Vingt-quatre heures après la publication, jeudi 4 avril dans la revue Clinical Pharmacokinetics, d’une étude franco-britannique remettant en cause le caractère substituable des deux formules du Lévothyrox, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) s’est murée dans le silence. Sollicitée à plusieurs reprises par Le Monde et d’autres médias, l’agence d’expertise n’avait, vendredi en fin de matinée, pas souhaité s’exprimer sur la question.
Un peu plus de 30 000 patients ont signalé, depuis deux ans, des effets indésirables liés selon eux à la nouvelle version du médicament commercialisé par Merck. La réanalyse des données de bioéquivalence fournies par le laboratoire à l’ANSM, conduite par les auteurs de l’étude, indique que les réactions individuelles peuvent être différentes d’une formule à l’autre. Près de 60 % des quelque 200 volontaires inclus dans l’étude de bio-équivalence menée par Merck n’ont pas réagi de la même manière aux deux versions du médicament.
Le fait que l’ancienne et la nouvelle formule ne soient pas substituables pour chaque individu montre que les personnes qui avaient des effets invalidants « n’étaient pas folles, et (que) la crise du Levothyrox n’était pas un simple effet nocebo », a réagi l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT), dans un communiqué du 4 avril. L’effet nocebo (inverse de l’effet placebo) ne peut être exclu dans certaines situations mais, de fait, c’est la première fois qu’une explication rationnelle est proposée pour éclairer les plaintes déclarées par les patients après le changement de formule du Levothyrox.
« C’est la première fois que les malades sont pris en considération, se réjouit Beate Bartès, présidente de l’association Vivre sans thyroïde (VST). Ce n’est pas seulement un manque de transparence ni d’anticipation de la part de l’ANSM mais un manque de prudence. » « Les femmes qui se plaignaient d’effets secondaires invalidants avaient des raisons. Ce n’était pas une hallucination collective, on a eu tort de ne pas les écouter, renchérit Alain-Michel Ceretti, président de France Assos Santé, un regroupement d’associations de patients.
Alternatives disponibles depuis 2017
Pour la Direction générale de la Santé (DGS), « cette étude ne contredit pas les précédents travaux puisqu’elle aborde un autre objet, celui de la bioéquivalence individuelle. Il s’agit d’une contribution d’intérêt dans la quête scientifique menée par les chercheurs » pour élucider les causes des symptômes des patients jusqu’ici mal compris. « Le ministère rappelle que dès septembre 2017, la priorité a été de proposer de nouveaux traitements aux patients qui ressentaient des effets indésirables suite à la nouvelle formule du médicament », souligne encore la DGS.
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