée en 2002 et 2003 par les femmes syndicalistes, plus particulièrement les
représentantes de la Commission nationale des femmes travailleuses. Ces campagnes ont
porté le fruit qui consiste en l’adoption d’une loi et son insertion dans la constitution l’article
341 bis. Cet article stipule que « toute personne qui abuse de l’autorité que lui confère sa
fonction ou sa profession, en donnant à autrui des ordres, en proférant des menaces, en
imposant des contraintes ou en exerçant des pressions, dans le but d’obtenir des faveurs de
nature sexuelle” est réputée avoir commis l’infraction de harcèlement sexuel »58..
Dans l’Afrique traditionnelle, toute violation du tabou est sanctionnée par la
communauté ou suivi de châtiment de la part des dieux du clan ou de la tribu selon les
croyances en vigueur dans le milieu. Aussi, le coupable rencontrera quelque malheur dans
son parcours. Toutes ces différentes attitudes à l’égard du but de la sexualité (communion &
procréation) demeurent un handicap au développement à tous égards. Hormis ces attitudes,
il faut noter que les sociétés africaines développent des comportements individuel et collectif
caractérisés par la modernité.
57
Mounir Kechar, « Enquête sur le harcèlement sexuel en milieu professionnel en Algérie », mis en ligne le 20
Juillet 2010. Consulté le 26 février 2011. En ligne : www.algerlablanche.com/thematiques/index.php?enquete-
sur...
58
Ibid.
59
P.-P. Signoret, « Sexuel (comportement) » in Encylopaedia Universalis, vol. 4, p. 927.
60
Thomas d’Aquin, Somme théologique, tome 3 (Paris : Cerf, 1985), p. 881-882.
14
Les moralistes gagnés pour la cause de ces pratiques, et avec l’appui d’autres
entités, proposent au marché les contraceptifs pour atteindre cet objectif.
61
Le planning familial naturel, donc sans usage de contraceptif, est par conséquent une approche trop peu
adoptée de nos jours parce que les couples à l’âge de procréer le trouvent comme handicap à leur
épanouissement sexuel. Pour eux, la procréation ne doit subir aucune limite ni restriction tant que les forces du
couple le lui permettent. Par contre, dans les sociétés sécularisées, avec l’émancipation et le coût réel de la vie
quotidienne, les gens ne souscrivent pas au principe de la procréation au rythme qu’imposent la faim, la soif et le
désir sexuel éprouvés par les hommes et les femmes. En effet, plusieurs gammes de contraceptifs sont conçus et
mis en usage par qui le désire afin d’éduquer les couples à une procréation responsable.
62
Willy Pasini, Désir d’enfant et contraception (Coll. Orientations, Tournai : Casterman, 1974), p. 19-20.
63
Thomas d’Aquin, Somme théologique, p. 928.
64
Ici, la vulgarisation des contraceptifs sur le marché et dans les ménages ne heurte personne et donne le
sentiment de sécurité par rapport à la contamination des MST et l’assurance de la maternité contrôlée.
65
Balswick & Balswick, Authentic Human Sexuality ; an Integrated Christian Approach, p. 235-236. Selon ces
auteurs, la pornographie dénote l’usage du sexe pour une subjugation, agression, une dégradation, un abus, une
coercition, une domination, etc.
15
Au nom des libertés, certaines hautes autorités de quelques pays, et plusieurs Etats
de nos jours, autorisent la projection des films pornographiques et violents sans souci pour
les mineurs. En fait, ces derniers sont exposés aux images pornographiques à l’internet,
télévision, aux journaux, etc. pendant des heures de la journée ou de la soirée sous le
regard des parents démissionnaires et avec leur bénédiction. Dans sa critique de l’attitude
démissionnaire des parents vis-à-vis de l’éducation des enfants, Triollet dit : « Cinéma,
télévision, vidéo, jeux vidéo ou encore Internet sont autant de moyens de communication et
de loisirs mis à la disposition de tous don t des mineurs parfois laissés à eux-mêmes »66.
Ces mineurs en sont marqués et excités d’expérimenter la réalité avant la maturation
de leurs sens sexuels et le développement total de leurs organes sexuels. La tentation est
très forte de nos jours pour les jeunes garçons et les filles de se réaliser dans le domaine de
la sexualité même en dehors du cadre approprié pour leur sécurité. Dans son article La
sexualité. D’une culture à l’autre, Buakasa témoigne qu’« aujourd’hui, le contexte africain de
la sexualité a considérablement changé. Les facteurs de changement sont nombreux »67. Il
relève quelques facteurs de changement de la perception de la sexualité en Afrique,
notamment la culture, la globalisation, l’industrialisation et l’influence de l’argent. Vous
pouvez lire l’extrait de son argumentation en annexe.
Il convient de retenir que ni la culture (scolarisation), ni la globalisation, ni
l’industrialisation, ni même l’argent n’ont rien de mal en eux-mêmes, mais leur influence sur
la mentalité des gens par rapport à la sexualité est négative. Et cela constitue la
préoccupation des adultes avertis, éducateurs dans différents établissements et des défis
pour les Eglises contemporaines.
66
Christophe Triollet, « Images violentes et pornographiques : la protection des mineurs ». Consulté le 4 Janvier
2011. En ligne : http://www.larousse.fr/encyclopedie/article/Images_violentes_et...
67
Buakasa, « La sexualité. D’une culture à l’autre », in Association des Moralistes zaïrois, Morale et société
zaïroise; actes de la première rencontre des moralistes zaïrois du 1er au 4 Novembre 1978, p. 63-72.
68
B. Muldworf, Vers une société érotique (Paris : Grasset, 1972), p. 9. Cité par Moralistes zaïrois, Morale et
société zaïroise; actes de la première rencontre des moralistes zaïrois du 1er au Novembre 1978, p. 81.
