De la jungle colombienne jusqu’aux services d’urgence des hôpitaux français, les indicateurs les plus récents du trafic et de la consommation de cocaïne racontent « un marché en essor », comme le titre la dernière étude de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) en la matière, publiée à la fin du mois de mars. La « dynamique de diffusion s’est accélérée en vingt ans », souligne ce rapport, qui regarde la France à la loupe.
Le marché actuel est d’abord caractérisé par une offre qui n’a jamais été aussi forte. Selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime, 1 982 tonnes de cocaïne ont été produites dans le monde en 2020, contre 1 134 tonnes en 2010. La consommation en Europe est en forte expansion, note l’OFDT, avec environ 3,5 millions de consommateurs réguliers, dont 600 000 (contre 400 000 en 2010) en France, l’un des pays les plus touchés.
Les saisies n’ont jamais été aussi élevées. Après une moyenne de 11 tonnes par an dans les années 2010-2020, elles ont atteint le niveau record de 27,7 tonnes en 2022. Un « changement d’échelle » qui se reflète dans l’accessibilité du produit pour les consommateurs. « On constate une abondance de l’offre, marquée par une pureté du produit jamais observée auparavant – 72 % de principes actifs en moyenne en 2022 –, pour un prix bas, compris entre 50 et 70 euros le gramme », analyse Ivana Obradovic, directrice adjointe de l’OFDT. Soit un tarif quatre fois moins élevé qu’en 1990, même en tenant compte de l’inflation.
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« La cocaïne présente l’un des trafics les plus diversifiés, avec un recours à la livraison à domicile et aux outils numériques, poursuit Mme Obradovic. On remarque aussi désormais le recours à des logiques de fractionnement, permettant de vendre des doses à 10 euros par exemple. » Cette démocratisation de la consommation est portée par des comptes de vendeurs toujours plus populaires sur les réseaux sociaux. Ils vantent la qualité de leur marchandise, mettent en avant des offres promotionnelles et de fidélisation selon des stratégies marketing dignes de la grande distribution.
« Les méthodes de force de vente observées dans le commerce légal s’appliquent désormais à la revente de cocaïne, dans la continuité des observations déjà réalisées pour le cannabis », souligne l’étude de l’OFDT.
Cette accessibilité concerne l’ensemble du territoire français, et un public large, de tous milieux économiques et sociaux. En attendant l’enquête 2023 sur la consommation en population générale, en cours de réalisation, les dernières statistiques disponibles datent de 2017. Selon ces données, la majorité des 2,1 millions d’usagers de cocaïne recensés consomme « à titre expérimental ». Les usagers réguliers (au moins une fois dans l’année) sont tout à la fois des personnes intégrées socialement qui estiment « contrôler » leur usage et des consommateurs plus « intensifs », davantage marginalisés.
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