Et si une lentille de contact pouvait tout à la fois évaluer les besoins quotidiens d’une maladie oculaire et apporter des soins ? Ce prototype futuriste existe pour le glaucome. Imaginé par une équipe de l’université coréenne Postech de Pohang, il a été testé sur des lapins et fait l’objet d’un article dans la revue Nature Communications.
« Pour ce projet, nous sommes partis de notre précédente recherche, une lentille intelligente qui surveille le glucose dans les larmes et administre des médicaments pour traiter le diabète (Science Advances) », explique le professeur Sei Kwang Hahn, auteur principal de ces deux publications. Le nouveau prototype a pris quatre ans à se concrétiser, précise-t-il, « car nous avons fait appel à des savoirs et technologies multidisciplinaires : nanomatériaux, électronique, communications sans fil, biotechnologies, usage de produits médicaux et pharmaceutiques », énumère-t-il.
Le glaucome, maladie oculaire irréversible, touche environ 1,5 million de personnes en France et résulte d’une augmentation de la pression intraoculaire (PIO). Elle peut rester silencieuse pendant près de deux décennies et entraîne une atrophie progressive du nerf optique. C’est la deuxième cause de cécité dans les pays développés après la dégénérescence maculaire liée à l’âge. Le remède principal est l’administration d’un collyre dont la fonction est de diminuer la PIO, « mais de nombreux patients ne respectent pas la méthode et l’heure des traitements indiqués », expliquent les auteurs. D’où l’idée de cette lentille « théranostique » (mot-valise combinant les adjectifs « thérapeutique » et « diagnostique ») qui mesure en continu à l’aide de capteurs la pression et délivre si nécessaire un collyre (le médicament utilisé ici est le Timoptol), inclus dans le dispositif.
La pression intraoculaire plus élevée la nuit
« Tous les traitements du glaucome, qu’ils soient médicaux, par laser ou chirurgicaux, n’ont qu’un objectif, faire baisser la PIO. La difficulté est que celle-ci peut varier d’une heure à l’autre et qu’elle est, par exemple, plus élevée la nuit », commente le professeur Antoine Labbé, ophtalmologue spécialiste du glaucome à l’hôpital parisien des Quinze-Vingts.
« En alliant suivi en continu de la pression intraoculaire et libération directe de médicament, cette lentille futuriste est séduisante, reconnaît le praticien. Cependant, il faut rester prudent. Un système qui fonctionne sur des plates-formes de test ne va pas forcément le faire sur l’œil humain dans des conditions d’utilisation réelles. »
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