L’été 2023 a été le plus chaud depuis deux mille ans et on le sait grâce aux pins sylvestres

Une étude publiée ce mardi 14 mai compare la température de l’été dernier à une période où les thermomètres n’existaient pas encore. On vous explique comment ils ont lu la météo du passé dans les stries des arbres.

Les résultats de cette étude s’appuient sur l’examen de pins sylvestres vivants mais aussi des troncs fossilisés notamment en Finlande et en Suède. Istock
Les résultats de cette étude s’appuient sur l’examen de pins sylvestres vivants mais aussi des troncs fossilisés notamment en Finlande et en Suède. Istock

    L’été 2023 a été le plus chaud jamais enregistré. Pour l’affirmer, les météorologues s’appuient sur des séries de relevés dont certains tracés en pleins et en déliés remontent au dix-neuvième siècle comme dans les registres jaunis du Mont Aigoual (Gard). Mais une étude publiée dans la revue scientifique Nature ce mardi 14 mai montre que les trois mois, de juin à août 2023, sont bien les plus chauds depuis… deux mille ans. Et ce sont les arbres qui le disent.

    Les enfants savent en effet compter l’âge d’un arbre en regardant sa souche : un anneau, un an, deux anneaux deux ans… Mais les dendroclimatologues, de grands enfants, surveillent aussi la largeur ou la densité de ces stries, deux caractéristiques qui dépendent des températures comme l’épaisseur des cellules dans chaque bois. Cette science — qui consiste donc à lire le climat dans les cernes des arbres — avait été imaginée dès le quinzième siècle par Léonard de Vinci, elle a depuis été bien perfectionnée.

    Comment remonter à 2000 ans en arrière alors qu’aucun arbre ou presque ne vit si longtemps ? « Les plus vieux arbres en Scandinavie notamment vivent approximativement 400 ans », confirme Max Torbenson, paléoclimatologue à l’université Johannes Gutenberg en Allemagne, qui a participé à cette étude. Leurs résultats s’appuient sur l’étude de pins sylvestres vivants mais aussi des troncs fossilisés notamment en Finlande et en Suède.

    Impossible d’obtenir des données fiables à partir d’un seul chêne rouge d’Amérique par exemple, la méthode consiste à collecter des échantillons dans différents sites d’une même région, poussés à des époques différentes pour reconstituer une chronologie sur plusieurs siècles, « au total plus de 10 000 séries, plusieurs dizaines de travaux, réalisés par des centaines de chercheurs », souligne Max Torbenson.

    Inquiétant, mais pas surprenant

    Les dendroclimatologues lisent le climat dans les cernes des arbres.
    Les dendroclimatologues lisent le climat dans les cernes des arbres. Istock

    Les forêts constituent de formidables archives. À ce propos, les spécialistes de la lecture des entrailles des arbres ont un coup de gueule à pousser : « Il est de plus en plus difficile de prendre des échantillons même pour la science. Passez le mot, il faut que l’on puisse continuer ces recherches passionnantes ! », sourit Jan Esper, auteur principal de l’étude, également professeur à l’université Johannes Gutenberg.

    Les arbres ont en tout cas délivré leur verdict : l’étude démontre qu’à nos latitudes, l’été de 2023 a excédé les températures moyennes pour les années entre l’an 1 et 1890 de 2,2 °C. Comparé à l’été le plus frais de la période celui de -536, rafraîchi par une éruption volcanique, l’été 2023 a été de 3,93 °C plus chaud. Comparativement, la surveillance de la montée de nos thermostats globaux depuis la période préindustrielle, c’est de la gnognotte ! L’Accord de Paris surveille en effet l’écart de la température mondiale par rapport à la situation entre 1850 et 1900 et nous presse de ne pas réchauffer l’atmosphère de plus que 2 °C.



    « Ces résultats m’inquiètent mais ne me surprennent pas, ils démontrent le réchauffement actuel sans précédent et la nécessité d’une action immédiate pour réduire nos émissions de CO2 », avoue Jan Esper. Dans une précédente étude, qui lisait le passé dans les cernes des arbres, il montrait que les Gaulois du temps de Vercingétorix pourraient, par exemple, avoir eu plus chaud que nous durant les mois d’été. La Terre se serait refroidie durant 2 000 ans, jusqu’à ce que l’Homme commence à libérer massivement des gaz à effet de serre.

    Attention toutefois, « nos séries ne sont valables que pour l’hémisphère nord, entre le trentième et le quatre-vingt-dixième parallèle », précise Jan Esper, Pourquoi ? Parce qu’ils se sont appuyés sur les « neuf plus longues séries d’arbres sensibles à la température disponibles ». Or les données manquent de l’autre côté du globe quant aux plantes tropicales qui ne croissent pas de la même façon.