Il y a Kevin Mayer et « Keke la braise ». Kevin Mayer est l’athlète raisonnable venu aux championnats d’Europe de Rome pour atteindre enfin les minima olympiques (8 460 points) qui lui permettront d’être à Paris cet été. Et puis il y a « Keke la braise », surnom que le susnommé revendique. Lui, c’est le compétiteur qui n’aime rien tant que battre ses performances et martyriser son corps pour y parvenir ; jusqu’au point de rupture et, souvent, au-delà. Le décathlonien n’a pas fini une seule compétition depuis 2022, et la liste de ses blessures remplirait un Vidal.
A Rome, Kevin Mayer devait aller jusqu’au bout du décathlon pour espérer être classé. Une lapalissade qu’il fallait faire admettre à Keke la braise. Toute la première journée des épreuves, lundi 10 juin, Kevin Mayer a donc éteint en lui le Keke la braise qui couvait. Aux cinq premiers ateliers, qui ne furent jamais ses favoris, l’athlète a ménagé ce corps qui l’a lâché plus souvent qu’à son tour. Et aligné des performances très en dessous de ses marques habituelles, au point de terminer sa journée dans le ventre mou du classement. Mais il l’avait terminée.
Mardi, Keke la braise a d’abord laissé Kevin Mayer maîtriser sagement son 110 m haies. L’athlète s’était déjà blessé sur cette épreuve, il l’appréhendait. Il s’était même entraîné à changer de pied d’appui, en cas d’indélicatesse. A l’arrivée, un temps de 14 s 29 honorable. Et là, Keke la braise a pris le mors aux dents. Tout cela est indigne de toi, a-t-il dit en substance à Kevin Mayer. Tu es recordman du monde, Kevin, avec 9 126 points. Assez de ces calculs d’épicier.
Un troisième saut à la perche décisif
Il a pris les choses en main, Keke la braise. Et occasionné des frayeurs à Kevin Mayer et à ses nombreux fans. Il a ainsi décidé, dans la seconde épreuve de la journée, le saut à la perche, de démarrer le concours à 5 m. Kevin Mayer, s’il avait été sage, aurait assuré un saut inférieur, afin d’éviter un zéro éliminatoire. Cinq mètres donc, a décidé Keke la braise, c’est du tout cuit pour toi qui as déjà fait 5,40 m. A ceci près que, le concours ayant pris du retard, Kevin Mayer n’a eu le droit qu’à deux sauts d’entraînement pour se régler. C’est peu pour quelqu’un qui n’est plus allé aussi loin dans un décathlon depuis une éternité. « Ma course d’élan n’était pas réglée », a expliqué l’athlète après coup. Premier essai, manqué. Deuxième essai, manqué. Le troisième devenait décisif. Le passer, c’était assurer son billet pour Paris. Le rater, c’était être éliminé et tout compromettre.
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