Travaux bloquant les axes routiers, fermetures les week-ends du RER D et de la ligne de métro 14… Bientôt, tout cela ne devrait plus être qu’un mauvais souvenir pour les habitants de L’Ile-Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), commune de 7 kilomètres de long et 250 mètres de large, coincée entre deux bras de la Seine, et les villes de Saint-Denis, Saint-Ouen et Villeneuve-la-Garenne.
D’ici peu, l’usine à béton et ses norias de camions, qui polluaient les berges, seront également parties. Et envolée aussi avec eux la grogne des îliens (ils étaient plus de 8 600 fin 2021) et ce sentiment de vivre un chantier sans fin dû à la préparation des Jeux olympiques (JO). Mohamed Gnabaly est, en tout cas, persuadé de sa « chance » : « Sans les JO, jamais je n’aurais pu transformer la ville comme on va le faire », lance le maire écologiste de la commune.
Et d’égrener les équipements liés aux Jeux dont la petite commune va bénéficier : le village olympique accueillant les athlètes, qui sera transformé en 320 logements et une résidence étudiante, une base nautique, une cité des arts, une passerelle sans voiture reliant l’île à la partie village de Saint-Denis, un complexe sportif rénové avec piscine. Mais aussi des infrastructures et travaux que la municipalité attendait depuis quinze ans : un mur antibruit le long de l’A86, l’enfouissement de lignes à haute tension, l’aménagement de 14 kilomètres de berges.
Le jeune élu (38 ans) s’est démené pour vaincre les réticences d’une partie de sa majorité écologiste et poser ses conditions. « L’équipe était divisée sur l’opportunité de dire oui à l’accueil des JO, et l’opposition dénonçait l’énormité de leur coût. La promesse de l’événement m’a servi de levier », raconte-t-il.
Il a négocié la rénovation thermique du parc social, une seconde ligne de bus et la restructuration de la cité Marcel-Paul, avec démolition de trois tours vétustes en proie à un trafic de drogue endémique. L’enjeu était de taille pour cette commune aux 85 nationalités, qui compte 60 % de logements sociaux, où le taux de pauvreté atteint 31 % et qui est plus connue pour ses friches laissées par les Galeries Lafayette et les entrepôts du Printemps que pour sa réserve ornithologique.
Dans un territoire – celui de Plaine commune – où l’élu sait qu’il pèse peu, « Mohamed a bien engrangé et gagné en influence politique », remarque Stéphane Troussel (Parti socialiste), président du département de Seine-Saint-Denis. La trajectoire de ce Franco-Sénégalais, troisième d’une fratrie de six – père théologien, devenu imam de l’Ile-Saint-Denis, mère médiatrice sociale à la Goutte d’or, à Paris –, ne le destinait pourtant pas à la politique.
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