L’intelligence artificielle, c’est promis, nous apportera une vie meilleure et des gains de productivité considérables, qui nous permettront peut être de moins travailler et de consommer moins de ressources. Mais, pour l’heure, c’est plutôt l’inverse qui se produit. Ses promoteurs en mesurent davantage le coût que les bénéfices. Pour élaborer ces fameuses machines pensantes, il faut d’abord leur apprendre à penser dans des centres informatiques géants. Entre juillet 2023 et juin 2024, la seule société Microsoft va dépenser 50 milliards de dollars (46 milliards d’euros) pour installer de nouveaux centres de données dans le monde entier, y compris en France.
Mais ce n’est pas le seul coût. Mercredi 15 mai, la même Microsoft a constaté, dans son rapport environnemental, que ses émissions totales de gaz carbonique avaient augmenté de 30 % par rapport à 2020. Très fâcheux puisque, cette année, la firme avait promis d’atteindre la neutralité carbone dès 2030, y compris chez ses différents sous-traitants. C’est d’ailleurs à cet échelon, chez les fabricants d’acier et de béton, pour ses centres, ou les producteurs de puces, pour ses ordinateurs, que se situe la totalité du dérapage.
Nous trouverons la solution, affirme, sur Bloomberg, le président de l’entreprise, Brad Smith. Pour lui, loin de ralentir cette marche en avant, il faut l’accélérer pour trouver la solution à ce problème. C’est ainsi que l’on a toujours fait avec la technologie qui trouve en elle les solutions à ses propres turpitudes.
Paradoxe confondant
Cela réveille la mémoire d’un vieil économiste britannique, mort en 1882, Stanley Jevons, et qui revient sur le devant de la scène. Son ouvrage le plus fameux traite de la ressource en charbon de la Grande-Bretagne. Ce faisant, il soulève un paradoxe confondant. En observant l’avènement des technologies énergétiques, depuis la machine à vapeur de James Watt, il constate que, plus les technologies permettent d’économiser de l’énergie, plus la consommation de cette énergie augmente ! Car l’efficacité grandissante développe les usages et les marchés. Cet « effet rebond », comme on l’appelle encore aujourd’hui, se constate à chaque choc ou révolution technologique. Les voitures consomment moins unitairement, mais on en achète plus et la consommation d’essence ne cesse d’augmenter.
Dans le cas de l’intelligence artificielle, le bond d’efficacité promet d’être considérable, que ce soit pour fabriquer de nouveaux médicaments ou pour concevoir des objets et des processus beaucoup plus économes en temps et en énergie. Mais son développement élargit la demande et conduit pour l’instant à une pollution supplémentaire.
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