L’eau douce est inégalement répartie sur la planète, et la rendre potable constitue un défi environnemental. « Les techniques de purifications actuelles, que ce soit par technologie thermique ou par filtration, nécessitent une énergie colossale », explique le scientifique Ji-Soo Jang, dont les recherches à Séoul englobent science des matériaux, ingénierie chimique et environnementale.
Et si une membrane filtrante était capable tout à la fois de produire de l’électricité et de rendre potable de l’eau impropre à la consommation, qu’elle soit usée, souterraine ou provenant de la mer ? C’est le projet imaginé par ce chercheur et une équipe multidisciplinaire de l’Institut des sciences et technologies coréen à Séoul et de l’université Myongji à Yongin. Leur prototype est détaillé dans la publication Advanced Material.
« Pendant mes études à l’institut Kaist, en Corée, puis lors de mon postdoctorat à Yale, aux Etats-Unis, je me suis beaucoup intéressé aux questions environnementales, notamment à celle de l’eau, ressource inestimable », raconte le chercheur. « Les membranes de purification et les générateurs d’énergie à partir de différentes sources d’eau ont déjà fait l’objet de publications. Cependant, il n’existe pas de concept permettant de fournir simultanément de l’eau purifiée et de l’électricité en contrôlant le flux d’eau. » D’où le défi que se sont lancé les scientifiques coréens.
Leur membrane dite « en sandwich » se compose dans sa partie inférieure d’une couche poreuse qui filtre l’eau et, dans sa partie supérieure, de nanotubes de carbone greffés sur la surface à l’aide de polymères et produisant de l’électricité. Ce filtre multifonction a été pensé pour contrôler la direction de l’écoulement d’eau. Perpendiculaire à la membrane, celui-ci « génère un courant continu par le mouvement tangentiel [dans le sens horizontal] des ions », expliquent les scientifiques.
Le prototype, réalisé en laboratoire, et obtenu après deux ans de recherche, a pu rejeter plus de 90 % des contaminants de taille inférieure à 10 nm (cent millionièmes de mètre), soit les microplastiques et les particules de métaux lourds présents dans les eaux usées testées. Il a également permis de produire de l’électricité en continu pendant plus de trois heures avec seulement 10 µl (microlitres) d’eau.
Répondre à la pénurie
« Cette idée, très intéressante et originale, s’inscrit dans la résolution de deux problématiques environnementales majeures du développement durable, la production d’énergie verte et le traitement d’eaux contaminées », commente, depuis Besançon, le maître de conférences de l’université de Bourgogne-Franche-Comté Sébastien Déon, responsable de l’équipe Nanoparticules, contaminants et membranes de l’institut Utinam.
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