Dans un alpage sur les hauteurs des Houches (Haute-Savoie), douze survivantes d’un cancer du sein s’étreignent sous une ribambelle de drapeaux de prière tibétains. Elles pleurent leurs peurs et frustrations, s’encouragent, aussi, pour la vie qui les attend finalement. Elles clôturent de cette manière, en ce vendredi de septembre, une semaine d’un « stage réparateur » dispensé par A chacun son Everest !, une association créée en 1994 par l’alpiniste Christine Janin.
Au début du séjour, dimanche, Geneviève B., 58 ans, Emma L., 37 ans, Nadjia H., 54 ans, Florence V., 49 ans, ou encore Elise G., 46 ans, étaient une travailleuse indépendante, une infirmière, une consultante, une secrétaire, une enseignante ; une mère et une compagne, que la maladie avait laissées seules face à la guérison. Vendredi, face au massif du Mont-Blanc, elles ne font qu’une.
La structure a accueilli plus de 1 900 femmes en rémission d’un cancer du sein depuis 2011, avec l’objectif de redonner « confiance, joie de vivre et élan de vie ». C’est cela qu’Elise G. est venue chercher auprès de l’association. Professeure de français dans un collège isérois, elle reprendra bientôt son poste après un an et demi d’arrêt maladie.
De l’aveu de toutes, la période qu’ouvre la fin des traitements lourds est la plus difficile, parce qu’elle laisse le temps, enfin, de réaliser ce que l’on a traversé. Le corps est dégradé, fatigué et amputé, parfois ; l’esprit, éprouvé. « Les proches s’attendent pourtant à ce qu’on soit comme avant la maladie, mais on ne sera plus jamais “comme avant” », assure Elise G.
« Plus rien sur le caillou »
Dans la maison de l’association à Chamonix-Mont-Blanc, où les pensionnaires sont logées dans une ambiance de colonie de vacances, on apprend à connaître celle qu’on est devenue. Première Française à gravir l’Everest en 1990, Christine Janin a élaboré une méthode d’accompagnement fondée sur le parallèle entre l’alpinisme et la maladie – le cancer étant la montagne à gravir, et surtout à redescendre.
Tout le programme du séjour en découle : de l’escalade et de la randonnée, pour se prouver qu’on est capable ; de la tyrolienne, pour lâcher prise ; un saut dans le vide, pour quitter sa peur de l’inconnu. Des groupes de parole, des entretiens avec psychologue et oncologue, et de la méditation complètent les soins.
En arrière-plan, toujours, on travaille sur l’acceptation de sa nouvelle image. Geneviève B. n’aime plus ses cheveux. Avant, elle les portait sous les épaules ; maintenant, ils sont courts et gris. Sous les encouragements, Geneviève B. se prête au jeu de la séance photo organisée mercredi, et butine les compliments sur son élégance et sur le caractère que sa coupe lui confère.
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