« Greenwashing », « gadget », « arnaque », « coup de communication », « désengagement de l’Etat »… Depuis le lancement, lundi 23 octobre, par le secrétariat d’Etat à la biodiversité et la Française des jeux (FDJ) de Mission Nature, un nouveau jeu à gratter visant à financer une vingtaine de projets de « restauration du vivant » en France métropolitaine et en outre-mer, les critiques fusent de toutes parts.
Sur les 3 euros que coûte le ticket, 43 centimes – c’est-à-dire la part que l’Etat prélève en temps normal – sont reversés à l’Office français de la biodiversité (OFB) qui financera ensuite les projets. Objectif de ce « loto de la biodiversité » : vendre 14 millions de tickets et récolter 6 millions d’euros pour l’OFB (pour les joueurs, le gain maximal au grattage est de 30 000 euros). Pour comparaison, la Mission Patrimoine, parrainée par l’animateur Stéphane Bern, et dont le principe est le même, a permis depuis sa mise en place en 2018 de récolter plus de 125 millions d’euros pour la Fondation du patrimoine.
Parmi les projets sélectionnés par un comité présidé par la secrétaire d’Etat à la biodiversité, Sarah El Haïry, figure notamment la restauration de la population de gypaètes barbus, plus grand rapace d’Europe, entre les Alpes et les Pyrénées, menée par la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) avec une dotation qui devrait atteindre 650 000 euros. « Nous nous réjouissons que la démarche [du loto du patrimoine] soit étendue à la sauvegarde de la biodiversité », s’est félicité, dans un communiqué, Allain Bougrain-Dubourg, le président de la LPO, en jugeant que « le patrimoine naturel connaît un déclin alarmant qui mérite la solidarité de tous ».
« Gadget »
Malgré la légitimité des projets soutenus, le projet est loin de faire l’unanimité. Pour Jean-David Abel, pilote du réseau biodiversité de France Nature Environnement, « 6 millions d’euros par rapport aux 10 milliards d’euros de subventions néfastes pour l’environnement, c’est assez dérisoire. Mais ça permet au gouvernement de faire de la communication et à la FDJ d’étendre la surface de ses gains ». Sur le total du prix du ticket, 1,98 euro sont redistribués aux joueurs en gains, 18 centimes sont destinés aux détaillants, 21 centimes aux taxes et 20 centimes restent dans les caisses de la FDJ.
Le syndicat FSU-Ecologie, qui représente des membres des ministères des transitions écologique et énergétique, de la cohésion des territoires et de la mer, parle, quant à lui, de « gadget ». « C’est du vent, estime Véronique Caraco-Giordano, la secrétaire générale du SNE-FSU. Ce sont des projets qui devraient être menés par l’Etat ou des instances compétentes. On désengage l’Etat, et on fait peser tout ça sur les gens. » En novembre 2022, lors des échanges au Sénat sur ce projet, la sénatrice Christine Lavarde (LR) avait exprimé une position similaire. « C’est mépriser tout ce qui est fait par le ministère, l’OFB ou les collectivités », avait-elle déclaré.
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