Dix-neuf personnes placées en garde à vue, des perquisitions menées en 25 points du territoire, depuis la Seine-Maritime jusqu’aux Yvelines en passant par le Val-de-Marne et l’Eure, 150 policiers mobilisés, dont des colonnes du RAID, de la BRI de Rouen et 60 enquêteurs de la sûreté départementale, la saisie d’un million d’euros – dont 375 000 euros en liquide –, 15 kg d’héroïne, des véhicules, des armes… L’opération d’envergure menée vendredi 8 octobre au matin et révélée par l’Agence France-Presse a, selon une source judiciaire, « sans doute décapité le plus important réseau de trafiquants de la région rouennaise, à la source de 75 % de l’approvisionnement de la métropole normande en “stups” ».
Elle interroge aussi les enquêteurs de la sûreté départementale (SD) de Rouen, à l’origine de cette affaire hors normes : la mairie de la petite commune de Canteleu, dans la Seine-Maritime, était-elle placée sous la coupe d’un réseau de trafiquants de drogue ? Parmi les personnes interpellées figurent en effet la maire (Parti socialiste-Europe Ecologie-Les Verts), Mélanie Boulanger, par ailleurs vice-présidente de la métropole en charge de la jeunesse, de l’enseignement supérieur et de la recherche, et l’un de ses adjoints. Mme Boulanger a été remise en liberté à l’issue de sa garde à vue samedi soir, « sans qu’aucune charge ne soit retenue contre elle », a déclaré son avocat Me Arnaud de Saint Rémy, à l’Agence France-Presse.
Deux ans d’investigations
La SD tente de démêler les rôles respectifs dans ce dossier et les rapports entretenus avec la famille M., présentée par la même source judiciaire comme « incontournable dans le trafic de drogue de la région ».
Très implantés à Canteleu, les M. gèrent également leurs affaires depuis leur base arrière du Maroc, où les têtes de réseau de cette famille se sont réfugiées et ont massivement investi, notamment dans de florissantes affaires immobilières. Décrits comme « structurés », « malins » et « multicartes », cloisonnant soigneusement leurs équipes et « capables d’importer indifféremment du cannabis, de la cocaïne et de l’héroïne – leur spécialité », les M. ont été contraints de réorganiser leurs circuits logistiques il y a plusieurs mois en raison de la pandémie de Covid-19. Pour ce faire, ils auraient délaissé leur traditionnelle filière d’importation via l’Espagne pour se tourner vers les Pays-Bas. Vendredi, plusieurs des personnes interpellées revenaient précisément de Hollande, où elles s’étaient rendues pour renouveler leur stock de marchandise.
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