Les populations du tiers-monde sont exposées, bien davantage que celles des pays industrialisés, au risque de la poliomyélite, qui est même en augmentation dans de nombreux pays tropicaux. La présence à la conférence de Dakar du médecin américain Jonas Salk, inventeur du premier vaccin antipoliomyélitique, aura donné à ce thème un relief tout particulier, d'autant que des acquisitions récentes sont en passe de modifier radicalement des théories que l'on pensait, sur ce point, solidement établies.
En 1954, Jonas Salk met au point aux États-Unis le premier vaccin efficace contre la poliomyélite. C'est un vaccin inactivé, tué, injectable, qui se révèle remarquablement efficace. Il est aussitôt testé avec succès sur deux millions d'enfants. Or, à la suite d'un défaut dans la fabrication du produit, une série d'accidents mortels surviennent qui discréditent totalement, aux États-Unis du moins, un vaccin dont la formule, pourtant, n'était nullement en cause. Un certain nombre de pays européens l'adoptent néanmoins, (Suède, Finlande, Pays-Bas, France), et la vaccination antipoliomyélitique se répand rapidement, faisant chuter de manière spectaculaire l'incidence de la maladie dans des pays industrialisés qui lui payaient encore un lourd tribut. Ainsi, en France, le nombre de cas déclarés au cours de l'année 1957 dépassait-il 4 000, entraînant plus de 300 morts.
En 1957, un autre chercheur américain, Albert Sabin, met au point un deuxième vaccin contre la poliomyélite, vivant cette fois, donc procurant l'immunité par la voie d'une immunisation naturelle, extrêmement maniable et d'une grande commodité d'emploi puisqu'il peut être administré par voie buccale.
À partir de 1961, cette formule se répand dans l'ensemble du monde industrialisé. Certains pays en font même un usage exclusif (États-Unis, Grande-Bretagne, U.R.S.S. et démocraties populaires, Japon...).
En France, où la vaccination contre la poliomyélite est devenue obligatoire en 1964, les autorités sanitaires ont choisi de laisser subsister les deux formules : le vaccin inactivé type Salk (1) et le vaccin vivant, oral, type Sabin, qui se partagent à peu près pour moitié le marché. Néanmoins, le vaccin Sabin a acquis, sur l'ensemble des marchés mondiaux, une place prépondérante.
La surprise devait venir de l'utilisation de ce vaccin vivant dans les pays tropicaux, lorsque ceux-ci ont commencé à en faire usage. La protection des enfants vaccinés, à l'aide de la formule Sabin, en effet, se révélait faible ou incertaine, d'après les études menées sur le terrain en divers points du globe (Mexique, Inde, Thaïlande, Iran, Côte-d'Ivoire, Nigeria et plusieurs pays du Moyen-Orient). L'efficacité du vaccin peut être nulle, parfois, chez 70 % des enfants vaccinés (2) alors qu'elle est absolue, généralement, chez 90 % des enfants européens ou nord-américains. Une très forte augmentation de la dose et des prises ne modifiait pas nettement les résultats.
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