16
déjà vulgarisés, bien que ses membres en soient vulgarisateurs ou utilisateurs de tels ou tels
types de contraception. Au Tchad par exemple, les églises, les communautés ecclésiales de
base et les associations religieuses déclarent franchement leur position au sujet de
l’utilisation du condom face à la politique nationale de la santé. Elles ne sont pas motivées à
promouvoir ou à en faire la publicité. La raison pour les unes est que l’utilisation d’un tel
préservatif s’oppose à l’éthique biblique, pour les autres le condom encourage la conduite
infidèle et la prostitution. Un autre groupe encore désapprouve les contraceptifs parce qu’ils
limitent la procréation ordonnée à la race humaine par Dieu lui-même. Ces idées et
croyances sont communément partagées par toute l’Église et la communauté mu sulmane au
Tchad pendant longtemps. Par moments, l’utilisation du condom est permise et conseillée
seulement aux mariés en cas d’infection d’un des partenaires dans l’ordre de préserver la
santé de l’autre69. Ces attitudes sont également observ ées vis-à-vis du VIH/SIDA.
femme saine, et vice-versa. Cette disparité constitue un sujet dont la pastorale est délicate,
souvent teintée de partialité ou d’un certain légalisme. Très souvent aussi, certains pasteurs
se refusent au partage sur une telle situation dans un couple, même celui de leurs
paroissiens.
En clair, il convient de noter que dans certains foyers, par une quelconque voie de
transmission, l’homme ou la femme a contracté le virus du SIDA. Et l’harmonie du couple en
prend un coup sur le plan de la sexualité. Les maladies préliminaires du VIH peuvent être
manifestes, mais la personne infectée va toujours nier le fait jusqu'au jour où seul le test la
dénonce comme porteur ou porteuse du virus. En nous fondant sur les témoignages des
femmes, très souvent la femme peut se dénoncer à son mari, mais avec beaucoup de
douleur en vue de le préparer à accepter le pire qui pourra un jour advenir. Et la réaction de
l’époux est très souvent l’accusation de l’épouse et son abandon qui s’ensuit. Par contre,
lorsque c’est l’homme qui contracte le VIH, il garde discrètement les résultats de ses tests et
veut continuer la vie conjugale avec sa femme sans la protéger. Au regard de cette attitude
généralement taxée de méchanceté ou crime par les épouses affectées, la femme se
rétracte et résiste aux avances de son partenaire; et voilà les points de conflits conjugaux sur
lesquels la pastorale contemporaine ne se prononce pas clairement.
Dans les deux premiers chapitres, nous avons analysé la sexualité dans le plan de
Dieu; nous avons aussi analysé la sexualité dans la culture africaine. Nous avons réalisé que
la sexualité représente pour les individus, pour les communautés et pour les entités une
réelle difficulté sur le plan de l’éthique chrétienne. Elle représente un domaine plein de défis
pour l’Église et pour les leaders contemporains. Il convient dans le dernier chapitre de
proposer à la lumière de l’Ecriture une ligne de conduite à l’Église et aux leaders africains
face aux différentes manières de concevoir et d’utiliser la même réalité créée par Dieu.
18
A. Le plaidoy er de l’Église
Faire le plaidoyer pour le changement de mentalité et de conduite en matière de
sexualité implique l’Église avec ses leaders et sa théologie. Cela consiste à diversifier les
réponses bibliques selon les différentes classes d’âges, repenser l’importance et la pratique
de la dot au niveau des familles afin d’encourager les jeunes à s’engager dans une sexualité
digne de louange, vulgariser les médias chrétiens en vue de donner des réponses aux
programmes négatifs des médias séculiers, développer le partenariat avec les ministères
œuvrant parmi les jeunes. L’Église avec ses différents services et ministères, sous la
direction du Saint-Esprit, doit s’investir dans l’enseignement de la vérité biblique aux jeunes
sur le célibat, le mariage et la sexualité dans le mariage, dans l’instruction des couples sur
les principes bibliques de la sexualité et les rôles assignés par Dieu à chaque personne dans
le couple. Bien plus, cette responsabilité de l’Église avec ses ministres fait appel à la
compassion et exige l’affirmation de la vérité face aux programmes d’éducation déviants.
Tout cela n’annule pas la nécessité de mettre une emphase sur l’éducation des jeunes en
matière de sexualité, sur certaines valeurs africaines.
71
Denis Muller, « L’ontologie de la personne et les enjeux du concept de nature en éthique », in Eric Fuchs et
Mark Hunyadi, Ethique et natures (Genève : Labor et Fides, 1992), p. 191.
72
John Prince, Et Dieu créa l’amour (Guebwiller : Ligue pour la Lecture de la Bible, 1986), p. 36.
73
Diocèse de Goré, Foi et tradition ; inculturer et évangéliser en profondeur, 6e Assemblée diocésaine, Donia,
27 Septembre – 2 Octobre 2004, p. 8- 9. L’enculturation *est un processus d’éducation qui vise la transmission
de valeurs à l’enfant
74
Ibid.
75
Roger Eykerman, Tabous ? Quand la Bible valorise le couple et la sexualité (Abidjan : Presses Bibliques
Africaines, 2004), p. 152.
