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« La métaphore guerrière est historique dans le domaine de la santé publique »

Dès lors qu’un danger menace la sauvegarde de la collectivité sociale, la manière d’agir des pouvoirs publics est la même en temps de guerre comme en temps d’épidémie, souligne l’historienne Anne Rasmussen.

Propos recueillis par 

Publié le 23 octobre 2020 à 06h00, modifié le 23 octobre 2020 à 10h51

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« Nous sommes en guerre », avait insisté Emmanuel Macron dans son discours du 16 mars. Le coronavirus est un « ennemi », les soignants sont en « première ligne » et les Français sont « mobilisés ». L’historienne Anne Rasmussen, directrice d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), analyse ce qui rapproche le temps épidémique du temps de guerre.

On a beaucoup parlé de l’usage de la métaphore guerrière par le chef de l’Etat dans la crise sanitaire. Cet emploi a-t-il des précédents ?

Emmanuel Macron s’inscrit dans une longue tradition. La métaphore guerrière est historique dans le domaine de la santé publique, qui a été innervé par ce vocabulaire de la lutte, du combat mené contre la maladie. Avec la théorie des germes, à la fin du XIXsiècle, le langage de la bactériologie, puis de l’immunologie, a fait sienne la métaphore de la guerre aux microbes, qu’il convient de mener à l’échelle du corps individuel, mais aussi du corps social. Cette dimension sanitaire du discours du chef de l’Etat se conjugue à sa dimension politique, qui emprunte à la Grande Guerre le registre de la mobilisation de toute la société consacrée à l’effort de guerre.

L’épidémie serait-elle une menace « extérieure » au même titre qu’une guerre ?

Historiquement, l’épidémie, à la différence de l’endémie, vient toujours d’ailleurs : c’est en tout cas la représentation dominante que l’on s’en fait. Pendant des siècles, l’épidémie est considérée comme un danger pathogène que l’on risque d’importer. Plus précisément, si l’on adopte un point de vue européen ou occidental, elle vient d’Orient, depuis la peste noire jusqu’au choléra. Le cadre scientifique de compréhension des maladies a cependant évolué depuis, et a permis de penser des épidémies qui ne sont pas seulement importées, mais « toujours déjà là ».

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Cette représentation influe-t-elle sur les mesures prises par les pouvoirs publics pour lutter contre l’épidémie, et sur leur réception par les populations ?

La réponse des pouvoirs publics a durablement consisté à se protéger vis-à-vis de l’extérieur. On tente donc d’empêcher l’« importation », la circulation de l’épidémie en élevant des barrières (notamment, des cordons sanitaires et des quarantaines), en érigeant des obstacles aux frontières qui, selon les époques, étaient érigées à des échelles locales, régionales, nationales ou même internationales. L’acceptation sociale de ces mesures dépendait de leur nature, et de qui elles visaient : souvent consensuelles quand elles visaient l’étranger, elles étaient un ferment de division sociale quand elles ciblaient, de l’intérieur, des groupes ou des individus susceptibles d’être vecteurs de contagion, ou accusés de l’être.

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