![Rassemblement de policiers et de magistrats contre le projet de réforme de la police judiciaire devant le palais de justice de Nantes, le 17 octobre 2022.](https://img.lemde.fr/2022/10/17/0/0/6993/4667/664/0/75/0/27e9e36_5483814-01-06.jpg)
« Police judiciaire, date de création : 1907, dissolution : 2023. » La modification de la page Wikipédia consacrée à la PJ a beau avoir été rapidement rectifiée, la capture d’écran a rapidement fait le tour des services de France et de Navarre. La facétie en dit long sur l’état d’esprit qui prévaut dans cette maison plus que centenaire, où le projet de direction unique de la police dans chaque département n’en finit pas d’occasionner des remous.
Officiellement, les expérimentations menées dans les outre-mer et huit sites pilotes en métropole (Pas-de-Calais, Pyrénées-Orientales et Savoie depuis janvier 2021, puis Calvados, Haut-Rhin, Oise, Puy-de-Dôme et Hérault un an plus tard) donnent pleine et entière satisfaction. Unification des états-majors, bases de données communes pour traiter les procédures et partager le renseignement, développement de stratégies globales, meilleure coordination : « Malgré certaines difficultés, que je ne mésestime pas, nous enregistrons des progrès opérationnels », a assuré le directeur général de la police nationale, Frédéric Veaux, devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, le 12 octobre.
Mais, sur le terrain, l’enthousiasme est moins flagrant. Au-delà des remous provoqués par la réforme de la police judiciaire, les points de friction demeurent, au plus près de la réalité vécue par les effectifs. Souvent, ils concernent la répartition des compétences et des dossiers entre PJ, théoriquement affectée sur les affaires les plus complexes, et sûretés départementales (SD), chargées de traiter la délinquance du quotidien, qui dépendent de la sécurité publique.
« Sérieux problèmes de confidentialité »
A Perpignan, où des phénomènes d’extrême violence sont constatés depuis 2019, les « PJistes » ont conservé leurs prérogatives mais ont refusé de travailler en commun avec les services de la SD locale en raison, assure un compte rendu interne, « de sérieux problèmes de confidentialité au niveau du commissariat ». Même les magistrats se sont émus de la situation, redoutant la disparition de l’antenne locale de la police judiciaire, alors que plus du tiers des affaires traitées par la juridiction interrégionale spécialisée de Marseille, en particulier en matière de narcobanditisme, relèvent de sa compétence. Dans le Calvados, en revanche, les cosaisines de la PJ et de la SD ont permis d’obtenir de bons résultats, au prix toutefois de compromis : noyés sous le nombre de dossiers, les fonctionnaires de la sûreté ne pouvaient pas gérer les gardes à vue ou traiter les écoutes téléphoniques.
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