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« Dès 1789, le républicanisme français s’est montré ouvert au particularisme religieux »

Avec le décret de 1791 émancipant les juifs, les révolutionnaires ont voulu une seule loi s’appliquant à tous et ne contraignant personne à renoncer à ses pratiques culturelles et religieuses, analyse dans une tribune au « Monde » le professeur à Yale Maurice Samuels

Publié le 31 décembre 2020 à 06h45 Temps de Lecture 7 min.

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L’histoire de l’intégration des juifs en France devrait-elle servir de modèle aux musulmans français ? Cette question a ressurgi récemment à l’occasion d’un débat dans les pages du Monde.

Dans une tribune [publiée le 3 décembre] qui critiquait le discours du président Macron appelant à un « islam des Lumières », le journaliste James McAuley [correspondant du Washington Post à Paris] expliquait que l’exemple de ces juifs français qui, après la Révolution, avaient embrassé avec la même ferveur à la fois l’identité française et l’identité juive montrait que, historiquement, le républicanisme français s’était bien plus accommodé de la différence religieuse que ce que Macron et ses alliés voulaient bien admettre. En réponse, l’écrivain Marc Weitzmann accusa le journaliste américain de ne pas comprendre ce que la Révolution française avait exigé de ses nouveaux citoyens juifs. D’après Weitzmann, les révolutionnaires n’ont accordé aux juifs tous leurs droits civiques qu’à la condition qu’ils renoncent « à leur particularisme ».

Recommandations fondées sur un mythe

Weitzmann se trompe lorsqu’il affirme que la Révolution française a exigé des juifs l’assimilation en échange de droits. Il s’agit d’une fausse conception, assez répandue, et qui n’intègre pas les acquis de nombreuses recherches d’historiens français et américains des dernières décennies. Dans mon ouvrage The Right to Difference : French Universalism and the Jews [Le Droit à la différence : l’universalisme français et les juifs, non traduit], je montre que, dès 1789, le républicanisme français s’est en grande partie montré ouvert au particularisme.

Ce n’est pas seulement un débat universitaire. Lorsque des hommes politiques et des journalistes invoquent l’assimilation des juifs durant la Révolution française pour justifier les efforts visant à « éclairer » les musulmans français aujourd’hui – efforts qui vont jusqu’à réclamer le retrait de la viande halal (et casher) des rayons des supermarchés –, leurs recommandations politiques sont fondées sur un mythe.

« Après la Révolution, l’assimilation cessa donc d’être la condition nécessaire, voire souhaitable, à l’émancipation »

Avant la Révolution, il est vrai, les réformateurs libéraux qui cherchaient à améliorer le sort des juifs français exigeaient souvent l’assimilation comme condition sine qua non. Quand l’abbé Grégoire écrit en 1788 son Essai sur la régénération physique, morale et politique des juifs, il expose un programme où les juifs renoncent à ce que, lui, considère comme étant des croyances et des coutumes rétrogrades, comme les lois alimentaires, pour pouvoir devenir des membres productifs et utiles à la société. La notion de « régénération », au cœur du projet des Lumières, implique l’effacement de la différence des minorités.

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