19
De nos jours, les jeunes se cherchent et cherchent des modèles de vie à imiter ou
des moyens de subsistance par le commerce de leur sexe. Ce besoin existentiel doit motiver
l’Église à diversifier son enseignement, à mettre un accent particulier sur la sexualité de
manière à orienter les jeunes dans les voies du Seigneur. Elle est appelée à faire
comprendre aux jeunes les injonctions divines par rapport au mariage, le célibat et autres
questions relatives à la sexualité.
b) Le célibat
Le célibat désigne le statut de celui qui est à l’âge de se marier, mais qui ne l’est pas,
et ne l’a jamais été. Dans l’Afrique traditionnelle, le célibat n’est pas apprécié. Notons que le
célibat est une vocation exceptionnellement accordée par Dieu à certaines personnes. Du
point de vue de Paul, ceux qui sont appelés « célibataires » sont les continents (1 Co 7.2, 2).
Curieusement, dans l’Ancien Testament, il n’existe pas de mot correspondant à
« célibataire ». L’appel de Jérémie au célibat est un signe prophétique. Cependant, le
Nouveau Testament mentionne que Dieu peut appeler des chrétiens au célibat Mt 19.10-12),
même si le mariage reste la norme. Ce statut est imposé à d’autres par les hommes dans le
contexte du péché (cas des eunuques) ou par une maladie. D’autres par contre, à cause du
Seigneur, s’empêchent de se marier et font vœu de fidélité pour la vie (exemple de Paul). La
76
Benno van den Toren, « Mariage, célibat et concubinage », p. 3.
77
Ibid., p. 9.
78
Ibid. p. 14.
79
Ibid., p. 6-7.
80
Ibid., p. 35.
81
Benno van den Toren, « Sexualité et intimité », p. 17.
20
ordres que causent les IST, notamment le VIH/SIDA. Faute de test préalable de la sérologie
par naïveté ou par la négligence d’un partenaire, aussitôt fondés, certains foyers sont
détruits par le VIH/SIDA. Ces expériences dans le contexte de « la maladie du siècle »
nécessitent une telle disposition pendant les préliminaires du mariage afin de préserver les
partenaires sains de toute contamination par le virus.
Car, Dieu donne à son Eglise tous les dons, y compris le don de discernement pour
le bien-être de son peuple. Bien plus, le contexte moral contemporain doit inspirer à l’Église
une pastorale appropriée et efficace.
86
Benno van den Toren, « Sexualité et intimité », p. 2.
87
Ibid., p. 3.
22
qu’il se sert lui-même. Il en va de même pour l’épouse dans sa soumission à son mari
comme une réponse à son amour fondamental et sans réserve pour elle. Dieu dit à Eve :
« Tes désirs se porteront vers ton mari » Gn 3.16. Ce texte souligne les responsabilités l’un
vis-à-vis de l’autre : l’amour traduit par la prise en charge de la femme par le mari et la
soumission ou la dépendance de la femme à son mari, y compris le besoin sexuel.
Encore une fois, le mariage est un cadre prévu par Dieu depuis l’origine pour
l’épanouissement temporel et l’accomplissement de l’homme. Il est pour nous un champ de
vie où nous devons apprendre à vivre à la lumière de la profondeur de l’amour entre Dieu et
son peuple. Des exemples de cette relation inconcevable humainement parlant se trouvent
dans l’expérience des prophètes avec l’indication divine, entre autres Os 2-3, Jér 2.1ss ;
3.1ss, Eph 5.31s. La dimension impénétrable de l’amour de Dieu pour Israèl infidèle
demeure un principe pour nos relations dans le mariage. Fort de ce paradigme, en quelle
circonstance le divorce est-il permis et en quel temps accorder à son ou sa conjoint(e) le
pardon en cas d’infidélité?
En considération de ce qui précède, « comment rester fidèle à notre foi en Jésus-
Christ sans graves déchirements intérieurs par rapport aux éléments de l’éducation familiale
traditionnelle qui ont structuré notre personnalité individuelle ou sociale mais qui se révèlent
être négatifs et contraire à la volonté de Dieu ? »88. La réponse est qu’il est impérativement
nécessaire d’enseigner aux jeunes les bases du mariage selon Dieu afin de leur permettre
d’éviter des ruptures intempestives ou des désagréments survenus pendant le parcours. Non
seulement l’Église en tant que corps, mais aussi les leaders d’Église, les responsables de
mouvements de jeunes et les éducateurs à différents niveaux ont la responsabilité
d’enseigner la sexualité.
88
Djitangar Edmond, Evêque de Sarh, « Pour une attention particulière de notre Eglise-famille de Dieu à la
femme en son sein et dans la société », Lettre Pastorale, 2 Février 2004.
89
Buakasa T.K.M., « La sexualité. Dune culture à l’autre », in Association des Moralistes zaïrois, Morale et
société zaïroise; actes de la première rencontre des moralistes zaïrois du 1er au 4 Novembre 1978, p. 63-72.
90
O. Pipper, L’Evangile et la vie sexuelle, trad. Francis Baudraz (Neuchâtel/Paris : Delachaux et Niestlé, 1955),
p. 106.
23
91
Benno van den Toren, « Sexualité et intimité », p. 8.
92
Ibid., p. 13-15.
93
Ibid.
94
Ibid.
95
François Alngar, « Foi et tradition : inculturer l’Évangile dans nos traditions », in Diocèse de Goré, Foi et
tradition ; inculturer et évangéliser en profondeur, 6e Assemblée diocésaine, Donia, 27 Septembre – 2 Octobre
2004, Annexes p. 3.
24
La théologie, quant à elle, est appelée à reconnaître certaines valeurs au sein des
traditions africaines afin d’en tenir compte dans ses entreprises. Elle doit faire sa part dans
l’affrontement de nombreux défis contre lesquels les sociétés africaines, surtout les chrétiens
africains, se confrontent. En fait, la théologie doit analyser les interdits traditionnels au sujet
de la sexualité, jusque là vue comme tabou, à la lumière de l’Évangile afin de faire apparaître
en lumière la vérité pour le bien des hommes et des femmes, surtout des jeunes.
