Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

La dépendance liée au grand âge est un choix de société

Editorial du « Monde ». Alors que la révélation sur la gestion des Ehpad du groupe Orpea est devenue une affaire politique, il n’est pas trop tard pour que le grand âge devienne un thème de la campagne présidentielle.

Publié le 27 janvier 2022 à 12h01, modifié le 02 février 2022 à 17h41 Temps de Lecture 2 min.

Editorial du « Monde ». La publication de l’enquête Les Fossoyeurs (Fayard, 400 pages, 22,90 euros), dans laquelle le journaliste Victor Castanet dénonce d’importants dysfonctionnements dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) du groupe Orpea a provoqué un vif émoi. A raison. Les accusations sont graves et les faits rapportés particulièrement sordides.

Les extraits des « Fossoyeurs »: Article réservé à nos abonnés « Déjà, il y avait cette odeur de pisse terrible, dès l’entrée » :

Le livre décrit un système implacable dans lequel les soins d’hygiène, la prise en charge médicale, voire les repas des résidents seraient « rationnés » pour gonfler la rentabilité d’Orpea, une entreprise leader de son secteur et cotée à la Bourse de Paris. Les manquements révélés par le journaliste se limitent-ils à un « souci d’organisation », comme l’avance la direction, ou bien font-ils partie intégrante d’un modèle économique dévoyé au détriment du bien-être, de la santé, voire de la vie des résidents, comme le livre le donne à penser ? Il est encore trop tôt pour trancher.

A ce stade, il faut se méfier des généralités : beaucoup d’Ehpad, malgré des moyens insuffisants, continuent de remplir une mission difficile mais indispensable à la société. Reste que le nombre de familles qui ont été ou qui sont confrontées au sujet de la maltraitance en maison de retraite doit nous alerter sur les dysfonctionnements du système.

Procrastination sur le plan législatif

L’un d’eux concerne le rôle joué par le secteur privé. Faute de financements publics suffisants, l’activité a dû s’ouvrir à un certain nombre d’entreprises. Elles ont certes permis de développer des capacités d’accueil pour accompagner le vieillissement de la population, mais beaucoup d’investissements ont été réalisés dans une logique purement financière. Aujourd’hui en pleine expansion, le secteur privé lucratif propose en moyenne des tarifs plus élevés de 40 % que le public, avec 10 % à 15 % de personnel en moins. Or il est évident que le bien-être des résidents est proportionnel à la densité de l’encadrement.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Le modèle économique intenable des Ehpad privés

Ensuite, chaque établissement, quel que soit son statut, touche le même montant de financement public par les agences régionales de santé (ARS) et les départements, l’hébergement étant à la charge des résidents. C’est sur ce poste que le secteur privé assure sa rentabilité, sans proposer pour autant de meilleures prestations. Le modèle économique reste focalisé sur l’immobilier, moins sur les besoins des personnes âgées. Les financements publics ont théoriquement une contrepartie : le contrôle régulier des établissements par les ARS. Dans la pratique, selon le livre, ces contrôles sont trop laxistes et aléatoires pour empêcher les abus.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Ehpad : le manque de contrôle en question

Depuis des années, la dépendance attend sa loi de financement. Malgré quelques avancées comme des revalorisations salariales, des créations de postes et de nouveaux investissements, le pouvoir actuel n’a pas dérogé à cette procrastination sur le plan législatif. Pourtant, les projections démographiques montrent que le besoin d’ouverture de places en Ehpad va s’accélérer.

Deux choix sont possibles. Soit une prise en charge collective qui permettra d’alléger le fardeau financier pour les familles tout en garantissant de meilleures prestations – la limite politique de cette solution est qu’elle implique une augmentation des prélèvements sociaux –, soit continuer à déléguer la mission à un secteur privé lucratif, plus cher que le public mais incapable de garantir de meilleures prestations, le tout financé en grande partie par des fonds publics qui restent mal contrôlés. Il n’est pas trop tard pour que la question du grand âge s’invite dans la campagne présidentielle.

Le Monde

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner

Contribuer

Réutiliser ce contenu

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.