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« L’“amitié sans limites” scellée entre la Chine et la Russie en 2022 a comme limites celles de leurs intérêts bien compris »

Si l’axe sino-russe se renforce d’un point de vue politique et géopolitique, une vassalisation d’ordre économique de Moscou est à l’œuvre de la part de son voisin chinois, observe Jean-Michel Bezat, journaliste au « Monde », dans sa chronique.

Publié le 10 juin 2024 à 06h00, modifié le 09 juillet 2024 à 12h33 Temps de Lecture 3 min.

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A l’hiver 1949, six semaines seulement après la proclamation de la République populaire de Chine, Mao Zedong s’embarque dans le Transsibérien pour aller demander à Staline une aide à la reconstruction de son pays. Au sommet de sa puissance, le « grand frère » soviétique le fait attendre deux mois dans une datcha de la banlieue de Moscou avant de le recevoir pour lancer une coopération tous azimuts qui ne vivra pas plus de dix ans. Autre temps… C’est désormais Xi Jinping qui pourrait faire patienter Vladimir Poutine. Même si le président chinois déroule le tapis rouge au maître du Kremlin, le rapport de force s’est inversé.

L’« amitié sans limites » scellée entre les deux pays en 2022 a des limites – celles de leurs intérêts bien compris. L’expression n’est même plus en vogue à Pékin. Une vassalisation, plus économique que politique, est à l’œuvre.

Le président russe commence à l’apprendre à ses dépens : il attend toujours le feu vert de Xi Jinping pour investir dans Force de Sibérie 2, le gazoduc qui doit transporter du gaz de Sibérie occidentale jusqu’à la province du Xinjiang. Le pouvoir de marché est passé aux mains des Chinois. Ils réclament un prix très inférieur à celui des Européens, refusent de s’engager sur de gros volumes et exigent même que le tuyau soit entièrement à la charge de Gazprom, révèle le Financial Times.

Affaiblissement de Gazprom

Des exigences jugées « déraisonnables » à Moscou. L’absence d’Alexeï Miller, inamovible patron de Gazprom, lors du dernier voyage de M. Poutine en Chine, à la mi-mai, n’est pas passée inaperçue, symbole d’un affaiblissement du géant public qui est aussi celui de la Russie. Depuis les années 1970, l’entreprise issue du ministère soviétique du gaz a patiemment construit son tentaculaire réseau de pipelines sur le Vieux Continent. Jusqu’à culminer avec les Nord Stream 1 et 2 sous la Baltique, projet germano-russe incarnant la dépendance énergétique de l’Europe avant leur sabotage et leur fermeture.

En 2023, Gazprom n’a livré aux Européens qu’un tiers des volumes de 2022. Ces clients historiques se sont tournés vers les producteurs norvégiens, qataris et américains, plus chers mais plus fiables, tandis que le géant russe ne pouvait tirer parti du gaz naturel liquéfié (GNL) vendu à prix d’or par son compatriote privé Novatek. Résultat : une perte de 6,4 milliards d’euros, la première en vingt-cinq ans.

Aux plus belles heures de l’entreprise, M. Miller se rêvait à la tête du « plus grand groupe du monde, et pas seulement dans l’énergie ». L’illusion s’est dissipée, et ses difficultés vont durer jusqu’en 2035 au moins, indique une étude présentée à ses dirigeants fin 2023. Ses auteurs s’attendent « à une diminution du rôle de Gazprom dans l’industrie du gaz ».

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