Qu’est-ce qui mérite d’être conservé et qu’est-ce qui doit être soumis à l’autorité de
l’Évangile, qu’est-ce qui doit aussi être annulé par l’autorité de l’Évangile ? Voilà autant de
question que la théologie doit se poser et poser à la tradition en vue d’édifier la bonne vie
des chrétiens africains. Son succès dépendra de la dialectique effective et soutenue à bâtir
et du mode de commun ication du matériel de cette éthique sexuelle.
96
Van den Toren, « Mariage, célibat et concubinage », p. 1.
97
Buakasa, « La sexualité. D’une culture à l’autre », in Association des Moralistes zaïrois, Morale et société
zaïroise; actes de la première rencontre des moralistes zaïrois du 1er au 4 Novembre 1978, p. 63-72.
98
Van den Toren, « Sexualité et intimité », p. 24.
99
Perrier, Cours de théologie morale sexuelle, p. 18.
25
Conclusion
Février 2011
100
Perrier, Cours de Théologie morale sexuelle, p. 48.
26
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES DE REFERENCE
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1998.
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La Bible Thompson avec Chaînes de références ; Version Louis Segond révisée, dite à la
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1958.
Pierre Alexandre, Dictionnaire des civilisations africaines. Paris : Fernand Hazan, 1968.
OUVRAGES GENERAUX
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des moralistes zaïrois du 1er au 4 Novembre 1978, (Etudes des moralistes zaïroises,
Kinshasa : Association des Moralistes Zairois, 1988
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Niestlé, 1962.
27
DOCUMENTS INEDITS
Diocèse de Goré. Foi et tradition ; inculturer et évangéliser en profondeur, 6e Assemblée
diocésaine, Donia, 27 Septembre – 2 Octobre 2004.
Edmond Djitangar, « Pour une attention particulière de notre Eglise-famille de Dieu à la
femme en son sein et dans la société », Lettre Pastorale, 2 Février 2004.
Luc-Marie Perrier. Cours de Théologie morale sexuelle, dispensé à l’Institut Catholique de
Bouar, 2008.
Moussa Céphas Vangandang. « L’analyse anthropologique de la contribution des églises
protestantes dans le processus du développement intégral de l’homme », Monographie de
Licence en Anthropologie, université de Bangui, 2011.
Benno Van den Toren. « Mariage, célibat et concubinage.
Benno Van den Toren. « Sexualité et intimité ».
SOURCES E LECTRONIQUES
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Consulté le 4 Janvier 2011.
En ligne : http://www.larousse.fr/encyclopedie/article/Images_violentes_et...
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Revue Bamako Hebdo, 12/06/2010. Consulté le 25 Février 2011.
En ligne : http://www.maliweb.net/category_reply.php?NID=61822&page=1&cid=...
Collectif. Droits de l’homme « Camps de refugiés en Afrique : Aide humanitaire ou chantage
sexuellement transmissible ? ». Mis en ligne le 16 Mai 2006. Consulté le 26 Février 2011.
En ligne : http://www.ufctogo.com/Camp-de-refugies-en-Afrique-Aide-1424.html
« Anonyme, « Le tabou sexuel pendant l’allaitement » in Santé et Allaitement Maternel.
Consulté le 25 Février 2011.
En ligne : http://www.santeallaitementmaternel.com/se_former/histoires...
Dictionnaire Le Petit Larousse 2008 Multimédia. CR-ROOM PC.
Easton’s Bible Dictionary (Revised) in CD-ROOM Theophilos 3.
28
ANNEXES
29
ANNEXE 1
Sexualité dans l’islam
101
Mahomet, Le coran, traduction nouvelle et intégrale par Edouard Montet (Paris : Payot, 1958), p. 545 (Q 30,
20). Certaines traductions rendent les mots « affection » et « tendresse » par amour et compassion ou
miséricorde.
102
Ibid., 2, 222-223 (p. 112).
103
Ibid., p. 113.
104
Ibid. 70, 30-32 (p. 781).
105
Ibid., 4, 38 (p. 164) « Quant à celles dont vous redoutez l’inconduite, avertissez-les, et relevez-les dans les
chambres à coucher, et battez-les… ».
106
Q 4.38 (p. 164).
107
A. TH. Khoury, « Sexualité » in Adel Theodor Khoury (sous dir.), Dictionnaire de l’islam; histoire – idées –
grandes figures (Bruxelles: Brepols, 1995), p. 323.
108
L. Hagemann « Ethique », in A. TH. Khoury, Dictionnaire de l’islam, p. 148.
109
Ibid. Voir Le coran 4. 37 (p. 163).
30
ANNEXE 2
110
Lév 18-20.
111
Mt 19. 4-8.
112
1 Co 7. 1-7.
113
1 Th 4. 3-5.
114
Jean-Yves Lacoste (sous dir.), Dictionnaire critique de théologie (Paris : Quadrige/PUF, 1998), p. 1006.
115
Ibid., p. 1006-1007.
116
Institut d’Etudes Augustiniennes, La Genèse au sens littéral, p. 115-117.
