Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

« Le Racisme ordinaire au travail » : une psychologue met en lumière le calvaire vécu par ses patients

Invitant le lecteur à pénétrer dans sa salle de consultation, la psychologue Marie-France Custos-Lucidi donne à voir les souffrances des salariés discriminés et décrypte les rapports de domination qui se jouent derrière les préjugés raciaux.

Par 

Publié le 16 mai 2024 à 07h00

Temps de Lecture 2 min.

Article réservé aux abonnés

« J’ai compris qu’elle voulait me détruire. Tous les matins, j’étais pliée en deux rien qu’à l’idée de me rendre au travail. Je vomissais, je pleurais, j’avais des crises d’angoisse, je ne dormais pas la nuit, mais il fallait que j’y aille. Cela a duré environ huit mois. » Face à sa psychologue, Esther revient sur le calvaire qu’elle a vécu dans la société d’événementiel où elle travaillait.

Sa directrice multipliait les humiliations. « Elle s’est mise à me parler petit nègre en permanence. C’était comme si j’étais sotte. Elle répétait comme un leitmotiv : “Moi pas comprendre toi.” » La quinquagénaire, métisse, a été durablement marquée : elle a été licenciée voici plus de trois ans et porte toujours une intense souffrance. « Je ne m’en sors pas », reconnaît-elle. Le cheminement avec sa psychologue lui permettra progressivement de retrouver de la sérénité, en décryptant notamment les rapports de domination qui se jouaient derrière les préjugés raciaux.

Dans son ouvrage, Le Racisme ordinaire au travail (Erès), la psychologue Marie-France Custos-Lucidi revient sur l’histoire vécue par sept de ses patients. Esther, Inaya ou Abdel… Tous ont connu de grandes souffrances dans le cadre professionnel, victimes de racisme et de discriminations. La psychologue met en lumière leurs douleurs, les nœuds psychiques dont ils vont tenter, séance après séance, de se libérer, mais aussi les processus déployés par leurs encadrants pour les soumettre.

On est saisi, au fil des pages, par les similitudes entre les différentes expériences relatées. La volonté d’excellence qui anime certains salariés, le travail intense fourni, et la difficulté à trouver des postes équivalents à leur niveau de diplôme. L’acceptation, aussi, durant de longs mois, des brimades. La collaboration, parfois, à un système dont ils réprouvent pourtant l’éthique.

Une « servitude volontaire »

Pour « sécuriser [un] titre de séjour » ou pour tenter d’intégrer un monde des « puissants » qui se refuse à eux, ils endurent, pris dans une « servitude volontaire ». Leur implication dans le système qui les ronge est une autre source de souffrance. Mais c’est en prenant conscience de cette même implication qu’ils parviendront à desserrer l’étau et à retrouver leur souffle vital.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés « Touche pas à mes tresses ! »

L’ouvrage nous permet de suivre pas à pas les patients, de comprendre les mécanismes subtils qui s’expriment, en eux, dans leur quête d’une « place sociale ». Le parcours professionnel croise l’histoire personnelle, familiale. De multiples facteurs s’entremêlent pour expliquer leurs agissements et, par extension, leur souffrance. Abdel, ingénieur de base de données, se souvient ainsi qu’enfant, sa mère lui répétait : « Ne faites pas de bruit, n’ayez de problèmes avec personne. » Cette assignation permet de mieux comprendre la relative passivité dont il fait preuve face aux humiliations et à un parcours professionnel qui l’affecte.

Il vous reste 18.72% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.