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Crise en Nouvelle-Calédonie : la quête blessée du « peuple calédonien »

Les contradictions intrinsèques de la société néo-calédonienne et la caution donnée à un processus politique évacuant la centralité du « peuple d’origine » ont cumulé leurs effets pour torpiller dans la violence la « citoyenneté calédonienne » instituée par l’accord de Nouméa en 1998.

Publié le 24 mai 2024 à 12h30 Temps de Lecture 3 min.

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Si la crise qui embrase la Nouvelle-Calédonie depuis le 13 mai fait mal, c’est qu’elle s’apparente à une tragique fausse couche politique. Le « peuple calédonien » qui aurait dû naître du processus de l’accord de Nouméa de 1998 n’a pas vu le jour durant le quart de siècle imparti à sa gestation. Là est la racine de l’échec. Les erreurs du gouvernement ont certes joué un rôle. Mais elles n’ont fait qu’ajouter à une défaillance plus profonde, liée aux contradictions intrinsèques de la société néo-calédonienne et aux ambivalences de sa relation avec la métropole.

Là où le temps écoulé aurait dû dissoudre ce double handicap pour accoucher d’un nouveau paradigme, celui que l’accord de Nouméa appelait de ses vœux, la transition a calé puis dérapé. A l’heure des comparaisons avec les violences de la séquence 1984-1988, un constat s’impose : la gravité de la crise actuelle est d’une magnitude supérieure. Lors de la première secousse de 1984-1985, les affrontements, d’où la question foncière n’était pas absente, s’étaient limités à la « brousse » dans un quasi-huis clos entre petits colons et clans kanak. Nouméa était restée un sanctuaire à peine touché.

En 1988, le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) avait ciblé l’Etat et lui seul, avec des attaques de gendarmeries, dont celle d’Ouvéa. En 2024, grande rupture, la collision se déploie sur le théâtre même de Nouméa, chef-lieu qui a cessé depuis longtemps d’être « Nouméa la blanche » en se périurbanisant. Avec une double conséquence : le spectre social affecté est plus large et l’économie est frappée en son cœur.

Comment en est-on arrivé là ? Pourquoi la « citoyenneté calédonienne », cette grande percée politique de l’accord de Nouméa dont le gel du corps électoral était censé être le socle, n’a-t-elle pas permis la cristallisation identitaire rebattant les cartes ? Le chemin entamé a pourtant été considérable, historiquement inédit. Depuis un quart de siècle, le Congrès néo-calédonien vote des lois dites de « pays », terme pour le moins audacieux. Des « signes identitaires » – un hymne (Soyons unis, devenons frères) et une devise (« Terre de parole, terre de partage ») – ont été consensuellement adoptés.

Ambivalence profonde

Les statues de bronze de Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur se serrant la main – scène emblématique de la signature des accords de Matignon du 26 juin 1988 – trônent sur la place de la Paix, au cœur de Nouméa. Les tentatives sincères de forger un « destin commun » n’ont pas manqué. Et pourtant… Tout cela n’était-il qu’illusion ? « Ces acquis sont réels mais restent fragiles, souligne l’historien néo-calédonien Louis-José Barbançon. Dès qu’un événement bouscule cette harmonie, les vieilles angoisses resurgissent vite. »

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