31
b) A la Réforme
Les Réformateurs, réagissant contre l’attitude catholique à l’égard du mariage, n’ont
pas tout perdu de l’héritage d’Augustin. Ils n’ont pas aidé à équilibrer la pensée médiévale de
la sexualité, certes, cependant ils donnent plus d’importance à la satisfaction sexuelle dans
le mariage qu’ils respectent. Pour les Réformateurs, l’objet de leur combat est l’erreur
théologique de l’Église catholique faisant du mariage un sacrement. Luther écrit : « Aucun
texte de l’Ecriture ne permet de considérer le mariage comme un sacrement. Non seulement
cela, mais les traditions qui ont la prétention de l’exalter ainsi le réduisent en réalité à une
pure moquerie »122. Selon Luther, les mariages des infidèles n’étaient pas moins vrais ni
moins saints que ceux célébrés par l’Eglise aujourd’hui. Dans son apologie contre la doctrine
catholique du mariage, il fait comprendre que le mot « sacrement » n’est que la traduction du
terme grec mystère qui est employé dans le contexte de la description de l’union entre Christ
et l’Église. Et ce mystère du mariage spirituel de Christ avec l’Église, soutient-il, est compris
comme étant l’amour qui anime Christ envers l’Église au point de se sacrifier pour elle et les
soins dont il l’entoure123.
Dans le même contexte, Luther soutient fortement que se marier « n’est pas une
question laissée au libre arbitre, ou un conseil, mais une chose nécessaire et naturelle que
tout ce qui est homme doit avoir une femme et tout ce qui est une femme doit avoir un
117
Lacoste, p. 1107.
118
Thomas d’Aquin, Somme théologique, tome 3 (Paris : Cerf, 1985), p. 862.
119
Ibid. L’auteur explique que le mariage appartient à la vie active, car l’homme et la femme dans le mariage ont
nécessairement à « penser aux choses du monde ».
120
Thomas d’Aquin, Somme théologique, p. 862.
121
Ibid., p. 865.
122
Martin Luther, Œuvres, tome II (Genève : Labor et Fides, 1966), p. 232.
123
Ibid., p. 235.
32
mari »124. D’après le Réformateur, le mariage est une obligation divine parce qu’il figure
dans le mandat donné au premier couple en Eden.
Luther combat contre l’obligation des vœux de chasteté, contre l’interdiction absolue
du divorce parce que ces prescriptions briment la liberté et oppriment les consciences au
nom d’une loi qui n’a pas de fondement dans l’Ecriture. D’après lui, le mariage est certes
une institution de Dieu, mais son instituteur même ne lui a pas conféré un tel statut. Selon le
Réformateur, le mariage appartient plutôt à l’ordre de la création. C’est pourquoi,
argumente-t-il, « l’union de l’homme et de la femme est de droit divin et elle subsiste même
si, d’une manière ou d’une autre, elle s’est faite en opposition avec les lois des hommes.
Celles-ci doivent lui céder le pas sans aucun scrupule »125. Car, soutient-il, il n’est donné à
aucun homme le pouvoir d’interdire ce que Dieu a institué ou de dissoudre ce qu’il a uni de
son propre chef126. Dans son apologie contre la position et les pratiques de l’Église
catholique, Luther soutient fortement que se marier « n’est pas une question laissée au libre
arbitre, ou un conseil, mais une chose nécessaire et naturelle que tout ce qui est homme
doit avoir une femme et tout ce qui est une femme doit avoir un mari »127. D’après le
Réformateur, le mariage est une obligation divine parce qu’il figure dans le mandat donné au
premier couple en Eden.
Dans le cas du manque de virilité de l’homme constaté dans le foyer, Luther tranche
clairement et déclare ceci :
Si une femme apte au mariage épouse un mari inapte, si elle ne peut pas en
prendre publiquement un autre et si, de plus, il lui répugne de forfaire à
l’honneur […] alors, que cette femme dise plutôt à son mari : regarde, cher
époux, tu n’arrives plus à me donner mon dû et tu m’as frustrée de mo n jeune
corps ; de plus, tu as compromis mon honneur et le salut de mon âme, et il
n’y a devant nul mariage entre nous ; permets donc qu’un mariage secret
m’unisse à ton frère ou à ton plus proche parent, toi-même gardant le titre
d’époux pour que ton bien ne passe pas à des héritiers étrangers ; permets
que je te trompe avec ta volonté comme tu m’as trompée san s ma volonté128.
124
Luther, Oeuvres, tome III, p. 226.
125
Martin Luther, Œuvres, tome II, p. 237.
126
Ibid., p. 236.
127
Luther, Oeuvres, tome III, p. 226.
128
Luther, Oeuvres, tome III, p. 228.
129
Ibid.
130
Eric Fuchs, « Sexualité » in Isabelle Engammare (sous dir.), Encyclopédie du protestantisme (Paris/Genève :
Cerf/Labor et Fides, 1995), p. 1448.
33
adresse et par des pratiques artificieuses, mais encore contraintes par force à
s’engager dans ce maudit et malheureux esclavage131.
Comme Luther, Calvin défend l’idée selon laquelle l’Église n’a aucun droit d’interdire
le mariage et la jouissance du sexe.
131
Jean Calvin, Institution de la religion chrétienne, tome troisième, trad. par. Charles Icard (Genève : Guers,
1818), p. 247.
132
Martin Luther, Œuvres, tome III, (Genève : Labor et Fides, 1963), p. 235.
34
ANNEXE 3
L’homme et la femme dans leur particularité
Extrait de Dr Paul Popenoe, fondateur de l’Institut Américain des Relations
Familiales à Los Angeles, in James C. Dobson, Le mariage et la sexualité (Deerfield :
Miami, 1992), p. 81-82.
Selon Dr Paul Popenoe, les hommes et les femmes diffèrent considérablement
dans la manifestation de leur désir sexuel133.
1. L’homme et la femme ont les mêmes besoins en matière de valeur personnelle et de
sécurité affective, mais ils comblent généralement ces besoins de manière différente surtout
si l’épouse est une femme au foyer à plein temps. L’homme tire son estime du respect
d’autrui, tandis que la femme a besoin de l’amour d’autrui pour être à l’aise.
