Flics et voyous ont partagé deux jours durant le même banc du tribunal correctionnel de Marseille, confrontant les juges aux dérives du statut d’informateur de police et, comme l’a dit la procureure, à « un étonnant mélange des genres et à des personnalités atypiques ». Aujourd’hui révoqués, deux policiers de la région parisienne, Sonia Cocouard, 45 ans, et Soufiane Ouguayour, 43 ans, ont été respectivement condamnés, vendredi 12 avril, à des peines de trois ans de prison dont un an avec sursis probatoire et de trois ans de prison dont dix-huit mois avec sursis probatoire – la partie ferme étant à purger sous bracelet électronique à domicile.
Ces condamnations – en deçà des trois années requises par le parquet – prononcées notamment pour le détournement de fichiers de police, sanctionnent leurs étroites relations avec Salim Benyoub, surnommé « Le Chacal ». Ce trafiquant de drogue, condamné en Algérie à la réclusion criminelle à perpétuité, était officiellement enregistré comme informateur depuis 2012 à la brigade de répression du banditisme de Paris et, depuis 2014, à l’OCRTIS, l’ancien office central de lutte contre les stupéfiants.
Aux premières heures du 16 mars 2018, on lui dérobe 60 ou 150 kg – on ne sait pas exactement – de résine de cannabis et 100 000 cachets d’ecstasy entreposés dans un box à Ermont (Val-d’Oise). Valeur marchande de la cargaison : 400 000 euros. Immédiatement, Salim Benyoub soupçonne Mourad B., un de ses vieux amis, d’avoir soufflé l’adresse du box. Il n’aura de cesse de le pister et de le retrouver, aidé en cela, selon la justice, par ses amis policiers, qu’il sollicite pour obtenir des éléments sortis des fichiers de police.
Exécution mise en scène
« Le Chacal » recrute un commando à Marseille lorsqu’il apprend que Mourad B. s’y cache. Dans la nuit du 6 au 7 juin 2018, ce Lyonnais de 53 ans est enlevé, jeté dans le coffre d’une voiture avant d’être frappé dans une cave d’une résidence marseillaise où son exécution est mise en scène. Il sera finalement libéré et filera, en sang, porter plainte. Les quatre membres du commando ont été condamnés à des peines s’échelonnant de sept ans de prison pour l’organisateur de l’expédition punitive à trois ans, dont un avec sursis, pour le chauffeur d’un véhicule.
Salim Benyoub, qui tiendrait désormais à Meknès (Maroc) une petite échoppe de coiffeur, s’est vu infliger neuf ans de prison et, en raison de son absence durant le procès, le tribunal a décerné un mandat d’arrêt. Véritable manitou de ce dossier, il a été décrit par le chef de l’expédition punitive comme un commanditaire lui ayant promis 100 000 euros pour récupérer la drogue et « éliminer » la victime.
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