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LAURENT CORVAISIER

La démocratie de l’eau, une promesse inachevée

Par 
Publié le 06 septembre 2024 à 18h45, modifié le 08 septembre 2024 à 02h47

Temps de Lecture 14 min.

Captée, drainée, endiguée, canalisée, domptée par deux siècles de modernité, l’eau se rebelle, déferle en crues torrentielles dans les vallées alpines, submerge les plaines des Hauts-de-France ou les rues de Marseille, déserte les Pyrénées-Orientales. De la succession des inondations aux épisodes de sécheresse, de la dégradation des zones de captage à la contamination par des polluants dits « éternels », les crises se succèdent, attisant les tensions.

Si l’eau douce a toujours été source de rivalités, le réchauffement climatique et l’industrialisation des sols ont exacerbé les conflits. Dans le Marais poitevin, l’opposition aux mégabassines et au modèle agricole d’irrigation ne faiblit pas ; à Vittel (Vosges), à Volvic (Puy-de-Dôme), à Grigny (Essonne) ou à Montagnac (Hérault), des habitants dénoncent la privatisation de sources au profit des multinationales Nestlé ou Coca-Cola ; dans l’Hérault, la construction d’un golf soulève des résistances, tandis qu’à Wittelsheim (Haut-Rhin), c’est l’enfouissement définitif de déchets toxiques à proximité de la nappe souterraine alsacienne qui mobilise élus et habitants.

Ces collectifs contestent la privatisation et les atteintes au cycle de l’eau, ce vaste circuit qui, à travers sols et zones humides, rivières et océans, permet son renouvellement. Mais ils critiquent aussi la façon dont les décisions sont prises et la course aux solutions techniques avant même qu’une réflexion collective ait déterminé les priorités. Souvent accompagnés par des chercheurs, ils plaident pour que les besoins des cours d’eau ne soient plus considérés comme la variable d’ajustement des activités humaines. A la croisée des sciences du vivant et des sciences sociales, ils explorent les interdépendances entre les milieux aquatiques et les êtres vivants qui les peuplent, expérimentant localement de nouvelles formes de gouvernance.

« Dérive clientéliste »

Au sein même des institutions responsables de la répartition de la ressource, de nombreux acteurs ont la gueule de bois. Alors qu’au nom de la simplification des procédures, une série de réformes a fragilisé les piliers de la démocratie environnementale, les instances délibératives de gestion de l’eau ne sont pas épargnées. Depuis les manifestations agricoles du début de l’année, des compromis patiemment tissés par les membres du Comité national de l’eau (CNE), l’instance chargée de conseiller le gouvernement, ont été remisés dans les placards du ministère de l’agriculture, soucieux de rétablir la paix sociale dans les campagnes. « Nous avons passé des heures à peser chaque mot de l’avis du CNE concernant le plan Ecophyto sur les pesticides, et le gouvernement n’en a tenu aucun compte en négociant directement avec la FNSEA », regrette Florence Denier-Pasquier, juriste membre du CNE et administratrice de l’association France Nature Environnement, dénonçant « une dérive clientéliste ».

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