L’ensemble de la communauté addictologique a réagi avec consternation, sinon stupéfaction, aux révélations diffusées sur France Inter, lundi 11 septembre, sur les dessous de l’annulation des campagnes de Santé publique France, prévues de longue date et supprimées sous la pression du lobby alcoolier et, en particulier, du lobby vitivinicole.
Nous ne découvrons évidemment pas l’interventionnisme de ce secteur économique sur les acteurs de santé qu’ils ne cessent de vilipender, alors que les conséquences de la consommation d’alcool sont de plus en plus indiscutables. Mais, jusqu’à présent, leurs vitupérations n’avaient pas permis d’obtenir la censure systématique de campagnes de prévention. Une étape supplémentaire a été franchie, qui est très inquiétante pour l’ensemble des sujets de prévention, et pas seulement celui des risques liés à la consommation d’alcool.
Le lobby alcoolier a fixé, de manière impériale, les conditions et les limites strictes dans lesquelles la prévention pourrait, à la rigueur, s’effectuer : elle devrait toucher le moins de monde possible (par exemple, uniquement les plus jeunes, sur les accidents), mais il est hors de question d’informer la population générale sur les risques, pourtant bien avérés et documentés scientifiquement, de cancers ou d’accidents vasculaires cérébraux, des mots qu’il ne faut surtout pas associer à l’alcool.
Pourtant, dans notre pays, face aux cent dix morts par jour, à l’encombrement des urgences par les ivresses aiguës, les accidents de la route des conducteurs de tous âges et les violences, le besoin d’information de la population est criant, comme le révélait une enquête publiée en janvier par l’Institut national du Cancer (INCa).
En effet, plus de huit personnes sur dix déclaraient que « le principal risque avec l’alcool, ce sont les accidents de la route et la violence », ce qui est faux, car le risque de maladies est celui qui contribue à la très grande majorité des décès. Pour 38,6 % des répondants, « ce sont surtout les alcools forts qui augmentent le risque de cancer », alors que le vin ou la bière y contribuent tout autant, car ce sont la quantité d’alcool et la fréquence de la consommation qui jouent et non le type de boisson. D’ailleurs, le vin – qui représente 60 % des consommations – est, certainement, plus en cause que les autres alcools.
Un risque dès le premier verre
L’INCa nous apprenait aussi que plus d’une personne sur cinq (23,5 %) pense que, « globalement, boire un peu de vin diminue le risque de cancer plutôt que de ne pas en boire du tout ». Malheureusement non, car le risque commence dès le premier verre. Ces fausses croyances doivent être déconstruites dans la population générale de manière résolue et continue si on veut avoir une action efficace et une prévention qui soit comprise par le plus grand nombre.
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