Propos convenus, brève entrevue : la rencontre entre les présidents turc et russe, Recep Tayyip Erdogan et Vladimir Poutine, a été vite pliée, mercredi 3 juillet, en marge du sommet de l’Organisation de coopération de Shanghaï à Astana, la capitale du Kazakhstan. « Nous menons une diplomatie téléphonique mais, entre-temps, nos ministres restent en contact », a tenu à rassurer le président turc à l’issue de l’entretien, qui a duré une petite heure. Le dossier syrien est régulièrement évoqué mais les antagonismes persistent, la Russie soutenant le président syrien, Bachar Al-Assad, tandis que la Turquie appuie, finance et forme la rébellion syrienne dans les territoires conquis par son armée entre 2016 et 2022 dans le nord de la Syrie.
Cela fait des années que Vladimir Poutine pousse son homologue turc à la réconciliation avec Bachar Al-Assad, sans succès. Evoqué à maintes reprises, jamais réalisé, ce rapprochement a été pris en main par l’Irak. « Créer une base de réconciliation et de dialogue entre la Syrie et la Turquie » est l’objectif que le premier ministre irakien, Mohammed Chia Al-Soudani, s’est fixé.
« La main de l’Iran en coulisses »
C’est ce qu’il a expliqué le 31 mai à des médias turcs, précisant que MM. Erdogan et Assad y étaient favorables. Proche de la Syrie et de l’Iran, M. Al-Soudani, qui cherche à renforcer sa stature internationale en se posant en médiateur, pense pouvoir réussir là où les diplomates russes ont échoué. La médiation russe avait achoppé en 2023, après deux ans d’efforts, face à l’exigence posée par le président Al-Assad, et appuyée par Moscou et Téhéran, d’un retrait des forces turques de Syrie en préalable à une normalisation. Ankara s’y est toujours refusé.
Selon le journal syrien Al-Watan du 30 juin, porte-voix du régime, une prochaine réunion syro-turque se tiendrait bientôt à Bagdad, ouvrant un long processus de négociations qui pourrait conduire à des accords politiques aux retombées concrètes. Des « sources » ont indiqué au journal que la partie turque avait demandé à Moscou et à Bagdad de pouvoir s’asseoir à une table de dialogue bilatéral avec la partie syrienne, sans aucune présence tierce, et loin des médias, pour examiner tous les aspects censés ramener les relations entre les deux pays à leur état antérieur.
La médiation irakienne, il est vrai, ne ferait pas le poids sans l’appui de la Russie, de l’Iran et des puissances du Golfe. « La main de l’Iran se fait fortement sentir en coulisses », écrit Haid Haid, chercheur au sein du cercle de réflexion Chatham House, dans la revue en ligne Al Majalla. « Tout dégel turco-syrien serait un triomphe pour Téhéran, renforçant son influence régionale, augmentant son importance pour la Syrie », estime le chercheur. Parrain du régime Al-Assad, Téhéran veille cependant à ce qu’Ankara ne redevienne pas un concurrent sur le terrain syrien, qui sert de pont terrestre entre l’Iran et le Liban.
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