2. La femme a une constitution plus vigoureuse, peut-être à cause de cette différence
chromosomique. Normalement, son espérance de vie dépasse de plusieurs années celle de
l’homme.
3. Les sexes diffèrent dans leur métabolisme de base : celui de la femme est généralement
plus faible que celui de l’homme.
4. Ils se différencient par la structure de leur squelette : la femme a en principe une tête plus
courte, un visage plus large, un menton moins saillant, des jambes plus courtes et un tronc
plus long. Habituellement, l’index de la femme est long que son auriculaire. Les garçons
gardent leurs dents plus longtemps que les filles.
5. Les femmes ont un estomac, des reins, un foie et un appendice plus grands, mais des
poumons plus petits.
6. Sur le plan des fonctions, la femme en a plusieurs et non des moindres qui manquent
totalement à l’homme : la menstruation, la grossesse, la lactation. Celles-ci influent toutes
sur son comportement et ses sentiments. Elle dispose dune plus grandes variété
d’hormones que l’homme. La même glande n’a pas le même comportement d’un sexe à
l’autre : la thyroïde de la femme est plus grande et plus active, elle se développe durant la
grossesse, ainsi que durant les règles ; elle la prédispose davantage aux goitres, améliore
sa résistance au froid, est responsable de sa peau lisse, de son corps relativement moins
poilu, et de la fine couche de graisse sous-cutanée qui constituent les éléments essentiels
de sa beauté. Elle contribue aussi à son instabilité émotionnelle : elle rit et pleure plus
aisément.
7. Le sang de la femme contient davantage d’eau, 20 % de globules rouges de moins.
Comme ceux-ci fournissent l’oxygène aux cellules du corps, elle se fatigue plus vite et elle
est plus sujette aux évanouissements. Aussi sa vigueur constitutionnelle est-elle
essentiellement à la longue échéance. Quand pendant la guerre, on a fait passer la journée
de travail dans les usines britanniques de 10 à 12 heures, les accidents des femmes ont
augmenté de 50 %, alors que ceux es hommes restaient au même niveau.
8. La force physique des hommes dépasse de 50 % celle des femmes.
9. Le cœur des femmes bat plus vite : 80 pulsations par minute, contre 72 pour les hommes :
leur pression artérielle (inférieure de 0,10 à celle des hommes) varie de minute en minute,
mais elles sont beaucoup moins sujettes à l’hypertension, du moins jusqu’après la
ménopause.
10. Leur capacité vitale ou leurs capacités respiratoires sont plus faibles dans un rapport de
7 pour 10.
11. Elles supportent mieux que les hommes les hautes températures : leur métabolisme
ralentit moins.
133
James Dobson, Le mariage et la sexualité (Deerfield : Vida, 1982), p. 76-77.
35
ANNEXE 4
Facteurs de changements et de déviances par rapport à la sexualité
Extrait de Buakassa Tulu Kia Mpansu134
134
Buakasa, « La sexualité. D’une culture à l’autre », in Association des Moralistes zaïrois, Morale et société
zaïroise; actes de la première rencontre des moralistes zaïrois du 1er au 4 Novembre 1978, p. 63-72.
135
Ibid.
136
Ibid. Dans la tradition, le mariage est précoce et cette précocité est valorisée, et cela contrairement aux
sociétés modernes où la précocité du mariage est indigne.
137
Ibid.
138
Ibid.
139
Buakasa, « La sexualité. D’une culture à l’autre », in Association des Moralistes zaïrois, Morale et société
zaïroise; actes de la première rencontre des moralistes zaïrois du 1er au 4 Novembre 1978, p. 63-72.
140
Ibid.
36
ANNEXE 5
2. Le lévirat/sororat
La loi hébraïque obligeait un homme à épouser la veuve de son frère mort sans
descendant mâle. Cette pratique est appelée lévirat. En ethnologie, le lévirat est la coutume
selon laquelle la ou les épouses d’un homme deviennent à sa mort les épouses de son frère,
de ses frères142. Comme la polygamie, le lévirat dans certaines sociétés africaines est aussi
règlementé par le groupe social, parce qu’en Afrique, la femme est la propriété du groupe
familial, partant du clan. Vangadang le confirme pour le peuple marba en ces mots : « Elle
est considérée comme un bien matériel pour la famille de son époux. Ainsi, quand le mari
meurt, la femme et les enfants sont donnés en héritage au même titre que les biens
matériels du défunt »143. Le but est de s’occuper des orphelins ou de perpétuer le nom du
141
Suite à cette disparité d’attitude des dénominations envers les polygames et de leur traitement par l’Église,
l’on observe curieusement dans certains milieux l’émergence des communautés des polygames, créées par des
polygames et constituées des polygames. Les motifs de leur émergence varient d’un contexte à l’autre, certes,
mais elles sont créées sur fond de colère, de révolte, de revendication de l’autonomie ou de responsabilité dans
l’Église.
142
Dictionnaire Le Petit Larousse 2008 Multimédia. CR-ROOM PC.
143
Vangadang, p. 25.
37
défunt, parce que le lévirat lie la femme au clan de son époux. Coutume très pratiquée avant
les indépendance s, le lévirat est une pratique moins acceptée par et dans les sociétés
modernes. Sa pratique devient un sujet de débat entre la tradition et la modernité.
Il se trouve que certains membres d’églises, hommes et femmes, sont fortement liés
par et à cette pratique malgré les injonctions de leur éthique chrétienne. Il en va de même
pour le sororat qui est le système où la sœur cadette de l’épouse décédée vient remplacer
celle-ci auprès du mari. De nos jours, cette pratique est plus relevée en milieu rural qu’en
milieu urbain où toute acceptation d’une charge est déterminée par le standing économique
de la personne. Les hommes, contraints par les exigences de la tradition, s’engagent à
prendre en plus de leur épouse la ou les veuves du frère défunt. Il y en a qui, sous les
regards impuissants de leur église et leaders, sont rendus victimes la pression du groupe
social. Et les églises voient faire, laissent faire par les uns ou les autres.
