Il y a un peu plus d’un an, dix mille soignants de pédiatrie interpellaient le président de la République, Emmanuel Macron, sur la crise aiguë de leur spécialité. Les urgences pédiatriques étaient saturées, des nourrissons étaient transférés à des centaines de kilomètres de chez eux, la pénurie des soignants de l’enfant à l’hôpital et en ambulatoire inquiétait. Des Assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant étaient alors convoquées en urgence et des mesures fortes annoncées pour le printemps 2023.
A la même période, le ministère de la santé voyait le terme de « prévention » (disparu aujourd’hui) accolé à son intitulé, laissant penser à une revitalisation des services de prévention pour les enfants. Mais, depuis cette alerte, aucune des mesures issues des Assises n’a été annoncée.
Pourtant, les faits sont têtus. On constate en France une hausse du taux de mortalité infantile qui est supérieure à la moyenne européenne. Au classement de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la France a progressivement décroché de la 9e à la 26e place entre 1989 et 2021. En 2021, 2 700 enfants de moins de 1 an sont morts en France. Parmi eux, 1 200 décès périnataux annuels sont actuellement considérés comme évitables. Cet indicateur statistique est reconnu comme un marqueur de la qualité des soins obstétricaux et pédiatriques d’un pays.
Les hypothèses des chercheurs renvoient sa récente augmentation à la fois à la dégradation des conditions de vie et de santé d’une partie de la population et à celle du système de soins et de prise en charge sociale et psychologique. La crise actuelle des services de néonatologie les plus spécialisés dits « de niveau 3 » illustre cette situation.
Réponse de salut public
On observe aussi une évolution inquiétante de la morbidité infantile : augmentation du diabète insulinodépendant chez l’enfant de 4 % par an, obésité des 18-24 ans multipliée par quatre depuis 1997, majoration des troubles du neurodéveloppement touchant près de 100 000 enfants et adolescents par an, augmentation des idées et gestes suicidaires chez les jeunes, avec une croissance des deux tiers des passages aux urgences de pédopsychiatrie ces cinq dernières années.
Tout cela dans un contexte où la dégradation de l’environnement de vie des enfants, qu’il soit physico-chimique (pollution, perturbateurs endocriniens), socio-économique (croissance de la précarité et de la pauvreté) ou éducatif (écrans, violences, perte d’activité physique), infléchit défavorablement leur trajectoire de santé et maximise les inégalités de santé.
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