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Levothyrox : l’exigence de la transparence

Editorial. Une étude parue jeudi repose une nouvelle fois la question de la qualité du contrôle de la sécurité du médicament mais aussi le manque cruel de moyens des agents de l’expertise publique.

Publié le 05 avril 2019 à 11h26 Temps de Lecture 2 min.

Le tribunal de grande instace de Toulouse a ordonné pour la première fois l’expertise médicale des patients disant souffrir d’effets secondaires de la nouvelle formule du Levothyrox, en novembre 2017.

Editorial du « Monde ». La nouvelle formule du Levothyrox est-elle responsable des dizaines de milliers de cas présentant des effets indésirables, signalés en France par des patients ? La controverse dure depuis près de deux ans sans que les patients, d’une part, et les autorités sanitaires, de l’autre, parviennent à se mettre d’accord. L’étude franco-britannique, publiée jeudi 4 avril, à partir des données fournies à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) par le laboratoire Merck lui-même, fait pencher la balance en faveur des patients.

Nul doute que cette étude sera scrutée ligne à ligne ; mais elle offre à n’en pas douter, pour la première fois, une explication rationnelle à certains des troubles rapportés par les malades – troubles ayant largement été attribués, par les pouvoirs publics et de nombreux médecins, à un effet nocebo. Selon les conclusions de ces travaux, le caractère substituable des deux formules du Levothyrox, l’ancienne et la nouvelle, n’est pas garanti par le test de bioéquivalence réglementaire fourni par Merck. Un patient pourrait donc réagir différemment aux deux formulations.

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Dans l’affaire du Mediator, la pharmacovigilance avait été montrée du doigt, non sans raison. Mais ce faisant, d’autres procédures décisives, comme l’autorisation de mise sur le marché, avaient échappé à la critique. Dans le cas présent, la pharmacovigilance risque de nouveau d’être sur la sellette, mais les derniers développements de l’affaire du Levothyrox suggèrent qu’une bonne part du problème se situe en amont : dans la réglementation européenne et son application par les autorités sanitaires nationales. Les marges de manœuvre laissées aux laboratoires pharmaceutiques y sont importantes, au détriment du patient.

Données inexploitables en l’état

Ce n’est pas tout. Comment les firmes peuvent-elles convaincre de leur bonne foi et de leur volonté de transparence, lorsqu’elles ne proposent l’accès aux données de leurs études que sous un format « image », à l’évidence pour rendre quasi impossible leur réanalyse par des chercheurs indépendants ? C’est sous cette forme, inexploitable en l’état, que Merck a donc fourni ses données brutes d’expérience à l’ANSM. Pour pouvoir les analyser, les chercheurs ont dû, pendant plusieurs jours, ressaisir manuellement ces centaines de pages de chiffres.

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Comment, enfin, expliquer que de telles manœuvres soient tolérées par les autorités sanitaires qui n’ont, à l’évidence, pas réanalysé les données de manière indépendante, se reposant sur l’interprétation qu’en a fournie le laboratoire ? Les premières vagues de signalements d’effets indésirables auraient dû conduire à examiner minutieusement ces données, ce qui, à l’évidence, n’a pas été fait.

En creux, l’affaire du Levothyrox signale aussi le manque cruel de moyens humains de l’expertise publique. Que ce soit à l’ANSM, à Santé publique France ou à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’érosion des moyens, constatée ces dernières années, correspond à une charge de travail toujours accrue et à une opinion de plus en plus sensibilisée aux thématiques de santé et d’environnement. Discrets et peu revendicatifs, les personnels des agences d’expertise publiques souffrent de cette situation, dans laquelle il leur est parfois matériellement impossible de remplir pleinement leur mission. Voilà un domaine, parmi bien d’autres, où l’intérêt général devrait commander de renforcer les moyens de la puissance publique, plutôt que l’inverse.

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