C’est une fin de parcours brutale pour les 577 députés élus lors des élections législatives de juin 2022. La XVIᵉ législature n’est plus. En proclamant la dissolution de l’Assemblée nationale, dimanche 9 juin au soir, une heure après l’annonce de la défaite cinglante de son camp au scrutin européen, Emmanuel Macron, chef de l’Etat et garant des institutions, plonge la vie parlementaire dans l’inconnu.
Son choix de convoquer des élections anticipées alors que l’extrême droite a engrangé, dimanche, près de 40 % des voix aux européennes marque un tournant inédit sous la Vᵉ République : « C’est la première fois qu’un président dissout l’Assemblée après des élections perdues par son camp », souligne Marie-Anne Cohendet, professeure de droit constitutionnel à l’université Paris-I. Parmi les cinq dissolutions actées précédemment, celles de 1981 et 1988, ont été engagées pour éviter des cohabitations, du fait de la différence de durée de mandat alors en vigueur entre le président de la République (sept ans) et les parlementaires (cinq ans). Celle de 1997, reste un cas à part, Jacques Chirac, ayant dissous l’Assemblée pour obtenir une majorité plus large avant d’être battu par la gauche.
Lors de son allocution, le chef de l’Etat, qui disposait jusque-là d’une majorité relative, a argué que « la France [avait] besoin d’une majorité claire pour agir dans la sérénité et dans la concorde », constatant la « fièvre qui s’est emparée ces dernières années du débat public et parlementaire ».
Sans majorité absolue, l’Assemblée était-elle pour autant dysfonctionnelle au point de la dissoudre ? Non, à en croire Yaël Braun-Pivet (Renaissance). La présidente de l’Assemblée nationale a toujours défendu l’idée que malgré certaines réformes difficiles et trente-quatre motions de censure déposées en deux ans, les dix groupes hétéroclites de l’Assemblée parvenaient à remplir leur mission.
Rapports de force impossibles à anticiper
« Je pense qu’il y avait un autre chemin qui était le chemin d’une coalition, d’un pacte de gouvernement. Le président de la République a estimé en conscience que ce chemin n’existait pas. Il a pris ses responsabilités et je prends acte de cette décision », a-t-elle posé, lundi, sur France 2.
Le rendez-vous dans les urnes pour les Français est fixé aux 30 juin et 7 juillet – soit le délai minimal de vingt jours prévu à l’article 12 de la Constitution pour tenir des législatives anticipées –, deux semaines avant le début des Jeux olympiques. Au Palais-Bourbon, toute activité législative est désormais suspendue. D’ici une semaine, les contrats des collaborateurs de l’Assemblée deviendront caducs. Les textes (fin de vie, audiovisuel public…) qui devaient être examinés d’ici au 14 juillet et la fin de la session parlementaire sont ajournés. Le futur gouvernement devra les réinscrire à l’ordre du jour s’il souhaite les faire adopter.
Il vous reste 62.74% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.