C’est un combattant déterminé pour un journalisme libre, indépendant et démocratique qui disparaît brutalement. Christophe Deloire, directeur et secrétaire général de l’ONG Reporters sans frontières (RSF), est mort des suites d’un cancer fulgurant, samedi 8 juin, à l’âge de 53 ans, à Paris. Il avait été hospitalisé au mois d’avril à la Pitié-Salpêtrière après la découverte de tumeurs au cerveau, puis à l’hôpital Saint-Louis, dans le 10e arrondissement de la capitale.
Les hommages se sont multipliés à l’annonce du décès de celui qui s’était vu confier, en juillet 2023, par le président de la République, Emmanuel Macron, la direction du comité de pilotage des Etats généraux de l’information (EGI), destinés à donner à l’information fiable et vérifiée un cadre solide face à la montée des fausses informations. « Christophe Deloire avait le journalisme au cœur. Pour la liberté d’informer et le débat démocratique, cet esprit libre se battait, sans frontières, sans repos », a écrit, sur X, le chef de l’Etat.
« Pilier du dispositif, infatigable défenseur du droit à l’information, Christophe a marqué les travaux des Etats généraux de l’information par son engagement, ses convictions, son énergie, son écoute, mais aussi son humanité », ont déclaré les membres des EGI à l’annonce de sa mort. « Il était un ardent défenseur de notre profession à un moment où notre travail et nos valeurs sont de plus en plus remis en question », a salué le directeur de l’information de l’Agence France-Presse, Phil Chetwynd. Pour Pierre Haski, président du conseil d’administration de RSF, « [il] a dirigé l’organisation à un moment crucial pour le droit à l’information. Sa contribution (…) a été fondamentale. »
Avant d’être un militant du journalisme, Christophe Deloire fut d’abord, et longtemps… un journaliste. Fils d’instituteurs, né en 1971 à Paray-le-Monial (Saône-et-Loire), il passe son bac en 1989 au lycée Camille-Claudel de Digoin (Saône-et-Loire) puis intègre une prépa HEC à Lyon. Diplômé de l’Essec en 1994, il commence sa carrière à TF1, puis rejoint la rédaction du Point en 1998 où il se consacre à l’investigation.
En 2003, il est récompensé par le prix Louis Hachette (aujourd’hui prix Jean-Luc Lagardère) pour un article consacré à l’enquête policière sur la cavale d’Yvan Colonna. Ce travail débouchera aussi sur un livre cosigné avec le journaliste Christophe Dubois, L’Enquête sabotée (Albin Michel, 2003). Avec M. Dubois, il signera trois autres ouvrages, toujours chez Albin Michel : Les islamistes sont déjà là (2004), sur l’infiltration de l’islamisme politique dans la république, Sexus politicus (2006) et Circus politicus (2012) sur les dessous de la politique française. « Il arrivait à faire des bouquins irrévérencieux, tout en restant du bon côté de la ligne », estime son ami Stéphane Colineau, journaliste à La Tribune Dimanche, qu’il a rencontré au moment où il était directeur de collection chez Flammarion. Dernier livre en date : La Matrice (Calmann-Lévy, 2022), à propos de l’immixtion des réseaux sociaux dans le journalisme et des usines à désinformation des régimes autoritaires.
Il vous reste 61.69% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.