Nommé en 2021 à la présidence du Centre Pompidou, à Paris, dont il fut l’un des conservateurs au début des années 2000, Laurent Le Bon n’a jamais fait mystère de son intérêt pour la bande dessinée.
Pourquoi mettre ainsi en avant la bande dessinée ?
L’été est un moment propice pour innover en matière de programmation. On s’est dit que proposer de la bande dessinée entrerait en résonance avec les Jeux olympiques, dans la mesure où la jeunesse pourrait s’y retrouver, même si le médium parle à tout le monde. Nous avons voulu montrer sa diversité à travers un panorama qui s’avère être, finalement, un assez grand projet. Toutes les composantes du Centre Pompidou y ont contribué, même l’Ircam, avec un concert dessiné. Il faut aussi voir cette proposition comme un clin d’œil au nouveau projet culturel qui sera mis en œuvre en 2030, après les travaux de rénovation, et qui offrira un nouveau regard sur le Centre Pompidou à travers « tous ses étages ». Et pas seulement au Forum, où la bande dessinée avait été reléguée, quand j’avais voulu la défendre en tant que conservateur.
Vous faites allusion à l’exposition « Hergé » de 2006, dont vous étiez le commissaire, qui s’était tenue au rez-de-chaussée et non au Musée national d’art moderne.
Proposer une exposition sur Hergé avait été un vrai combat, je croyais vraiment passer un oral de licence d’histoire de l’art, du genre : « La BD est-elle un art ? » Le soutien du président de l’époque, Bruno Racine, qui est un grand tintinophile, fut déterminant.
Sur quel aspect la crispation s’était-elle concentrée ?
Sur la politique d’acquisition d’œuvres. Mes collègues conservateurs n’étaient pas favorables à ouvrir un nouveau champ d’acquisition. A l’inverse, je pensais que, plutôt que d’acheter un Matisse supplémentaire, il aurait été pertinent d’investir des champs qui n’avaient pas encore été labourés. Pour la petite histoire, cette expo « Hergé » n’apparaît pas, aujourd’hui, dans notre classement des expos temporaires les plus visitées. Elle a été invisibilisée, sous prétexte qu’elle était gratuite. Or, c’est peut-être l’un des plus grands succès du Centre…
Avez-vous à nouveau rencontré des résistances pour organiser « La BD à tous les étages » ?
Non. En proposant cette manifestation, j’ai senti de l’intérêt tant au niveau de la Bibliothèque publique d’information, qui est un acteur essentiel au Centre Pompidou pour la bande dessinée, que du département culture et création. A ma demande, le musée a suivi. Tout le monde est enthousiaste. Notre spécialité, qui est de montrer des originaux, se trouve renforcée par la magie des trésors qui sont montrés. On en prend plein les yeux. La bande dessinée est d’une telle diversité, d’un tel foisonnement.
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