Au siège du laboratoire pharmaceutique franco-autrichien Valneva, à Saint-Herblain (Loire-Atlantique), près de Nantes, un vent d’optimisme souffle. Après les bourrasques des trois dernières années, la société vient de décrocher, le 9 novembre, le feu vert de l’autorité de santé américaine pour lancer son vaccin contre le chikungunya, le premier au monde à être mis au point contre ce virus propagé par les moustiques tigres. De quoi gonfler le moral des troupes, alors que la société fêtait, en 2023, ses dix ans d’existence.
Le spécialiste des vaccins, qui a décidé, mercredi 20 décembre, lors d’une assemblée générale, de revoir la structure de sa gouvernance afin de la simplifier, revient en effet de loin. En 2020, alors que la pandémie de Covid-19 fige la planète, le laboratoire se lance, comme de nombreux autres, dans la course au vaccin. Issu de l’union, sept ans plus tôt, de l’autrichien Intercell et du français Vivalis, Valneva n’a encore jamais lancé un produit élaboré en interne depuis son mariage. Son vaccin contre l’encéphalite japonaise, Ixiaro, qui constitue ses principales ventes, est un héritage d’Intercell, celui contre le choléra, Dukoral, provient quant à lui d’un rachat. Le défi est immense, mais le laboratoire, confiant, se jette dans la bataille.
Sans soutien de la France, c’est grâce aux fonds du gouvernement britannique, avec lequel il conclut un accord d’approvisionnement de 100 millions de doses, qu’il développe son produit contre le Covid. Les investisseurs se ruent sur la valeur, et le titre flambe en Bourse. Mais l’avenir de Valneva ne s’écrira pas avec le Covid. L’arrivée des vaccins à ARN messager de Pfizer-BioNTech et de Moderna, qui inondent rapidement le marché, signe la fin de son aventure pandémique.
Lâché par le Royaume-Uni, qui rompt son contrat en septembre 2021, puis par l’Union européenne, qui abaisse sa commande de 60 millions à 1,25 million de doses, le laboratoire n’a plus de clients pour son vaccin, lorsque celui-ci est enfin approuvé, en Europe, en juin 2022. « Un cas de force majeure », résume Thomas Lingelbach, son patron, qui détaille : « Pour diverses raisons, nous sommes arrivés un peu trop tard. Le paysage de la vaccination contre le Covid avait changé avec le succès des vaccins à ARN messager. Nous étions face à un choix et nous avons décidé d’en rester là sur le Covid. »
« Les investisseurs boudent la valeur »
Sans le regret d’avoir tenté l’aventure. « Nous sommes extrêmement fiers d’avoir pu développer un vaccin contre le Covid avec une technologie classique et d’avoir obtenu une approbation. Cela a confirmé nos compétences de spécialistes des vaccins », souligne M. Lingelbach, qui assure que les finances de la société n’ont pas souffert de ce flop commercial, l’essentiel des coûts investis dans le vaccin contre le Covid ayant été couverts par les sommes non remboursables payées par les Etats lors de la conclusion des contrats.
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