« Je ne vous cache pas que je passe des nuits où j’angoisse un peu… Et aussi des jours. » Le jour – le 7 juin – où l’on rencontre Thomas Jolly, l’homme choisi il y a deux ans pour organiser les cérémonies des Jeux olympiques de Paris 2024, l’Assemblée nationale n’a pas encore été dissoute. On imagine que, depuis, ses nuits ne sont guère meilleures. La perspective de retrouver, côte à côte à la tribune, le président de la République, Emmanuel Macron, la maire (socialiste) de Paris, Anne Hidalgo, et un premier ministre issu du Rassemblement national, n’est plus une chimère inenvisageable.
Mais, pour l’heure, le metteur en scène qui a le vent en poupe (la rumeur le donne comme l’un des favoris pour l’Odéon-Théâtre de l’Europe à la rentrée) a d’autres questions en tête. Dans un hangar de banlieue au toit en béton armé et verre, près des voies ferrées de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), il vient découvrir les premiers pas d’une chorégraphie imaginée par Maud Le Pladec sur une musique de Victor Le Masne. Satisfaction visible à son sourire anguleux.
Cinquante danseurs répètent les mouvements hachés et joyeux que la chorégraphe, longs cheveux châtains, paupières surlignées, visage encadré de bijoux argentés, ongles à l’identique, sur un survêtement noir aux trois bandes blanches, vient de leur montrer. C’est populaire et contemporain à la fois. Quelques minutes seulement, mais qui suffisent à imaginer l’énergie et la synchronicité de ce qui va être donné à voir lors de la cérémonie d’ouverture sur les berges et les ponts de la Seine, tandis que, sur des bateaux, défileront les délégations d’athlètes. « Pour les JO, la danse, c’est moi, sourit Maud Le Pladec, qui dirige actuellement le Centre chorégraphique national d’Orléans avant de prendre, en 2025, la direction du ballet de Lorraine à Nancy. C’est mon ADN. [comprendre : cette énergie, cette foule compacte de danseurs] Pas un pont, pas une berge qui ne sera habitée par un événement artistique. »
« Hors du stade »
Ces cinquante performeurs ne sont en réalité qu’une partie des quatre cents qui composeront le tableau travaillé ici en « petit » comité… Quatre scènes. Dix ou douze tableaux sur les berges. Trois mille danseurs professionnels au total, d’ici et de partout, de France et d’au-delà… Une centaine de bateaux. « Un théâtre rêvé nommé Paris. Et son fleuve, s’enthousiasme la chorégraphe. Et, pour la première fois dans l’histoire des Jeux olympiques, pas dans un stade, mais hors du stade. » C’était l’idée de Thierry Reboul, le Marseillais spécialiste de l’événementiel, directeur exécutif des cérémonies, des événements et de la marque Paris 2024. Thomas Jolly, directeur artistique, y a ajouté sa patte imaginative. Alors que, traditionnellement, le show suit le défilé très protocolaire des athlètes, il a persuadé ses commanditaires de mélanger les deux. Une double première.
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