Alors que, dans une copropriété, les balcons et leurs garde-corps sont des parties privatives, les propriétaires de ces derniers peuvent-ils être contraints par la collectivité de les faire rénover à leurs frais ? Telle est la question que pose l’affaire suivante.
En 2007, une société civile immobilière (SCI), propriétaire d’un grand appartement, fait rehausser les garde-corps de ses fenêtres, après en avoir obtenu l’autorisation de l’assemblée générale. En 2015, cette assemblée décide de faire ravaler l’immeuble.
Elle adopte des résolutions qui concernent, d’une part, les façades, et, d’autre part, les « bow-windows, garde-corps, persiennes et croisées » desdites façades. Les travaux sur les façades, parties communes, doivent être financés par tous, en fonction de leurs tantièmes de copropriété ; les travaux sur les parties privatives doivent être payés par les seuls copropriétaires qui en possèdent.
Dans les deux cas, l’assemblée se prononce à la majorité simple, dite « de l’article 24 », soit la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés. La SCI, qui refuse de payer à nouveau pour le ravalement de ses garde-corps, effectué huit ans plus tôt, vote contre la deuxième résolution, mais elle est mise en minorité.
11 563 euros
Elle saisit la justice, en soutenant qu’un vote à l’unanimité s’imposait, s’agissant de parties privatives. Elle réclame le remboursement des sommes (11 563 euros) qu’elle a dû payer pour l’intervention sur ses garde-corps, une opération à laquelle elle s’est au demeurant opposée, la jugeant « inutile ».
Le tribunal de grande instance de Paris la déboute, le 19 décembre 2017. Il juge que les travaux qui affectent simultanément des parties communes et privatives doivent « être exécutés dans leur ensemble, afin de respecter l’harmonie des façades, qui doit être homogène ». Cette harmonie est prévue par le règlement de la copropriété, qui stipule qu’« aucun aménagement, aucune décoration ne pourront être faits sur les parties extérieures de l’immeuble, qui seraient susceptibles de nuire à l’harmonie de l’ensemble ».
Le tribunal précise que la décision qui concerne les parties communes et privatives « doit être prise à la majorité requise pour le ravalement, et non à l’unanimité de tous les copropriétaires ». Le ravalement relevant de l’« entretien et de la conservation » de l’immeuble, et non de son « amélioration », la majorité requise est bien celle de l’article 24.
La cour d’appel de Paris, que la SCI saisit, confirme ce jugement. Elle précise que « la double majorité requise en cas de parties privatives n’est nécessaire, aux termes de l’article 26 de la loi de 1965, que pour certains travaux, et pour imposer aux copropriétaires une modification à la destination de leurs parties privatives ou aux modalités de leur jouissance ». Or, le ravalement extérieur de l’immeuble ne relève pas de ces deux dernières catégories, et la Cour de cassation l’approuve, le 9 mars 2023 (21-25.644).
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