C’est justement en ce moment de persécution ou de déviation par rapport à la norme
biblique que l’Église est appelée à faire preuve de présence auprès des victimes pour les
fortifier et les encadrer. C’est aussi l’occasion pour l’Église de donner des enseignements
contextuels afin de corriger les erreurs dans les cœurs et libérer les âmes africaines des
liens du mal et de la pesanteur culturelle. Car, en dépit des déviations que nous impose la
tradition et des défis qu’elle révèle pour le témoignage chrétien, la voie de Dieu demeure
immuable pour servir de norme en matière de foi et de conduite dans ce monde moderne.
144
Diocèse de Goré, Foi et tradition ; inculturer et évangéliser en profondeur, p. 17.
145
Ibid. p. 25.
38
mariage est pour la vie des deux personnes, car le lien de mariage unit une personne à une
autre de leur vivant. Dès qu’intervient la mort, ce lien est rompu et rien ne peut empêcher le
veuf ou la veuve de se remarier si le désir l’y engage et la force le lui permet. Aucun délai
n’est fixé dans l’Ecriture auquel l’on doit se conformer. Aussi, le veuvage n’est soumis à
aucun rite indiqué dans l’Ecriture146.
Autres défis à la fois latents et patents que l’Église en Afrique est appelée à relever
par l’enseignement relèvent des facteurs complexes, à savoir scolarisation, urbanisation,
industrialisation, argent. L’urbanisation croissante qui exige des heures de séparation entre
parents et enfants dans les ménages. Ces enfants abandonnés pour des raisons
professionnelles manquent d’affection, d’éducation et de sécurité dans les familles. Puisqu’ils
se forment sur tous les plans sans encadrement et sans repère, ces enfants sont parfois
abusés et maltraités par les adultes recrutés pour la cause, mal vus par les parents comme
s’ils étaient des ennemis. L’urbanisation engendre un autre phénomène social, l’exode rural
qui verse les jeunes et les bras valides dans les villes à la recherche d’emploi et de
nouveaux modes de vie.
Ce mouvement de masse crée d’autres situations socioculturelles telles que le
brassage des cultures, la promiscuité faute d’habitat adéquat et de moyens pour se prendre
en charge, le phénomène des enfants de la rue. Il en résulte le viol de filles par leurs
employeurs, la pauvreté ou la misère dans les villages fautes de bras valides et même dans
les villes faute de compétence pour telle ou telle activité, la prostitution, l’exposition à
l’influence d’autres éducateurs parallèles (internet, télévision, presses, etc.). Par voie de
conséquence, le braquage à mains armées, la prévalence du VIH/SIDA dans les villes, la
croissance de l’effectif des orphelins, tout cela devient le lot quotidien pour les sociétés
africaines.
146
Il se trouve que dans la pratique, le veuvage imposé ou consenti par la personne concernée entraîne et/ou
provoque la cupidité. Généralement, le soin pris pour le revêtement de la personne au terme d’un délai donné,
l’investissement dans le matériel sort de la logique quand on se rend compte de la manière dont les gens émettent
des réserves vis-à-vis de leurs bien-aimés malades.
39
ANNEXE 6
2. Les fiançailles
Il y a deux éléments importants à mentionner dans cette partie : le cadre du choix et
la durée des fiançailles.
Parlant du cadre du choix du fiancé ou de la fiancée, il convient de noter que le
partenaire de vie dans le mariage doit être dans le Seigneur, appartenir à la famille de Dieu,
donc enfant (2 Co 6.14-16). Curieusement, les mariages inter raciaux, inter tribaux, inter
confessionnels (Cf. Jg 14.3) ne constituent pas une préoccupation majeure sur laquelle il
faut élaborer une réflexion. Le seul critère qui vaut est l’appartenance de la personne à la
famille de Dieu. Nous en voulons pour preuve le cas d’Isaac et Rebecca à propos duquel
Abraham exige à son serviteur par serment de prendre pour son fils Isaac une femme de sa
propre patrie. L’éthique d’Abraham déterminée par son alliance avec Dieu l’empêche de
compromettre la relation de sa descendance avec le Dieu saint par un mariage avec une
païenne (Gn 24.3-4).
147
Diocèse de Goré, Foi et tradition ; inculturer et évangéliser en profondeur , 6e Assemblée diocésaine, Donia,
27 Septembre – 2 Octobre 2004, p. 9-13.
40
En effet, l’exigence de Dieu d’épouser une personne parmi ses enfants est d’éviter
toute confusion, corruption, idolâtrie et donc perversion de la vie devant lui et dans la vie de
ses enfants. Quelques fois, pour certaines raisons d’ordre social ou culturel, la sagesse veut
que le jeune homme se marie avec une fille de son propre milieu. Notons que dans la Bible,
la fiancée est parfois appelée « épouse » et se trouve liée par les mêmes obligations de
fidélité vis-à-vis de celui qui l’a choisie.
Au sujet de la durée des fiançailles, il convient de dire qu’elle est indéterminée, même
dans l’Ecriture. Dieu n’a pas laissée une norme devant régir la gestion des fiançailles. Cet
élément est très relatif et dépend des circonstances ou contextes. Un regard sur Gn 24.1-
67 permet d’être sobre sur une décision à prendre. Ce texte dit qu’aussitôt après le
versement des cadeaux aux parents de Rebecca et l’obtention de l’accord de la fille. Le cas
de Jacob et Rachel dans Gn 29.18-21 est juste l’opposé de cette pratique. C’est après sept
ans de service qui équivalent à sept ans de fiançailles que Jacob réclame Rachel pour
femme pour la consommation du mariage. Dans Matthieu 1.18, la durée des fiançailles entre
Joseph et Marie semble avoir une durée relative.
