Que nous arrive-t-il en France ? Pourquoi tant de crises en si peu d’années ? Le monde entier nous observe, interloqué, et se pose les mêmes questions. Tant d’images de violence, de destructions, de colère, de rage et de haine. Le politique, qui semble courir après les crises, est accablé de tous les reproches, comme le montrent toutes les enquêtes réalisées sur la confiance politique. Seuls les élus locaux, principalement les maires, semblent surnager dans cet océan de défiance politique. Et pourtant ils n’échappent pas aux multiples incivilités, agressions et maintenant tentatives de crime.
Les données du baromètre de la confiance politique du Centre de recherches politiques de Sciences Po, enquête académique annuelle réalisée par l’institution depuis 2009, permettent d’analyser ces rapports complexes et paradoxaux entre les élus et le pays. La dernière vague de cette enquête (février 2023) a enregistré une nette baisse de confiance pour tous les élus, y compris les maires (57 % de confiance quand même), dans un contexte de fin de la parenthèse liée au Covid-19. Ce sont néanmoins toujours les maires et les conseils municipaux qui sont les plus investis de la confiance des Françaises et des Français.
En près de quinze ans, la confiance dans les conseils municipaux a fluctué entre 63 % (2009) et 53 % (2023) atteignant son pic en 2015 (68 %) dans une France traumatisée par les crimes terroristes et atteignant des valeurs assez élevées pendant le Covid (65 % de confiance début 2021 et début 2022). Les mêmes tendances et évolutions se retrouvent à propos des maires : entre 2009 et 2023, la confiance dans nos maires se situe entre 65 % et 57 %, atteignant son sommet au cours de l’année 2015 (67 %) et s’exprimant fortement pendant l’épidémie (65 %).
Décentralisation des colères
Dans le même temps, la confiance dans l’Assemblée nationale se situait à des niveaux bien plus bas, entre 38 et 28%, celle dans le gouvernement entre 32 et 26%, celle dans l’institution présidentielle entre 33 et 30%, même si des niveaux plus élevés ont été observés à certains moments, durant le Covid notamment. On peut rapprocher la perception positive dont bénéficient les maires et leurs conseils municipaux de celle accordée aux institutions publiques, notamment dès lors qu’elles incarnent la proximité et le soin (le système de santé, la Sécurité sociale, les institutions régaliennes à l’exception de la justice perçue nettement moins favorablement que la police).
Dans une France prise dans l’étau d’une crise sociale et d’identité sans fin, les élus locaux incarnent la proximité et le service public rendu. Ce n’est pas seulement que l’on peut plus probablement croiser son maire que son député ou son premier ministre, c’est aussi que l’action du maire est probablement plus susceptible d’être vérifiable « sur pièces ».
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