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« La décision du Sénat de supprimer l’AME ne correspond à aucune logique médicale, budgétaire ou de lutte contre la fraude »

Les médecins Bernard Basset, Amine Benyamina et François Bourdillon estiment, dans une tribune au « Monde », que le vote des sénateurs le 7 novembre de la suppression de l’Aide médicale d’Etat constitue un moment noir pour la santé publique et les valeurs humanistes de la France.

Publié le 17 novembre 2023 à 06h30 Temps de Lecture 3 min.

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Il est des moments noirs pour la santé publique et, plus largement, les valeurs humanistes qui fondent notre société. Nous venons d’en vivre un avec le vote, le 7 novembre, du Sénat supprimant l’Aide médicale d’Etat (AME). Ce vote, totalement idéologique, est porté par une vague irrationnelle qui fait fi des analyses de santé publique, mais aussi de la rationalité budgétaire. L’AME permet en effet aux étrangers sans papiers, dont certains resteront en France et s’intégreront, de bénéficier de soins alors qu’ils n’ont pas, ou pas encore, de titre de séjour. Il s’agit d’un dispositif d’exception transitoire qui constitue une couverture sociale précaire, valable un an et éventuellement renouvelable, qui n’a rien à voir avec la prise en charge de droit commun par la Sécurité sociale, permanente et universelle.

La première déformation de la réalité consiste à faire croire que tous les migrants viennent en France pour bénéficier de son système de santé. Ce n’est pas le cas. Ils viennent essentiellement pour travailler et fuir la misère, la guerre ou des dictatures. Ils sont le plus souvent jeunes, et, comme pour toute population jeune, leurs problèmes de santé sont peu nombreux. Cependant, ils doivent faire face, en France, comme toute personne à la survenue de maladies chroniques (hypertension, diabète…) et sont particulièrement exposés aux maladies infectieuses. L’AME permet à ces migrants en situation irrégulière de se faire soigner et, dans le cas des femmes enceintes, d’assurer le suivi de leur grossesse.

La deuxième contre-vérité consiste à colporter qu’il suffit de soigner les problèmes de santé urgents. Pour tous les acteurs de santé, il est évidemment aberrant d’exposer une personne à un risque vital avant de commencer à lui apporter des soins. On soignerait le coma diabétique, mais pas le diabète qui y conduit ? On soignerait l’accident vasculaire cérébral, mais pas l’hypertension ? On ne soignerait le tuberculeux que lorsque ses poumons seraient irrémédiablement atteints ?

Ce que proposent les sénateurs, c’est, très concrètement et très crûment, d’attendre que les gens soient au seuil de la mort pour leur prodiguer des soins avec tous les risques qui en découlent. C’est tellement contraire aux valeurs de la médecine et de la plus simple humanité qu’aucun soignant ne peut accepter un tel impératif. Les sénateurs, par un dernier reste de pudeur, n’ont pas osé appeler à ne plus du tout soigner les étrangers, mais leur raisonnement y conduit. Nous ne sommes pas naïfs, les sénateurs savent parfaitement que ce dispositif est à la fois dangereux, inhumain et impraticable. Peu leur importe, l’étranger est devenu pour eux un non-humain qui ne mérite ni aide, ni bienveillance, ni soin.

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