Législatives : quel est ce collectif antifa dont la manifestation devant l’Assemblée a été interdite dimanche soir ?

Le collectif « Action antifasciste Paris banlieue », dont faisait partie Clément Méric tué par des militants d’extrême droite en 2013, avait prévu de défiler jusqu’à l’Assemblée nationale dimanche soir. Mais la préfecture de police de Paris a interdit le rassemblement.

La manifestation prévue ce dimanche a été interdite par la préfecture de police de Paris. AFP/Christophe ARCHAMBAULT
La manifestation prévue ce dimanche a été interdite par la préfecture de police de Paris. AFP/Christophe ARCHAMBAULT

    « Quelle que soit l’issue, aujourd’hui plus que jamais faisons bloc par tous les moyens face à l’extrême droite et ses alliés ». C’est le mot d’ordre de l’appel à manifester lancé par le collectif « Action antifasciste Paris-Banlieue » sur les réseaux sociaux ce dimanche soir à 20 heures devant l’Assemblée nationale, après les résultats du second tour. Pour ce collectif : « Sans la rue, pas de Front populaire ». Le problème ? La préfecture de police de Paris vient d’interdire le rassemblement dans un arrêté du jeudi 4 juillet.



    Cette dernière « estime que la manifestation est de nature à troubler l’ordre public » et que le collectif n’aurait pas déclaré le rassemblement trois jours avant la date prévue. Surtout, le cabinet du préfet de police considère ce groupe comme « comme coutumiers d’actions violentes, dégradations et violences contre les personnes, notamment à l’occasion de manifestations revendicatives ».

    Pas de date précise de création

    La première fois que le grand public entend parler du collectif « Action antifasciste Paris Banlieue », c’est le 5 juin 2013 avec le meurtre de l’un de ses membres, Clément Méric, par des militants d’extrême droite du mouvement nationaliste « Troisième Voie », depuis dissout. L’affaire Méric est vite médiatisée, tout comme les groupes « antifa », dont « Action antifasciste Paris Banlieue ». Mais difficile de chiffrer ses membres ni dater précisément sa création. Si l’Instagram du collectif compte plus de 28 000 abonnés, la réalité est tout autre. C’est un groupe informel, qui fonctionne par affinité, entre membres se connaissant.

    Entre « 25 et 30 membres actifs allant jusqu’à 150 sympathisants, au maximum (…) clairement, il ne faut pas fantasmer qu’il y aurait une centaine de militants aguerris qui répondent à leurs appels », explique le journaliste indépendant Sébastien Bourdon, auteur de l’enquête « Une vie de lutte plutôt qu’une minute de silence » sur des groupes antifa, dont le collectif « Action antifasciste Paris Banlieue ».

    Pour la même raison, il est « impossible » de donner une date précise de fondation du groupe, comme le rajoute Sébastien Bourdon qui, après avoir interrogé plusieurs membres du collectif pour son enquête, daterait la formation de la fin des années 2000 entre 2007 et 2009. Quant à ses membres, leur moyenne d’âge serait d’environ 29 ans.

    Des modes d’action différents

    Quelques années après l’affaire Méric, le collectif fait à nouveau la une des médias : en 2016, en marge des manifestations de la Loi Travail à Paris, lors de l’incendie d’une voiture de police quai de Valmy, où se trouvaient deux agents, sortis à temps. Quatre militants antifascistes sont arrêtés sur place. Certains sont proches d’« Action antifasciste Paris Banlieue ». Le Premier ministre de l’époque, Manuel Valls, les désigne comme « ceux qui veulent se payer du flic ».

    Rapidement, c’est l’image d’un groupe uniquement violent qui est donnée. En réalité, les actions du collectif sont beaucoup plus larges. « Il ne s’agit pas de nier que la violence fait partie de leur répertoire d’action, ils l’assument tout en justifiant cela comme une forme d’auto-défense. Mais ce n’est pas le mode d’action central, le militantisme reste classique : aller en manifestation, faire du collage, tracter comme n’importe quel militant politique », détaille encore Sébastien Bourdon.

    En France, il y a aujourd’hui deux tendances d’antifascisme : les autonomes et la Jeune Garde, cette dernière étant focalisée sur l’extrême droite et le jeu partisan. Le collectif « Action antifasciste Paris et banlieue » se retrouve, lui, dans la première. Sébastien Bourdon explique que ses membres ont « une définition assez large de la lutte contre le fascisme ou l’extrême droite, qui ne se résume pas à lutter contre les partis et groupuscules, mais plutôt contre la fascisation de la société, ce qui inclut notamment la question des violences policières ou du traitement des migrants. ».

    Les actions sont variées et vont de la perturbation du meeting d’Éric Zemmour à Villepinte pendant la campagne présidentielle en 2022, à la participation d’un village antifasciste centré autour de prises de paroles.

    Pour l’heure, depuis l’annonce de l’interdiction par la préfecture, « Action antifasciste Paris et banlieue » n’a pas officiellement communiqué sur l’annulation ou non de la manifestation prévue dimanche soir à l’issue des résultats du second tour des législatives.