JO Paris 2024, basket : « Une horreur », comment le staff des Bleus annonce aux joueurs leur renvoi avant les Jeux

    Durant le week-end en Allemagne, le staff des Bleus doit réduire son groupe de seize joueurs à seulement douze unités. Vincent Collet doit annoncer à quatre d’entre eux qu’ils ne disputeront pas les Jeux à la maison. Un moment cruel autant pour lui que pour les exclus.

    Vincent Collet dévoile les dessous de l'entretien avec les joueurs non-retenus. Nikola Krstic/Icon Sport
    Vincent Collet dévoile les dessous de l'entretien avec les joueurs non-retenus. Nikola Krstic/Icon Sport

      Ce 6 juillet, dans la matinée et un salon du Marriott Hôtel, à 100 m des berges du Rhin à Cologne, Vincent Collet convoque deux joueurs : Nadir Hifi et Jaylen Hoard. Il leur annonce qu’ils ne seront pas sur la feuille du match de la rencontre contre l’Allemagne championne du monde, à 16 heures (en direct sur la chaîne l’Équipe) à la Lanxess Arena. Le feu follet parisien et l’intérieur de l’Hapoël Tel-Aviv ont vite compris. Ce renvoi en tribune signifie en principe pour eux la fin de l’aventure olympique. C’est certain pour Hoard qui ne fera pas partie de la liste des douze que le staff des Bleus enverra dimanche midi au Comité olympique qui la validera définitivement et la communiquera ce lundi 8 juillet. Ce n’est peut-être pas le cas de Hifi qui reste dans la discussion du staff des Bleus et dans l’esprit du sélectionneur, qui n’a pas le droit de communiquer le nom des heureux élus, privilège exclusif du Comité olympique.

      La corvée du sélectionneur n’est pas terminée. Dans la soirée, après une ultime réunion avec ses adjoint et le staff au complet, il invitera deux autres garçons dans ce même salon pour leur dire qu’eux non plus ne feront pas les Jeux. Dans l’après-midi, les Bleus jouent contre les champions allemands avec un groupe de quatorze joueurs. C’est encore deux de trop pour faire la liste, et l’heure des choix cruels est arrivée. Au moment du coup d’envoi, ils sont quatre à jouer leur place, quatre pour deux fauteuils seulement.

      « Il y a parfois de la colère »

      « Ce moment d’entretien est une horreur, le pire qui puisse arriver dans ma fonction de sélectionneur, autant que perdre un match important d’un point sauf que l’émotion est différente », confie le Normand, habitué à ce genre d’exercice depuis quinze ans : dire à un joueur qu’il faut qu’il s’en aille même s’il a bien travaillé. « Je ne suis jamais seul dans ce moment, reprend Collet. Comme chaque entretien individuel qu’on fait avec les joueurs, je suis accompagné par Boris Diaw, notre manager général, et son nouvel adjoint Frédéric Sarre. Avant que Fred ne nous rejoigne pour cette campagne, c’était avec un de mes assistants. Mais dans le fond, ça ne change rien. C’est ma décision et donc moi qui l’annonce. Croyez pourtant que je laisserai bien cette tâche à quelqu’un d’autre. »

      En quinze ans, avant chaque campagne internationale, le sélectionneur a vu toutes sortes de réactions durant ces entretiens particuliers. « Il y a toujours de la déception, certains le montrent, d’autres pas. Il y a aussi parfois de la colère, car les émotions à cet instant-là sont très singulières. Mais que puis-je faire d’autre ? Si je ne le dis pas à ce joueur qui est en face de moi, je devrais bien le dire à un autre. Même si c’est terrible, c’est un choix qu’il faut expliquer et assumer. »



      Le moment de souffrance n’a pas besoin de s’éterniser bien longtemps, quelques minutes seulement. « C’est un moment douloureux pour le joueur comme pour nous, regrette Boris Diaw. Quand on demande au garçon en question de nous rejoindre, forcément il se doute déjà de ce qu’on va lui annoncer. Notre discours est alors individualisé pour chacun. On explique nos raisons, ce qu’on recherche et le pourquoi du comment ce n’est pas lui qui est choisi. On ne lui dit pas qu’il a fait les choses mal, car ce n’est pas le cas. C’est juste une question de choix, de complémentarité et c’est important de pouvoir être clair et transparent avec les joueurs. »

      « Cet entretien n’est pas une finalité »

      Depuis sa prise fonction en 2009 et après 242 matchs sur le banc des Bleus, Vincent Collet a dit stop à des générations de joueurs pour des Euros, des Mondiaux et même des JO. Mais jamais pour des Jeux olympiques en France, à trois semaines du premier match. « Oui, c’est encore plus dur cette fois, car l’investissement est total de la part de chacun, témoigne le patron des Bleus. Tout le monde a envie de faire partie de cette sélection. Mais encore une fois, c’est un choix et une question de complémentarité à faire. Si je le fais dans ce sens, c’est parce que je pense qu’un autre garçon que celui que j’ai en face de moi à ce moment précis a plus de chance de nous permettre d’atteindre l’objectif que nous nous sommes fixé. Pas parce qu’un autre est plus méritant. »

      Boris Diaw insiste, lui l’ancien capitaine aux 247 sélections qui n’a jamais été de l’autre côté de la barrière, convoqué par son sélectionneur pour lui dire au revoir et merci. « Par le passé, raconte le champion d’Europe 2013, nous avons déjà expliqué nos raisons à des joueurs que nous avons dû couper et peut-être ce qui leur manquait pour faire partie de l’équipe. Ils ont travaillé sur ces manques, et plus tard, ils sont revenus en équipe de France. Certains sont même encore là aujourd’hui. Cet entretien n’est pas une finalité, et c’est cela qu’il faut comprendre. » La porte de l’équipe de France ne se referme jamais complètement. Contrairement à celle qui ouvre vers Jeux olympiques en France, et d’ici dimanche midi, elle claque définitivement sur les doigts de quatre internationaux.