Ce fut un événement rare pour La Corogne. La deuxième ville de Galice, au nord-ouest de l’Espagne, doit davantage sa réputation à son phare romain et à sa spécialité culinaire, le poulpe, qu’à sa vie culturelle. Celle dont la brume fait mousser les cheveux des femmes, celle qui aveugle les passants quand le soleil se réverbère sur les façades immaculées des immeubles du port, dont les vents balaient la côte et soulèvent les eaux lourdes de l’Atlantique, est restée simple, authentique et méconnue des étrangers.
Or, début décembre 2021, des personnalités ont fait le déplacement de Paris, New York ou Londres – certaines acheminées par avion privé – pour le vernissage d’une exposition qui aurait pu parfaitement se tenir dans l’une de ces trois capitales de la mode. Les mannequins Naomi Campbell, Esther Canadas ou Marie-Sophie Wilson-Carr, l’actrice Rossy de Palma, les photographes David Sims et Mikael Jansson, les stylistes Emmanuelle Alt (ex-rédactrice en chef de Vogue Paris) et Karl Templer (ancien directeur artistique du magazine Interview), les créateurs Pierpaolo Piccioli (directeur artistique de Valentino) et Clare Waight Keller (anciennement chez Chloé), le réalisateur de Call Me By Your Name, Luca Guadagnino, les coiffeur et maquilleur Odile Gilbert et Stéphane Marais…
Un concentré de classe internationale venu voir l’exposition posthume de « l’ami » Peter Lindbergh, immense photographe de mode mort en 2019. Mais ce jour-là, la vraie star n’était autre que l’hôtesse qui avait rendu possible cet événement et « remis La Corogne sur la carte », comme elle a coutume de dire : Marta Ortega Pérez. Par la volonté de son père, Amancio Ortega, fondateur de Zara, cette jeune femme de 38 ans prendra, le 1er avril prochain, en tant que présidente, la tête du groupe Inditex, leader mondial de la fast-fashion, dont le siège est à Arteixo, à une quinzaine de kilomètres de La Corogne.
Depuis dix ans, même s’il continue de venir plusieurs jours par semaine au bureau, son père s’est officiellement retiré de la direction exécutive, laissant Pablo Isla, le directeur général, gérer les affaires courantes d’une entreprise de plus de 144 000 employés. Plutôt bien, d’ailleurs, car le groupe devrait dépasser en 2021 les 20 milliards d’euros de chiffre d’affaires et sa valorisation boursière est estimée à quelque 75 milliards d’euros. Des chiffres impressionnants, qui propulsent aujourd’hui Marta Ortega Pérez au rang de femme la plus puissante de l’industrie de la mode.
Une sorte de mégafamille élargie
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