La deuxième étape de la vision de Pharrell Williams pour Louis Vuitton s'est déorulée ce jeudi 30 novembre à Hong Kong. Alors que la nuit tombait sur le port Victoria, environ 1 200 invités se sont massés le long de l'Avenue of Stars, l'équivalent local du Walk of Fame d'Hollywood à Los Angeles. Des tonnes de sable recouvraient la piste et un fond de ukulélé flottait dans l'air humide, ce qui laissait présager de l'état d'esprit de Pharrell pour son deuxième défilé.
L'artiste touche-à-tout présentait sa première collection pre-fall, une offre de mi-saison souvent conçue pour approvisionner les boutiques entre les principaux défilé du début et de mi-année. Il s'agissait cependant de l'un des défilés les plus attendus depuis les débuts pharamineux de Pharrell en juin dernier en marge de la Fashion Week de Paris, lorsque le créateurs de hits avait orchestré l'un des moments de mode masculine les plus mémorables sur le Pont-Neuf à Paris.
Son défilé parisien a marqué un tournant dans l'histoire de la mode, en associant comme jamais auparavant, luxe et culture populaire. Si les débuts de Pharrell était autant axés sur le spectacle que sur les vêtements, à Hong Kong, on a assisté à l'émergence d'un langage stylistique global passionnant. Nous avions déjà une idée de ce à quoi ce Louis Vuitton pouvait ressembler grâce à ce show parisien. Hong Kong nous a donné beaucoup plus d'indices sur ce à ressemblera le Louis Vuitton de Pharrell. Et si ce n'était pas déjà clair, il est désormais difficile de le nier – qu'après seulement deux défilés, que Pharrell sera une force considérable dans la mode masculine de demain.
Sous les lumières brillantes de la skyline du centre de Hong Kong, les invités ont pris place le long d'une piste si longue qu'on pouvait à peine en apercevoir la fin. Un bateau surmonté de voiles au LV monogrammé sillonnait les eaux à côté d'une immense flotte d'embarcations qui semblait saluer les célébrités présentes, de l'acteur chinois Dylan Wang, à la superstar locale Anson Lo. Alors que les joueurs de ukulélé quittaient le podium, le spectacle a démarré sur une bande-son idéale pour la plage composée par Pharrell en personne, en collaboration avec Swae Lee et Rauw Alejandro. La veille du spectacle, Pharrell nous avait confié qu'il avait pensé à “Hawaï façon Hong Kong”, en imaginant naviguer entre les deux destinations, avec des costumes légers et des chemises Aloah entassées dans une malle siglée Louis Vuitton.
Il est désormais clair que la vision de Pharrell pour Louis Vuitton est fermement ancrée dans les codes du voyage et des échanges culturels. Au cours des nombreuses époques de la maison de luxe du groupe LVMH, note Pharrell, “la mode s'est inspirée de ce dont le voyageur a besoin, de ce qu'il veut porter, de l'endroit où il se rend et de l'environnement dans lequel il évolue. C'est ce qui m'a inspiré.” La nouvelle ère de Vuitton s'inscrit dans la continuité de cette idée de voyage, avec la même synthèse entre l'est et l'ouest que celle qui transparaît dans le style personnel du créateur, qui mélange streetwear américain, le tailoring européen et workwear japonais. Lorsqu'il a accepté le poste, Pharrell Williams a déclaré qu'il créait pour lui-même, parce qu'il était un client privilégié de Louis Vuitton. Ce qu'il souhaite faire de Louis Vuitton devient de plus en plus intéressant. Le costume blanc cassé brillant qui a ouvert le défilé, le pantalon taillé avec une coupe flamboyante, semblait être l'incarnation pure du goût et du style de Pharrell Williams.
Les pré-collections, destinées aux clients qui dépensent beaucoup d'argent, sont souvent très marquées par l'omniprésence de logos. Ce n'était pas le cas de celle présentée à Hong-Kong par Pharrell. Ce dernier semblait manifestement plus intéressé par l'expression d'une sensibilité stylistique légitime, qui lui parlait lorsqu'il pensait à Hong Kong. Il l'a qualifiée de “mentalité de dandy”, concrétisée par des costumes en chambray doux et aérés, et des vestes de marin boutonnées avec des perles, une autre touche personnelle du créateur. "Ce qui est extraordinaire avec les perles, c'est qu'elles proviennent d'un organisme vivant, nous a expliqué Pharrell, et quand on les met sur notre corps, c'est très différent des diamants. Il y a une différence. C'est une chose magnifique.”
Il y avait une dynamique intéressante entre le travail présenté sur le podium et les tenues dans la foule d'invités. Aucun des vêtements de Pharrell n'est encore disponible, à moins que vous ne vous appeliez Pusha T, présent dans l'assemblée, qui portait une veste en cuir Damoflage du défilé de Paris. La collection printemps-été 2024 de Pharrell sera disponible en janvier. En attendant, les quelque 600 invités de l'Avenue of Stars étaient habillés avec des pièces d'anciennes collection qui, en comparaison, avaient des airs clinquants. Il était plutôt passionnant d'imaginer à quoi ressemblerait la scène lorsqu'ils pourraient essayer le côté plus dandy de Louis Vuitton avec des mocassins en daim bicolore et tout le reste.
Pharrell affirme que les vêtements sont des “vecteurs d'énergie” et, au fur et à mesure que le défilé se poursuivait, la vibe sur la piste se modifiait. Le marin semblait avoir atteint Hawaï pour ensuite contempler les vagues. La mode sur le thème du surf est compliquée : c'est une catégorie qui a toujours eu plus ou moins de succès et d'échec. Pharrell s'est jeté à l'eau avec des imprimés tropicaux très vifs qui recouvraient des combinaisons, des ensembles et des piles de sacs. Même s'il reconnaît qu'il n'est pas un grand surfeur, Pharrell Williams est sincère dans son admiration pour cette culture, puisqu'il a grandi à Virginia Beach sur le côte est des États-Unis, où se déroule chaque année un championnat de surf.
Plusieurs surfeurs – des hommes comme des femmes, ont participé au spectacle. La veille, Pharrell a laissé entendre qu'il était intéressé par une ligne Louis Vuitton davantage unisexe : “Je sais que nous faisons du menswear mais nous fabriquons des vêtements pour les humains avant tout. Un bel objet est un bel objet, et c'est ce que nous devrions faire. Nous devons nous concentrer sur cela.” “Il prend des risques, a déclaré Pusha T à propos de la collection, mais j'ai l'impression que c'est ce que nous voulons, c'est ce que le consommateur veut.”
Le défilé s'est achevé, comme beaucoup de défilés à l'étranger le font, par un spectacle de lumière à base de drones. Les téléphones se sont emballés tandis qu'une vague de lumières au-dessus du port se transformait en “LV Lovers”. Pharrell, coiffé d'un béret en raphia et vêtu d'un autre costume blanc cassé brillant, s'est élancé sur la piste pour saluer ses amis et sa famille.
La veille, je lui ai demandé s'il ressentait une certaine pression avant son deuxième défilé, compte tenu de l'ampleur et du succès du premier. Et comment abordait-il la suite ? “Vous vous posez ce genre de question lorsque c'est votre objectif, a-t-il répondu, mon objectif est de raconter des histoires et d'élever la marque, et pas seulement de la faire monter d'un cran - parce que c'est un escalier.” Pour reprendre une autre métaphore : Pharrell est bien placé pour prendre des vagues de plus en plus importantes.
