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Variole du singe : une nouvelle souche plus dangereuse apparue en RDC inquiète l’OMS et les chercheurs

Contrairement à la souche I ou II, la mutation du virus du mpox baptisée « Ib » s’est aussi propagée chez les personnes hétérosexuelles et par contacts non sexuels, au sein de familles ou à l’école.

Le Monde avec AFP

Publié le 27 juin 2024 à 17h00

Temps de Lecture 4 min.

Plus transmissible et plus dangereuse que les précédentes, une nouvelle souche du virus mpox baptisée « Ib », responsable de la mort d’enfants en République démocratique du Congo (RDC), pourrait se propager à d’autres pays, alertent des chercheurs et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) mercredi 26 juin. Tous les Etats devraient se préparer « avant qu’il ne soit trop tard », a déclaré à l’AFP Jean-Claude Udahemuka, chercheur à l’université du Rwanda qui étudie cette épidémie.

Depuis la première détection de la maladie chez des humains en RDC en 1970, mpox – également connu sous le nom de variole du singe ou monkeypox – a engendré des flambées régulières, principalement en Afrique, sous l’effet de la souche I du virus.

Mais en 2022, une épidémie mondiale portée par la souche II, dix fois moins mortelle, s’était propagée dans plus d’une centaine de pays où la maladie n’était pas endémique, touchant surtout des hommes homosexuels et bisexuels. En deux ans et demi, 97 208 cas, dont 186 décès, ont été notifiés à l’OMS. Les Etats-Unis, le Brésil, l’Espagne, la Colombie, la France, le Mexique, le Royaume-Uni, l’Allemagne, le Pérou et la Chine représentent plus de 80 % des cas signalés confirmés. L’épidémie avait rapidement décru grâce à la vaccination en pharmacie notamment.

« Incroyablement inquiétantes »

Dans les zones endémiques d’Afrique où sévit la souche I, les flambées découlaient jusqu’alors majoritairement de contacts avec des animaux infectés, par exemple en mangeant de la viande de brousse. Mais « quelque chose est apparu différent » dans un foyer de mpox détecté en septembre 2023 parmi des travailleurs du sexe dans la ville minière isolée de Kamituga, en RDC, a expliqué John Claude Udahemuka, lors d’une conférence de presse en ligne lundi.

Contrairement aux épidémies précédentes dans ce pays d’Afrique centrale, le virus a été transmis lors de rapports entre personnes hétérosexuelles. Des tests ont identifié une mutation de la souche originelle, « sans aucun doute la plus dangereuse à ce jour », selon John Claude Udahemuka.

Plus de 1 000 cas de mpox souche Ib ont été signalés dans la province du Sud-Kivu depuis, a déclaré Leandre Murhula Masirika, qui pilote des recherches locales, évoquant plus de 20 nouveaux cas chaque semaine rien qu’à Kamituga. Or, selon les chercheurs, 5 % des adultes et 10 % des enfants contractant cette souche de la maladie en meurent. Elle provoque des « éruptions cutanées horribles sur tout le corps », alors que la souche II provoque des lésions normalement plus limitées à la zone génitale, a exposé Trudie Lang, de l’université d’Oxford.

Autre changement majeur : la souche Ib s’est aussi propagée par contacts non sexuels, au sein des familles ou des enfants à l’école. Il y a eu un « grand nombre » de transmissions entre les mères, ou les personnes s’occupant d’enfants, et les enfants, a pointé Trudie Lang. De nombreuses fausses couches ont également été recensées, et les chercheurs étudient d’éventuels effets sur la fertilité.

Ces différences significatives par rapport aux souches précédentes de mpox sont « incroyablement inquiétantes », selon l’experte d’Oxford. Et les cas à l’hôpital ne sont probablement que « la partie émergée de l’iceberg ».

« Nous avons très peur »

Il reste des inconnues de taille sur la nouvelle souche, qui s’est propagée aux villes de Bukavu, Uvira et Kamanyola, puis cette semaine de Goma, capitale de la province du Nord-Kivu. Ces villes sont proches des frontières avec le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda.

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Si la nouvelle souche n’a pas encore été signalée en dehors de la RDC, il est possible qu’elle circule déjà dans les pays voisins, a déclaré Murhula Masirika. Et Goma, notamment, dispose d’un aéroport international. « Il est tout à fait possible que le virus se retrouve dans un avion », a alerté Trudie Lang, appelant le monde à agir rapidement pour endiguer l’épidémie.

Les scientifiques rappellent que l’un des outils de riposte reste la vaccination des travailleurs du sexe locaux. Des chercheurs en Afrique ont plaidé pour que la RDC ait accès aux vaccins et traitements contre mpox utilisés dans la plupart des pays touchés par l’épidémie de 2022, même si on ignore encore leur impact sur la nouvelle souche.

Quant aux vaccins contre la variole, bon marché, largement disponibles dans beaucoup de pays et en capacité d’agir contre mpox, ils n’ont pas encore été mis à disposition à Kamituga, déplore John Claude Udahemuka. Or, si la souche actuelle se propage davantage, elle causera « vraiment de gros dégâts », a averti Murhula Masirika : « Nous avons très peur. »

« Sous circonstances exceptionnelles »

Une réunion d’urgence s’était tenue à Kinshasa à la mi-avril sous l’impulsion du Centre de surveillance et la prévention des maladies (Africa CDC), l’agence de santé publique de l’Union africaine, qui avait abouti à la décision d’homologuer en urgence deux vaccins qui ont déjà fait leurs preuves pour les enfants comme pour les adultes. Sur le volet du traitement de la maladie, les autorités sanitaires congolaises avaient également annoncé qu’un antiviral spécifique allait obtenir une autorisation de mise sur le marché « sous circonstances exceptionnelles » dans les trois mois.

Un vaste projet de distribution de matériel de prévention et de médicaments essentiels décidé lors de la conférence de Kinshasa a également débuté à la mi-juin dans les régions congolaises les plus touchées par la souche I du virus : l’Equateur, le Sud-Ubangi, le Sankuru et le Sud-Kivu. Enfin, Africa CDC a créé, à l’occasion, un comité de pilotage incluant les pays d’Afrique centrale et d’Afrique l’Ouest concernés par l’épidémie ou susceptibles de l’être.

En RDC, le nombre de contaminations par le virus originel a été multiplié par trois depuis le début de l’année par rapport à la même période en 2023, avec 4 500 cas dont plus de 300 décès, selon l’OMS.

L’agence de santé des Nations unies s’était inquiétée dès la mi-décembre des risques d’une propagation rapide sur le continent. A la mi-juin, l’Afrique du Sud a déclaré ses deux premiers décès en moins de vingt-quatre heures, tandis que la France a confirmé, le 22 juin, un troisième cas de contamination sur l’île de La Réunion, voisines de Maurice et de Madagascar, dans l’océan Indien.

Le Monde avec AFP

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