Tribune. Dès l’annonce de la mise en place d’un passe sanitaire par le gouvernement, des opposants ont convoqué, lors de manifestations, ce que notre mémoire collective a retenu comme étant le pire de l’histoire : le sort des juifs pendant la seconde guerre mondiale. Des manifestants ont ainsi multiplié les slogans faisant référence à la Shoah tels que « prochaine étape, une rafle des non-vaccinés » ou « non au pass nazitaire ». Ils ont également comparé ce fameux passe avec les mesures d’exclusion dont eurent à souffrir les juifs, mais aussi le QR code sanitaire avec le numéro tatoué à Auschwitz sur le bras des prisonniers sélectionnés pour le travail forcé. Nous pourrions multiplier les exemples. Logiquement, des voix se sont élevées et les commentaires se sont multipliés pour condamner ces slogans et propos jugés scandaleux et déplacés.
Mais quand on ose afficher ce genre de comparaisons, c’est bien parce que celles-ci apparaissent légitimes et, quand des gens instrumentaliseraient les événements de la seconde guerre mondiale en connaissance de cause, il en est d’autres qui sont de bonne foi.
Pédagogie
Par conséquent, la seule condamnation morale de ces mésusages de la mémoire de la Shoah n’est d’aucune utilité, voire peut être contre-productive, en donnant le sentiment d’un « deux poids deux mesures » au seul profit des juifs. Cette condamnation doit donc s’accompagner de pédagogie expliquant que rien ne permet d’assimiler la politique sanitaire du gouvernement au sort des juifs durant la seconde guerre mondiale.
Il faut ainsi expliquer pourquoi l’exposition, devenue récurrente, de l’étoile jaune sur les poitrines est choquante. Celle-ci fut imposée en France par une ordonnance allemande du 29 mai 1942 et s’inscrivait dans le processus génocidaire nazi en précédant les grandes rafles de l’été 1942. La finalité de cette politique était l’assassinat systématique. Personne ne prévoit aujourd’hui l’assassinat des millions de personnes qui ne sont pas vaccinées ou qui n’ont pas de passe sanitaire, et la finalité du passe vise la protection de la population. C’est donc tout le contraire.
Immense confusion
De même, la mise en avant, pour mieux signifier l’exclusion des opposants au passe sanitaire, de la 9e ordonnance allemande du 8 juillet 1942 interdisant aux juifs de France de fréquenter les restaurants et autres lieux publics, relève d’une immense confusion. L’exclusion des juifs à des fins discriminatoires reposait sur l’idée antisémite qu’ils représentaient un danger pour la société, sur des bases subjectives et idéologiques. Aujourd’hui, la mesure gouvernementale vise à protéger, sur des bases scientifiques et objectives, l’ensemble de la population de la menace de propagation du virus. D’autre part, refuser le vaccin ou le passe sanitaire relève d’un choix individuel. Les juifs, eux, n’ont jamais eu le choix. La différence est fondamentale.
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