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A Marseille, le procès des tortionnaires d’un jeune revendeur de drogue laisse un goût d’inachevé

En 2019, un jeune homme de 16 ans avait été battu et brûlé pour avoir écoulé quelques grammes de cocaïne et de cannabis cité Félix-Pyat, sans l’autorisation des gérants du point de deal. Ses bourreaux ont été condamnés, vendredi, à de lourdes peines.

Par  (Marseille, correspondant)

Publié le 16 septembre 2023 à 01h12, modifié le 16 septembre 2023 à 09h24

Temps de Lecture 4 min.

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La cité Félix-Pyat, dans le centre de Marseille, lors du second tour des élections municipales, le 28 juin 2020.

Le procès aura été pour les jurés « un grand saut dans une de ces zones de non-droit où des mineurs venus de toute la France viennent “jobber” à Marseille, attirés par le mirage de l’argent facile », a estimé l’avocate générale. Mais devant la cour d’assises d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), une semaine d’audience n’aura finalement fait qu’entrebâiller la porte de la cité Félix-Pyat, l’un des quartiers les plus pauvres de France, où le réseau de vente de stupéfiants verrouille les entrées des immeubles et muselle la parole.

Dans ce haut lieu du trafic de drogue, aujourd’hui encore au cœur des guerres de territoires, Mathieu – le prénom a été modifié –, un adolescent de 16 ans, avait subi d’épouvantables sévices, une nuit d’août 2019, au seul motif qu’il était venu vendre quelques grammes de cannabis et de cocaïne pour son compte, sans l’autorisation des chefs du réseau.

Les quatre accusés, condamnés vendredi 15 septembre, à des peines allant de cinq ans à vingt-cinq ans de prison, ont tous grandi à Félix-Pyat où, selon l’accusation, « ils se sont familiarisés à la violence ». Face aux jurés, trois d’entre eux ont nié les coups de pied, de poing et la séquestration.

Pour Mathieu, ce fut un « voyage au bout de l’enfer », a résumé son avocat, Me Xavier Torré, venu de Chartres comme son jeune client, ballotté depuis l’âge de 2 ans entre foyers et familles d’accueil en Eure-et-Loir. Séquestré dans un local associatif désaffecté, ligoté au point qu’un mois plus tard, un expert relèvera toujours la trace de ses liens aux poignets, Mathieu a été brûlé une quarantaine de fois avec une cigarette et avec un chalumeau ou une bombe de laque enflammée sur les parties génitales. Brûlé sur 5 % de la surface de son corps. Sur une échelle de 5, un expert avait évalué les souffrances endurées au maximum, au point que le jeune garçon avait tenté de s’étouffer avec le bâillon que ses tortionnaires lui avaient enfoncé dans la bouche.

« Il y a des trucs plus graves dans la vie, ce n’est pas mon souci. A la Castellane [une cité où est installé un autre supermarché de la drogue], ça aurait été pire », avait répliqué El Kabir M’Saidie Ali, 24 ans, aux enquêteurs qui lui montraient les photos des blessures de Mathieu. En dépit de farouches dénégations, ce garçon au casier judiciaire lourd a été condamné à vingt-cinq ans de réclusion pour séquestration avec actes de torture et de barbarie.

« Tout le monde savait »

« On a grandi dans ce genre de trucs, des faits divers comme ça, ça choque, mais moi je suis dans ma bulle. Si on a de l’empathie pour tout ce qui se passe, on n’avance pas », a-t-il ajouté, adoucissant son discours face aux jurés. Ses avocats, Mes Tiphaine Rémy et Romain Dinparast, ont expliqué qu’« à Félix-Pyat, il faut se construire une carapace et ne pas s’intéresser aux autres. C’est un instinct de survie ». Mathieu, les yeux bandés lors des tortures, avait formellement identifié la voix d’El Kabir M’Saidie Ali, lors d’un tapissage vocal organisé par les policiers. « Il avait vacillé en l’entendant », a rapporté le directeur d’enquête.

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