L’hiver va être particulièrement compliqué pour les services de réanimation pédiatrique. Les tensions rapportées en Ile-de-France, où plus de trente-quatre transferts ont déjà dû être organisés vers d’autres régions, ne font pas exception. Sur le reste du territoire métropolitain, qui compte trente-sept services spécialisés dans la prise en charge d’enfants dont le pronostic vital est engagé, de nombreux établissements rapportent des lits saturés, des passages aux urgences en constante augmentation, et certains, comme à Rouen, Bordeaux, Limoges ou encore au Havre, ont dû activer leur plan blanc, un dispositif d’urgence permettant d’affronter une situation sanitaire exceptionnelle.
Au manque d’effectifs dans de nombreux services s’ajoute l’épidémie de bronchiolite, saisonnière et attendue, mais plus précoce et plus intense que les années précédentes. « L’épidémie a commencé quatre à cinq semaines en avance, et ce partout en France métropolitaine, dès le 10 octobre dans sept régions puis les deux semaines suivantes en Provence-Alpes-Côte d’Azur et en Corse », explique Sophie Vaux, de la direction des maladies infectieuses de l’agence Santé publique France (SPF). Plus de 6 000 enfants de moins de 2 ans sont passés aux urgences pour bronchiolite en métropole dans la semaine du 24 au 30 octobre, un bond de 47 % comparé à la semaine précédente, selon le bulletin hebdomadaire publié jeudi 3 novembre.
Si la bronchiolite survient tous les ans et reste la plupart du temps bénigne, elle peut entraîner des complications nécessitant l’hospitalisation dans 2 % à 3 % des cas, voire la réanimation, notamment chez les moins de 1 an. La maladie affectant près de 500 000 enfants chaque hiver, une dizaine de milliers auront besoin d’une place d’hôpital. « Les vacances scolaires n’ont pas eu leur effet de ralentissement habituel, et la courbe est beaucoup plus marquée qu’en 2021, avertit Sophie Vaux. On est déjà à un niveau supérieur aux pics des années précédentes. »
« Cinq enfants en cinq jours »
Si l’impact est différent selon les régions, l’épidémie a commencé plus fort dans le Nord et en Ile-de-France. A 150 kilomètres à l’est de Paris, les réanimations pédiatriques du CHU de Reims (Marne) ont déjà dû accueillir dix enfants parisiens depuis la mi-octobre. « Mais ça s’est surtout accéléré récemment, avec cinq enfants en cinq jours, souligne Gauthier Loron, responsable du service. Le SAMU d’Ile-de-France appelle au minimum deux fois par jour pour savoir si on a de la place. »
Dans la nuit de mercredi à jeudi, quatre des six lits étaient occupés par des petits Parisiens, trois bronchiolites et une grippe sévère. Du jamais-vu, selon le pédiatre. « Pour l’instant, l’épidémie n’en est qu’à ses débuts chez nous, mais bientôt on devra accueillir nos propres cas », alerte Gauthier Loron, dont le service de réanimation pédiatrique est le seul de Champagne-Ardenne. Contrairement à la capitale, où ce sont les personnels paramédicaux qui manquent, son secteur pâtit d’un déficit de médecins, peu attirés par ce désert médical pris entre le Grand-Est et Paris.
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