En effet, les leaders d’églises et des mouvements des jeunes doivent prendre le soin
d’instruire les parents sur leur attitude vis-à-vis des enfants pendant leur croissance et sur la
nécessité de leur accorder une attention particulière par rapport à leurs intentions sexuelles.
L’encadrement spirituel doit résoudre le problème des fluctuations que développent certains
jeunes dans des moments de crise émotionnelle. Un autre élément d’une importance relative
est la dot dans le processus du mariage.
4. La célébration du mariage
Cette phase renferme également quelques étapes selon les coutumes africaines.
Cependant, pris sous l’angle biblique et théologique, il y a deux éléments essentiels pour
rendre le mariage concret et lui rendre toutes ses valeurs. Il s’agit de la célébration et de la
consommation du mariage.
Premièrement, en Israèl et chez les peuples voisins, les cérémonies de mariage sont
organisées par les parents du jeune homme à son domicile ou chez les parents de la fille Cf.
Gn 29.22. La fête des noces organisée par le père de l’époux, est l’occasion des
réjouissances populaires considérables (Mt 22.1ss, 25.1ss, Jn 2.1ss). On peut voir en cela
l’avant-goût des noces que Christ au ciel prépare pour l’Église, son épouse. Or, le mariage,
dans nos sociétés contemporaines, est souvent une occasion de disputes parce que
148
« Easton’s Bible Dictionary (Revised) » in CD-ROOM Theophilos 3.
41
l’homme et la femme ont brûlés les étapes. De nos jours, l’Eglise est le lieu indiqué et neutre
où les cérémonies de mariage peuvent et/ou doivent être organisées. Exception est faite
pour les cas spécifiques que l’Eglise peut étudier et délibérer à propos. Généralement, les
parents et les amis bénissent les mariés et leur souhaitent du bien (Gn 24.60, Rt 4.11).
Deuxièmement, la consommation du mariage est la phase ultime tant attendue par
les nouveaux mariés avec l’approbation des deux familles et de toute la communauté,
surtout la bénédiction de l’Église. Généralement, les mariés sont escortés jusqu’à la
chambre nuptiale, souvent par les parents (Gn 29.23) afin de leur donner l’occasion
d’expérimenter la joie, la grandeur et la profondeur de ce don de Dieu qui est la sexualité149.
Cette phase exige par endroits (coutumes en vigueur dans certaines parties du Proche-
Orient) l’examen des preuves de la virginité de la jeune mariée (Dt 22.13-21). Ici, il importe
de noter que « le but du lien conjugal n’est pas de garantir la présence d’un partenaire
sexuel, mais de permettre de vivre ce fait paradoxal qu’on ne devient vraiment soi que dans
le service d’un autre »150. On parlerait de la découverte de soi et de l’autre dans cette
communion intime de deux êtres.
149
Benno van den Toren, « Sexualité et intimité », p. 1.
150
Pipper, L’Évangile et la vie sexuelle, p. 107.
42
Introduction .......................................................................................................................... 1
I. SEXUALITE DANS LE PLAN DE DIEU ........................................................................ 2
A. Sexualité dans la Bible ....................................................................................................... 2
1. Création de l’homme et de la femme ................................................................................... 2
2. La sexualité dans le contexte du péché ................................................................................ 4
B. Importance de la sexualité dans le plan de Dieu .................................................................. 6
1. Valeur de la sexualité .......................................................................................................... 6
2. But de la sexualité ............................................................................................................... 6
3. Limite de la sexualité (perspective eschatologique) ............................................................. 7
II. SEXUALITE DANS LES SOCIETES AFRICAINES ................................................... 8
A. Sexualité dans les sociétés africaines traditionnelles ........................................................... 8
1. Mœurs africaines relatives à la sexualité.............................................................................. 8
2. Les pratiques déviantes de la sexualité en Afrique ............................................................. 11
B. Sexualité dans les sociétés africaines modernes ................................................................ 13
1. Liberté et droits humains ................................................................................................... 13
2. Vulgarisation du programme de planning familial et du sexe sans risque (contraception) .. 14
3. Educateurs parallèles sur la sexualité ................................................................................. 14
C. Quelques défis de la sexualité contemporaine dans les églises africaines........................... 15
1. L’utilisation des contraceptifs............................................................................................ 15
2. Le VIH/SIDA et les PV/VIH ............................................................................................. 16
3. Disparité de la sérologie et manque de virilité dans le couple ............................................ 16
III. REPONSES DE LA BIBLE AUX ORIENTATIONS SEXUELLES ......................... 17
A. Le plaidoyer de l’Église................................................................................................... 18
1. Education sur la sexualité des jeunes ................................................................................. 18
2. Enseignement sur le mariage et le célibat .......................................................................... 19
3. Enseignement sur la sexualité et le mariage ....................................................................... 20
B. Rôle des leaders ................................................................................................................ 22
1. Communication verbale sur la sexualité ............................................................................ 22
2. Communication non verbale sur la sexualité ...................................................................... 23
C. Rôle de la théologie africaine sur la question de la sexualité ............................................. 23
1. Théologie en dialogue avec la tradition sur la sexualité ..................................................... 23
2. Repenser le mode de communication de l’éthique chrétienne de la sexualité ..................... 24
Conclusion ........................................................................................................................... 25
BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................. 26
ANNEXES ........................................................................................................................... 28
TABLE DES MATIERES .................................................................................................. 42