Ce billet est extrait de la newsletter hebdomadaire « Darons Daronnes » sur la parentalité, envoyée tous les mercredis à 18 heures. Pour la recevoir, vous pouvez vous inscrire gratuitement ici.
Vous vous souvenez certainement de cette pub Lactel : « Papa, c’est quoi cette bouteille de lait ? Papa, c’est quoi cette bouteille de laaaiiit ? ? Papa, comment on fait les bébés ? » Le père levait alors des yeux affolés de son journal et s’empressait d’expliquer à son fils comment fonctionnait la nouvelle bouteille de chez Lactel (« Eh bien… »).
Pourtant, comme il était facile de répondre à cette question en 1990 ! L’autre jour, mes enfants (8, 5 et 3 ans) m’ont demandé avec qui j’étais au téléphone alors que je leur préparais des pâtes aux brocolis (les joies de la fragmentation du travail). Je leur ai répondu que je parlais à un docteur, Michaël Grynberg, dont le métier est d’aider les gens qui ne peuvent pas avoir d’enfant à en avoir. « Ah bon, mais comment ? »
J’ai levé les yeux de ma préparation comme le père dans la pub, et j’ai dit : « Eh bien, c’est très simple. On va chercher des graines de papa et de maman, on les congèle, parfois on les fait se rencontrer dans une éprouvette, on les aide à grandir, et on les met dans le ventre de la maman. Parfois, on peut les garder au congélateur pendant très très longtemps. » Mes enfants ont jeté un regard un peu inquiet à la porte du congélateur, puis ils sont partis faire une pyramide humaine. Business as usual.
Une histoire de coparentalité
Tant mieux si cela leur semble banal au possible. La vérité, c’est que moi, la médecine de la reproduction me fascine. Je l’avais découverte pour une enquête sur l’infertilité croissante des couples. J’ai lu cette semaine les Dix histoires extraordinaires de naissance que le professeur Michaël Grynberg, chef du service reproduction et préservation de la fertilité à l’hôpital Antoine-Béclère de Clamart (Hauts-de-Seine) et à l’hôpital Jean-Verdier de Bondy (Seine-Saint-Denis), vient de publier (Flammarion, 192 pages, 20 euros), et croyez-moi, le titre n’est pas exagéré.
Voici ce que j’aurais pu raconter encore à mes enfants, s’ils s’étaient montrés intéressés : « Par exemple, il y a cette jeune femme qui n’avait pas d’amoureux. Elle est allée voir le docteur pour congeler ses graines le temps d’en trouver un ; c’était interdit à l’époque dans ces conditions, mais Michaël Grynberg avait trouvé un moyen de le faire. Elle était revenue, un peu moins jeune, toujours sans amoureux. Elle lui avait dit qu’elle aimerait beaucoup avoir un bébé et que le temps pressait, mais qu’elle voulait qu’il y ait un papa avec elle. Alors, elle a demandé à son meilleur ami, qui avait déjà un amoureux, s’il accepterait d’être le papa. Il a dit oui. Mais ce meilleur ami était séropositif, ce qui veut dire qu’il avait une maladie qui présentait des risques pour le bébé. Alors, en discutant tous ensemble, ils ont finalement décidé que ce serait l’amoureux du meilleur ami qui donnerait une graine. Le bébé est né, une petite fille. Les deux papas et la maman ont tous emménagé ensemble dans un appartement. Pour les 5 ans de leur fille, ils lui ont écrit un petit livre qui raconte l’histoire de sa naissance. »
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